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La reine de Saba

La reine de Saba

Titel: La reine de Saba
Autoren: Halter,Marek
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biches.
    Allez,
viens, toi mon nord qui s’avance comme la lune.
    Viens,
ton ventre brille contre le mien comme les boucliers d’or de la Forêt du Liban.
     
    Salomon
noyé dans la source de Makéda, voilà ma pensée dans le grand temple de
Jérusalem. Temple construit par Salomon. Pour le temple, j’ai apporté tout mon
or.
    Salomon,
je ne le verrai plus en chair, jamais, mais en esprit.
    Mon choix
et pas le sien. J’avais raison et le savais. L’amour qui brûle sans pudeur ne
dure pas. La jeunesse de Salomon dans l’amour ne durerait pas. Je le savais.
    Sagesse
des femmes : prendre et emporter l’amour avant que le temps le réduise en
poussière.
    Sagesse
des femmes : ne demeure pas dans l’éclair qui te brûle le ventre. Le beau
deviendra aigre comme le lait des chamelles trop longtemps restées dans les
prés gras.
    Nous
savons quand cela vient. Nous savons quand il faut emporter. J’ai su. Douleur
de Salomon. Les larmes et les menaces de Salomon, je les entends encore.
    J’ai
dit : Je pars. Ton amour ne peut être plus plein en moi. Temps de partir.
    Je savais
qu’il serait l’unique, comme son dieu. Aucun autre amour, aucun autre homme ne
viendrait dans la source de Makéda. Elle était comble pour le temps de la vie.
    Je le
savais, et c’était juste.
    Aujourd’hui
je suis fripée comme l’était Kirisha après la mort de mon père. Vingt années
écoulées. Je ne suis plus la beauté qui faisait se lever les hommes d’un bout à
l’autre des rives de la mer Pourpre.
    Jamais je
n’ai regretté.
    J’ai
souffert. Mon ventre a brûlé, mes cuisses ont mendié, mes reins ont incendié,
mon esprit a mordu. Yahvé a ri de moi.
    Je n’ai
pas cédé.
    Makéda,
l’unique épouse de Salomon, voilà ce que je suis devenue. Makéda à Saba, Salomon
à Jérusalem. Jusqu’à la mort. Sans un rouleau de papyrus entre nous. Des mots
qui chantent dans la poitrine chaque jour. Les mots de notre amour. Les mots
qu’il a construits avec mon collier d’or fondu aux signes de la langue de Saba.
    Les mots
d’or qui ont protégé ma poitrine sous la tente de notre rencontre.
    Un collier
que j’ai sacrifié à Yahvé, béni soit-Il, mon Dieu qui m’a soutenu. Le
Tout-Puissant, avec sa paume au-dessus de moi, avec sa paume au-dessous de moi.
    Yahvé, le
Dieu des Hébreux, pour Makéda, reine de Saba, noire de chair, femme du peuple
de Yahvé par amour pour Salomon, fils de David.
    Dans le
temple, je n’écoutais pas les mots de Tsadok mais ma volonté était pure. Mon
choix était pur. Je venais me soumettre à la loi de Moïse avec pureté. Pas de
mensonge. Pas de fausseté.
    Le souffle
du temple était froid. Moi, j’étais l’incendie qui cherchait la paix dans les
braises.
    Je me
souviens.
    Tsadok
dit : Suis-moi, fille du peuple de Yahvé. Salomon a voulu que tu approches
le Saint des saints. Salomon veut que tu approches le coffre d’acacia qui mit
le feu au Sinaï.
    Le Saint
des saints : largeur des murs, hauteur des murs, les mêmes mesures. Un
seul chandelier. Bois des murs et plaques d’or. Le vide, émotion du vide. Les
encens et rien. Le coffre d’acacia sur une pierre, petit : deux coudées et
demie de long, une coudée et demie de large, autant de haut.
    Les flancs
du coffre, deux barres d’or, des plaques d’or.
    Le
couvercle du coffre : la splendeur. De l’or épais, deux hommes aux ailes
d’aigle, kerubim.
    Tsadok
dit : Yahvé va sans image mais avec la Parole. L’Arche contient la parole
de Yahvé pour Moïse, la parole de Yahvé pour tout le peuple à la nuque raide.
Moïse a reçu les lois sur le Sinaï. Il a ordonné : construisez un coffre
d’acacia pour les pierres qui ont incendié le Sinaï. L’arche de Yahvé contient
les lois qui font entrer les hommes dans l’alliance. Yahvé, le Tout-Puissant
mille fois béni, sauve les hommes des ténèbres des hommes.
    Tsadok
dit : Si tu enfantes et qu’il te vienne un fils, tu le circoncis. Dans
l’anneau de la chair de l’homme, passe l’Alliance avec l’Éternel.
    J’ai un
fils. Je suis partie de Jérusalem le ventre plein. Un fils de Salomon. Oh le
bonheur.
    Je l’ai
nommé Ménélik, « Fils du roi », je l’ai circoncis comme Tsippora a
circoncis le fils de Moïse. Longue vie au fils de Salomon, que l’Éternel le
bénisse.
    Au retour
de Jérusalem, sur les bateaux, les hommes et les servantes étaient déconcertés.
Les prêtres grondaient. Ils étaient inquiets et sourcilleux. La reine de
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