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La pierre et le sabre

La pierre et le sabre

Titel: La pierre et le sabre
Autoren: Eiji Yoshikawa
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par contraste avec son ami rougi par le soleil et le saké. Il leva
des yeux clignotants vers la clarté du ciel bleu, et, s’étirant largement,
bâilla comme un fauve. Lorsqu’il eut enfin refermé la bouche, on put voir qu’il
n’avait cessé de froncer le sourcil. Il semblait soucieux.
    — Matahachi, dit-il d’un ton
sérieux, nous abusons de l’hospitalité de ces femmes. Elles prennent un gros
risque en nous gardant chez elles. Je crois que nous devrions rentrer chez
nous.
    — Je pense que tu as raison,
dit Matahachi. Mais on ne laisse personne traverser les lignes sans contrôle.
Les routes d’Ise et de Kyoto sont l’une et l’autre impraticables, si l’on en
croit la veuve. Elle dit que nous ne devrions pas bouger avant les premières
neiges. La fille est du même avis. Elle dit que nous devrions rester cachés, et
tu sais qu’elle est par monts et par vaux tous les jours.
    — Tu appelles se cacher être
assis à boire au coin du feu ?
    — Bien sûr. Sais-tu ce que j’ai
fait ? L’autre jour, des hommes de Tokugawa – ils continuent à
rechercher le général Ukita – sont venus fureter par ici. Je me suis
tout simplement débarrassé de ces salauds en sortant les saluer.
    Ici, comme Takezō ouvrait des
yeux incrédules, Matahachi éclata d’un gros rire. Une fois calmé, il poursuivit :
    — ... Tu es plus en sûreté
dehors, en plein air, que tapi dans le bûcher à guetter les bruits de pas et à
devenir fou. Voilà ce que j’ai essayé de te faire comprendre.
    A nouveau, Matahachi fut repris de
fou rire, et Takezō haussa les épaules.
    — Sans doute as-tu raison. C’est
peut-être le meilleur parti à prendre.
    Il avait beau conserver ses
doutes, après cette conversation il se transféra dans la maison. Okō, qui
de toute évidence aimait la compagnie, surtout celle des hommes, les mit
parfaitement à l’aise. Pourtant, de temps à autre, elle les faisait sursauter
en suggérant que l’un d’eux épousât Akemi. Cela paraissait troubler Matahachi
plus que Takezō qui se contentait d’ignorer la suggestion, ou l’écartait d’une
plaisanterie.
    C’était la saison des matsutaké charnus et parfumés qui poussent au pied des pins, et Takezō se risqua à
aller cueillir ces gros champignons sur la montagne boisée, juste derrière la maison.
Akemi, un panier à la main, les cherchait d’arbre en arbre. Chaque fois qu’elle
discernait leur odeur, sa voix innocente résonnait à travers le bois :
    — Takezō, par ici !
Il y en a des tas !
    Tout en prospectant dans les
parages, il répondait invariablement :
    — Il y en a des quantités par
ici aussi.
    A travers les branches de pins, le
soleil automnal descendait vers eux en fins rayons inclinés. Le tapis d’aiguilles
de pins, sous le frais abri des arbres, était d’un rose tendre et poudreux.
Quand ils étaient fatigués, Akemi le mettait au défi avec un petit rire :
    — Voyons lequel en a le plus !
    — C’est moi, répliquait-il
avec suffisance, sur quoi elle entreprenait d’inspecter son panier.
    Ce jour-là ne différait en rien
des autres.
    — Haha ! Je m’en doutais !
criait-elle.
    Avec une joie triomphante, propre
aux seules filles aussi jeunes, sans une ombre de gêne ou de modestie affectée,
elle se penchait sur le panier du garçon.
    — ... Vous avez des
champignons vénéneux dans votre lot !
    Alors, elle les rejeta l’un après
l’autre, sans aller jusqu’à les compter à voix haute, mais avec des mouvements
si lents et si délibérés qu’ils ne pouvaient guère échapper à Takezō, même
s’il fermait les yeux. Elle lança chacun d’eux aussi loin qu’elle put. Sa tâche
accomplie, elle leva les yeux, son jeune visage tout rayonnant de contentement
de soi.
    — ... Et maintenant, voyez
comme j’en ai plus que vous !
    — Il se fait tard, marmonna Takezō.
Rentrons.
    — Vous êtes fâché parce que
vous avez perdu, hein ?
    Elle se mit à dévaler le flanc de
montagne à la façon d’une faisane, mais soudain s’arrêta net ; une
expression alarmée lui assombrissait le visage. A mi-pente, un homme grand comme
une montagne s’approchait en diagonale à travers bois ; il marchait à
longues enjambées traînantes, et ses yeux étincelants fixaient la frêle jeune
fille qui se tenait devant lui. Il effrayait par son aspect primitif. Tout en
lui exprimait la lutte pour la vie, et il avait un air nettement belliqueux :
féroces sourcils en broussaille,
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