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La Marquis de Loc-Ronan

La Marquis de Loc-Ronan

Titel: La Marquis de Loc-Ronan
Autoren: Ernest Capendu
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pleine poitrine. Le commandement des « bleus » fut donné à Chalbos, et les royalistes, prenant pour chef suprême La Rochejacquelein, avec Stofflet sous ses ordres, attaquèrent Granville le 14 novembre. Ne réussissant pas à prendre la place, ils furent vengés par leurs succès à Pontorson, à Dol et à Anhain, qui rallumèrent leur ardeur prête à s’éteindre. Les armées républicaines perdaient chaque jour du terrain sous les ordres d’Antoine Rossignol, célèbre par ses continuels revers, bien que le comité de Salut public l’appelât son « fils aîné ». Ce fut alors que, sur la proposition de Kléber, Marceau, à vingt-deux ans, devint général en chef de l’armée républicaine.
    Les luttes opiniâtres allaient recommencer plus terribles que jamais, car la Bretagne vint à ce moment au secours de sa sœur la Vendée. Jean Chouan, ou plutôt Jean Cottereau, puisqu’il est plus connu sous ce nom, avait rejoint, avec ses bandes, l’armée de La Rochejacquelein à Laval, et le prince de Talmont était arrivé avec un renfort de cinq mille Manceaux. Cette fois, la guerre allait changer de nom, et se nommer définitivement la « chouannerie ».

II – LE PLACIS DE SAINT-GILDAS
    Nous sommes en 1793, au mois de décembre, dans l’antique forêt de Saint-Gildas. Les arbres, dénués de feuilles, révèlent la rigueur de l’hiver ; le ciel gris menace de laisser tomber sur la terre ce manteau blanc que l’on nomme la neige, et que les savants nous ont appris être les vapeurs d’un nuage qui, se réunissant en gouttelettes, passent par des régions plus froides, se congèlent en petites aiguilles, et, continuant de descendre, se rencontrent, s’émoussent, se pressent et s’entrelacent pour former des flocons. Un vent du nord-ouest, froid et soufflant par rafales, s’engouffre dans la forêt et la fait trembler jusque dans ses profondeurs. Il est quatre heures du soir, et à cette époque de la saison, le crépuscule du soir commence à assombrir cette partie de l’hémisphère boréal où se trouve le vieux monde. La nuit va descendre rapidement.
    Longeant la rive gauche de la Vilaine, un homme vêtu du costume breton, portant au chapeau la cocarde noire et sur la poitrine l’image du sacré cœur, qui indique le chouan, se dirige vers la lisière de la forêt. Une paire de pistolets est passée à sa ceinture de cuir qui supporte déjà un sabre sans fourreau ; une carabine est appuyée sur son épaule ; il porte en sautoir une poire à poudre, et dans un mouchoir noué devant lui quelques douzaines de balles de calibre.
    Une large cicatrice, rose encore, sillonne sa joue droite et indique que cet homme n’est pas resté étranger à la guerre épouvantable qui déchire la province.
    Au moment où nous le rencontrons, il se dirige vers la forêt de Saint-Gildas. Cette forêt était alors au pouvoir des royalistes, comme tout le pays environnant jusqu’à Nantes, et les chouans y avaient établi un « placis ».
    On désignait par ce nom de placis un campement de chouans dans une forêt. Les royalistes choisissaient pour cela une clairière de plusieurs arpents entourée d’abatis. Des cabanes de gazon, de feuillage, de bois mort, étaient bâties rapidement au milieu de l’enceinte. Au centre on réservait un arbre, ou, à son défaut, on élevait un poteau sur lequel on plaçait une croix d’argent. Un autel de terre et de mousse était dressé au pied.
    C’était dans le placis que se réfugiaient les femmes et les enfants qui avaient déserté leurs fermes et leurs granges pillées ou brûlées par les bleus. Les uns s’occupaient à moudre du grain, les autres fondaient des balles. Les enfants tressaient des chapeaux ou fabriquaient des cocardes. Les placis servaient aussi d’ambulance pour les blessés et de quartier général pour les chefs. Des sentinelles, dispersées dans les environs, qui dans les genêts, qui sur les arbres, étaient toujours prêtes à donner le signal d’alarme. Le placis de Saint-Gildas était commandé par M. de Boishardy.
    Avant de s’engager dans la forêt, l’homme fit entendre le cri de la chouette. Un cri pareil lui répondit ; puis le son d’une corne, répété successivement, annonça au placis l’arrivée d’un paysan.
    En pénétrant dans la clairière, le chouan s’arrêta :
    – Te voilà, mon gars ? dit un homme en lui tendant la main. Tu as donc échappé aux balles des bleus ?
    – Oui, mais il y en a deux
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