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La momie de la Butte-aux-cailles

La momie de la Butte-aux-cailles

Titel: La momie de la Butte-aux-cailles
Autoren: Claude Izner
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de la librairie et se plongea dans sa lecture :
    « Hier se sont ouverts devant la cour d’assises de la Seine les débats d’une affaire qui a remué l’opinion. Nous avons jugé intéressant de reproduire les déclarations d’une des deux accusés, Mme Félicité Ducrest, interrogée par M. le président Lamastre.
    — Comment avez-vous procédé pour circonvenir Mme Piote ?
    — Je me suis présentée chez elle sous le nom de Mme Lacour. Je lui ai dit que j’étais au courant de la découverte d’un carnet dans l’estomac d’une carpe et que, collectionnant ce genre de rareté, je désirais l’acquérir. Son prix serait le mien. Vous comprenez, monsieur le président, pour Michel et moi, perdre ce carnet eût été une catastrophe, tous nos efforts tombaient à l’eau à cause de cette canaille de Benoît Magnus qui avait recopié les formules en douce.
    — Ne vous écartez pas du sujet.
    — Alexandrine Piote m’a crue et nous sommes montées chez elle où l’attendait un militaire amateur de médailles. Elle a sorti une boîte d’un placard. Le carnet se trouvait dans la boîte et nous avons pu l’examiner tout à loisir. J’ai fait une proposition d’achat à Mme Piote, elle a refusé sous prétexte qu’elle attendait l’expertise d’un de ses amis, un libraire de la rue des Saints-Pères, un certain Victor Legris, très au fait des manuscrits anciens. Il devait lui donner sous peu une réponse. J’ai noté ce nom et cette adresse dans un coin de ma tête. Mme Piote désirait également l’avis du militaire présent, le capitaine Alphonse Ballu, du ministère de la Guerre. Celui-ci a promis de se renseigner auprès d’un membre de son cercle employé au bureau des brevets. Il fallait neutraliser ce témoin. Lorsqu’il a pris congé, je l’ai abordé et lui ai proposé de lui vendre à bas prix des médailles léguées par un mari défunt. Il est tombé dans le panneau et m’a suivie sans rechigner, c’en était comique, il trépignait d’impatience. Nous avons hélé un fiacre. Je lui ai raconté que je déménageais d’une propriété en banlieue, que je n’avais pas la clé et que je devais téléphoner au gardien afin qu’il nous ouvre. En fait, j’ai prévenu Michel Forestier, mon neveu, je lui ai expliqué la situation et l’ai prié de m’attendre rue Corvisart. Nous avons bouclé le militaire au sous-sol. Il s’agissait à présent de récupérer le carnet. Nous sommes retournés cour de Rohan, chez Mme Piote, munis de babioles et d’une corde.
    — Vous n’avez pas hésité à aller jusqu’au meurtre !
    — Mme Piote était chez elle. Je lui ai présenté Michel sous le nom de M. Juillet, un vieil ami. Elle a renâclé à nous recevoir, mais quand Michel lui a fait miroiter des cuillers en argent et des bijoux, elle a changé d’attitude. Nous nous sommes mis d’accord pour les lui laisser en dépôt. J’avais besoin d’un échantillon de son écriture.
    — Vous lui avez donc demandé un reçu.
    — Oui, monsieur le président.
    — Lui avez-vous dicté ce que vous avez déclaré au cours de l’instruction :
    Je, soussignée, Alexandrine Piote, brocanteuse, domiciliée à Paris, 12, cour de Rohan, reconnais par la présente que M. Juillet, 1, rue Ampère, a déposé quelques biens à mon logement, soit 18 (dix-huit) cuillers en argent et 2 (deux) bagues en or.
    Fait et écrit entièrement de ma main, à Paris…
    — Oui, monsieur le président.
    — Votre manœuvre était donc préméditée ?
    — Oh, non ! Tout s’est fait au pied levé.
    — Voilà une jolie formule. Ensuite…
    — Lorsqu’elle a eu paraphé, Michel, qui était allé farfouiller à la cuisine, lui a vivement passé une serviette torsadée autour du cou et il a tiré vers le haut. Les vertèbres ont craqué. Nous nous sommes assurés qu’elle était morte et nous l’avons pendue à la poutre en plaçant un repose-pied à environ un mètre de l’entrée afin de semer la confusion chez les enquêteurs. Ensuite nous avons récupéré la boîte contenant le carnet et, en me fondant sur le texte dicté à Mme Piote, j’ai rédigé un testament digne des plus grands faussaires afin de compromettre M. Legris.
    — Pendant l’instruction, vous avez répondu que vous n’aviez pas participé au meurtre.
    — C’est la vérité, monsieur le président. Michel a agi seul. Après… nous avons remis la serviette à sa place et tout nettoyé. J’ai glissé le testament
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