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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan
Autoren: Ernest Capendu
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reprit :
    – Il y avait douze années que j’avais quitté la France. Notre nom n’était pas oublié ; mais il n’en devait pas être de même de nos personnes. Nous étions enfants lors du départ de notre père, et nous allions revenir personnages d’importance. Qui nous reconnaîtrait ? Nous n’avions plus de proches parents. Qui nous attendrait, qui nous recevrait avec joie ? Nous n’avions pas d’amis, nous étions bien seuls tous trois. Aussi n’étions-nous pas pressés de revoir la patrie. Mon frère aîné, le comte de Fougueray, nous proposa de visiter la partie de l’Italie que nous ne connaissions pas encore. J’avais un vif désir de parcourir les Calabres. Nous partîmes. Hélas ! qui nous ayant vus joyeux au départ aurait pu supposer les malheurs sans nombre qui furent les suites de ce voyage ? Mes deux frères tués sous mes yeux ! Et moi !… moi !… Oh ! que serais-je devenue sans la miséricordieuse intervention de celui qui m’a défendue au péril de ses jours ! Marcof ! comment vous exprimer jamais ce que je vous dois de reconnaissance ?
    – En aimant ceux près desquels je vous conduis, répondit le marin, qui d’un geste désignait la terre.
    – Sommes-nous donc si près du port ?
    – Voici Algésiras, et bientôt des mains amies vont serrer les vôtres. Il y a entre vous et eux la fraternité du malheur, car vous avez tous souffert les tortures imposées par les mêmes bourreaux.
    – Mais comment se fait-il que ces hommes aient eu l’audace de commettre une telle infamie ?
    – Vous allez le savoir en écoutant Piétro. Continue, mon ami.
    Piétro reprit :
    – La cassette que Diégo et Raphaël avaient emportée contenait probablement la relation exacte de tout ce que vous venez de dire, mademoiselle.
    – Sans doute. Le chevalier avait l’habitude de tenir par écrit un compte régulier des moindres actions de sa vie. Il nommait cela son journal. Hélas ! je prévois que ce soin puéril est devenu la source d’une partie des malheurs qui sont arrivés.
    – Vous ne vous trompez pas. Ces deux hommes, sachant bien que personne en France ne vous connaissait, et croyant sans doute trouver dans le nom de Fougueray une source intarissable de fortune, prirent la résolution de remplacer vos deux frères. Ils avaient en leur puissance tous vos papiers de famille. Ils étaient à peu près du même âge que les deux gentilshommes assassinés. Ils ne manquaient ni d’esprit ni d’intelligence ; lors même qu’ils vous eussent rencontrée, ils vous eussent accusée d’imposture. Je dois vous dire maintenant que Diégo avait ramassé dans les boues de Naples une femme dont il avait fait sa maîtresse. Cette créature, belle comme une madone du Titien, avait seize ans à peine à l’époque dont vous parlez. Mais son artifice et sa perfidie avaient devancé l’âge pour en faire une courtisane éhontée et dangereuse. À elle revint le rôle de la jeune fille. Hermosa se fit appeler Marie-Augustine de Fougueray. Ce fut sous ces noms volés qu’ils s’embarquèrent à Messine. C’est là tout ce que Cavaccioli en avait su.
    – Le reste est facile à comprendre, reprit Marcof. Une fois à Paris, les bandits dissipèrent promptement leur fortune. Ils se souvinrent alors de la beauté d’Hermosa. Le marquis de Loc-Ronan fut la première proie qui tomba dans leurs filets.
    – Et ces monstres sont morts ? demanda Marie-Augustine.
    – Oui, mademoiselle. Le premier, Raphaël, fut empoisonné par ses deux complices. Hermosa, elle, tomba frappée par une balle qui m’était destinée, et Diégo fut tué par M. de Boishardy, dont je vous ai souvent parlé.
    – Justice du ciel ! murmura mademoiselle de Fougueray, tes décrets sont inévitables.
    Il y eut un moment de silence. Marie-Augustine semblait absorbée dans de sombres réflexions. Enfin, elle fit un effort pour s’arracher aux pensées qui assombrissaient son doux visage, et s’adressant à Marcof :
    – Ainsi, dans quelques heures, je vais connaître le marquis de Loc-Ronan ? demanda-t-elle, tandis que son regard errait sur la côte voisine.
    Le lougre doublait en ce moment le port militaire, et mettait le cap sur Algésiras. Les maisons de Gibraltar apparaissaient sur la droite, accrochées à la base du rocher dénudé.
    – Dans moins d’une heure, mademoiselle, répondit le marin, vous serez près du marquis et de sa digne femme.
    – Elle a quitté le voile ?
    – Pas
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