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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan
Autoren: Ernest Capendu
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momentanément l’explosion du vaste complot mûri dans l’ombre. Mais si les bras manquaient encore, les têtes étaient prêtes, et attendaient avec impatience un acte du gouvernement qui excitât les esprits à la révolte. Le décret relatif à la levée des trois cent mille hommes fut l’étincelle qui mit le feu aux poudres.
    Le 10 mars 1793, jour fixé pour le tirage, la guerre commença sur tous les points. Un coup de canon, tiré imprudemment dans la ville de Saint-Florent-le-Vieux sur des conscrits réfractaires, porta la rage dans tous les cœurs. Le soir même, six jeunes gens qui rentraient dans leur famille, traversant le bourg de Pin-en-Mauge, furent accostés par un homme qui leur demanda des nouvelles. Cet homme qui, les bras nus, les manches retroussées, pétrissait le pain de son ménage, était un colporteur marchand de laine, père de cinq enfants, et qui se nommait Cathelineau. Faisant passer son indignation dans l’esprit de ses auditeurs, il se met à leur tête, fait un appel aux gars du pays, recrute des forces de métairie en métairie, et arrive le 14 à la Poitevinière. Bientôt le tocsin sonne de clocher en clocher. À ce signal, tout paysan valide fait sa prière, prend son chapelet et son fusil, ou, s’il n’a pas de fusil, sa faux retournée, embrasse sa mère ou sa femme, et court rejoindre ses frères à travers les haies.
    Le château de Jallais, défendu par un détachement du 84 e de ligne et par la garde nationale de Chalonnes, est attaqué. Le médecin Rousseau, qui commande, fait braquer sur les assiégeants une pièce de six ; mais les jeunes gens, improvisant la tactique qui leur vaudra tant de victoires, se jettent tous à la fois ventre à terre, laissent passer la mitraille sur leurs têtes, se relèvent, s’élancent, et enlèvent la pièce avec ses artilleurs.
    Ces premiers progrès donnent à la révolte d’énormes et rapides développements qui viennent porter l’inquiétude jusqu’au sein de la capitale. Le 19 mars, la Convention rend un décret dont l’article 6 condamne à mort les prêtres, les ci-devant nobles, les ci-devant seigneurs, leurs agents ou domestiques, ceux qui ont eu des emplois ou qui ont exercé des fonctions publiques sous l’ancien gouvernement ou depuis la Révolution, pour le fait seul de leur présence en pays insurgé. Cette sommation, si elle ne parvenait pas à étouffer la guerre, devait lui donner un caractère ouvertement politique. C’est ce qui arriva.
    Charette, La Rochejacquelein, La Bourdonnaie, de Lescure, d’Elbée, Bonchamp, Dommaigné, Boishardy, Cormatin, Chantereau, se mirent rapidement à la tête des révoltés, les uns habitant la Vendée, les autres arrivant à la hâte de Bretagne. Les ordres de rassemblement, distribués de tous côtés, portaient :
    « Au saint nom de Dieu, de par le roi, la paroisse de *** se rendra tel jour, à tel endroit, avec ses armes et du pain. »
    Là, on s’organisait par compagnie et par clocher. Chaque compagnie choisissait son capitaine par acclamation : c’était d’ordinaire le paysan connu pour être le plus fort et le plus brave. Tous lui juraient l’obéissance jusqu’à la mort. Ceux qui avaient des chevaux formaient la cavalerie. L’aspect de ces troupes était des plus étranges : c’étaient des hommes et des chevaux de toutes tailles et de toutes couleurs ; des selles entremêlées de bâts ; des chapeaux, des bonnets et des mouchoirs de tête ; des reliques attachées à des cocardes blanches, des cordes et des ficelles pour baudriers et pour étriers. Une précaution qu’aucun n’oubliait, c’était d’attacher à sa boutonnière, à côté du chapelet et du sacré cœur, sa cuiller de bois ou d’étain. Les chefs n’avaient guère plus de coquetterie : les capitaines de paroisse n’ajoutaient à leur costume villageois qu’une longue plume blanche fixée à la Henri IV sur le bord relevé de leur chapeau.
    La masse des combattants vendéens se divisait en trois classes. La première se composait de gardes-chasse, de braconniers, de contrebandiers, tous ayant une grande habitude des armes, pour la plupart tireurs excellents, et en grande partie armés de fusils à deux coups et de pistolets. C’était là le corps des éclaireurs, l’infanterie légère, les tirailleurs. Sans officiers pour les commander, ils faisaient la guerre comme ils avaient fait la chasse au gibier ou aux douaniers. Leur tactique était simple : se porter
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