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La mort du Roi Arthur

La mort du Roi Arthur

Titel: La mort du Roi Arthur
Autoren: Jean Markale
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dormir et se reposer. Alors, Lancelot leur répondit qu’il ne se souciait nullement de manger, car il avait été saisi de l’ardent désir de veiller dans la chapelle devant la statue de Notre-Dame : il ne désirait donc pas la quitter avant le lever du jour, et il eût aimé que la nuit pût s’éterniser. Eux n’insistèrent pas et se retirèrent, tout émus de son intense piété. Et c’est ainsi qu’il demeura seul, la nuit entière, embrassant le tombeau de Guenièvre, jusqu’au lendemain matin {89} .
    La fuite ou la mort des partisans des fils de Mordret avait cependant mis fin à la bataille de Caerwynt. Et le roi Bohort fit, à la tête de ses troupes, son entrée dans la cité dont la plus belle église accueillit, comme il se devait, la dépouille de Lionel. Tout endeuillé qu’il était, il n’eut garde d’oublier Lancelot, le fit rechercher par tout le pays et, faute d’en pouvoir obtenir des nouvelles, dit à Hector : « Beau cousin, nous avons vengé le roi Arthur et, maintenant que les barons de ce royaume ont choisi de remettre la couronne à Kystennin, fils du brave Cador de Cornouailles, nous n’avons plus rien à faire ici. Puisque j’ai perdu mon seigneur Lancelot sans pouvoir le retrouver, je veux retourner en notre pays. Viens avec moi, Hector, et tu prendras possession de celui des deux royaumes qui te conviendra le mieux. Je t’en laisse le choix. » Hector le remercia de sa confiance mais ajouta qu’il ne voulait pas quitter l’île de Bretagne, du moins pour l’instant. « Lorsque je partirai, dit-il encore, j’irai te rejoindre, Bohort, car tu es l’homme pour qui j’ai le plus d’affection. Et tu le mérites bien. »
    Ainsi Bohort quitta-t-il le royaume de Bretagne pour retourner dans son pays avec ses gens, de l’autre côté de la mer. Hector, quant à lui, s’en alla à l’aventure, tantôt dans une direction, tantôt dans une autre, jusqu’au jour où le hasard l’amena à l’ermitage où demeurait toujours Lancelot, menant parmi les ermites une vie austère, participant de tout son cœur au service divin, pratiquant une sévère abstinence et ne se nourrissant que de pain et de racines qu’il arrachait dans les bois.
    Lorsque les deux frères se furent reconnus, ils s’embrassèrent tendrement et versèrent d’abondantes larmes. Hector dit à Lancelot « Mon frère, puisque je t’ai retrouvé menant une existence entièrement vouée au service de Dieu et qui, manifestement, t’a procuré la paix après tant de vicissitudes, je ne quitterai pas non plus ce lieu et t’y tiendrai compagnie tant que je vivrai. » Quand les ermites entendirent ce que disait Hector, ils en furent très heureux et l’acceptèrent avec joie parmi eux. Ainsi les deux frères demeurèrent-ils ensemble à l’ermitage où était enterrée la reine Guenièvre, et ils s’y appliquèrent au service de Dieu. Lancelot y vécut quatre ans dans le jeûne et la prière {90} .
    Au terme de la quatrième année, quinze jours avant mai, il tomba malade et, se sentant proche de sa fin, pria Hector et l’ermite Bliobéris de porter sa dépouille au château de la Joyeuse Garde et de l’ensevelir dans la tombe même où l’on avait déposé Galehot, seigneur des Îles Lointaines. Ils lui promirent d’exécuter fidèlement sa volonté. Quatre jours plus tard, il était mort. Surmontant leur chagrin, Hector et Bliobéris le mirent en bière et le transportèrent jusqu’à la Joyeuse Garde. Quand les habitants de la forteresse apprirent de quoi il retournait, ils vinrent éplorés en grand nombre se recueillir auprès du corps, car ils aimaient tendrement celui qui avait été si longtemps leur seigneur.
    Or, au moment même où le cortège franchissait les portes de la cité et se dirigeait vers l’église, le roi Bohort fit son entrée dans la Joyeuse Garde, avec un chevalier et un écuyer pour seuls compagnons. Il s’étonna des lamentations qu’il entendait et du spectacle qu’il voyait. Lorsqu’il apprit que c’était son cousin Lancelot que l’on pleurait ainsi, il se précipita vers le cercueil et le fit ouvrir. À la vue du corps de Lancelot, il se pâma, saisi d’une atroce douleur puis, sitôt revenu à lui, manifesta le plus vif désespoir, avec des gémissements qui paraissaient inextinguibles. Au terme d’une longue période d’abattement, il se redressa néanmoins et prononça cette lamentation funèbre : « Lancelot, fils du roi Ban, tu étais le
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