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La Légion Des Damnés

La Légion Des Damnés

Titel: La Légion Des Damnés
Autoren: Sven Hassel
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Mais si nous ne passions point chaque minute de cette heure et demie à nettoyer nos uniformes boueux, à briquer nos bottes et le reste de notre équipement, on nous apprenait à le faire au moyen des plus implacables représailles.
    A neuf heures, tout le monde devait être couché. Ce qui n'impliquait nullement, bien entendu, un sommeil réparateur. Chaque nuit avaient lieu des exercices d'alerte et de changement rapide d'uniforme.
    Quand sonnait l'alerte, nous dégringolions de nos couchettes, enfilions nos tenues de campagne et nous présentions au rassemblement. On nous renvoyait alors revêtir nos tenues de parade. Puis nos tenues d'exercice. Puis, de nouveau, nos tenues de campagne. Ce n'était jamais totalement au point. Nuit après nuit, les sous-offs nous traquaient et nous pourchassaient dans les escaliers de la caserne comme un troupeau de bêtes effrayées, jusqu'à ce que l'ombre d'un seul d'entre eux fût suffisante ou presque pour nous faire tourner de l'œil d'épouvante.
    Au bout des six premières semaines, commença la seconde phase de notre formation pratique, et si nous n'avions pas su, jusque-là, ce que c'était que la fatigue, les manœuvres de campagne ne tardèrent pas à nous l'apprendre.
    Traverser à plat ventre des kilomètres de terrain spécial d'entraînement, tapissé de mâchefer ou de silex tranchants qui nous réduisaient les paumes à l'état de pulpe sanguinolente, ou bien encore d'une épaisse boue putride qui menaçait de nous suffoquer... Mais ce que nous craignions par-dessus tout, c'était encore les marches forcées.
    Une nuit, nos sous-offs firent irruption dans les chambrées où nous dormions du sommeil des morts, gueulant avec plus d'énergie, si possible que d'habitude :
    — Alerte ! Alerte !
    Dégringolade générale hors des couchettes, bagarres fiévreuses avec les différentes pièces d'équipement. Une courroie bloquée, un mousqueton obstiné, une demi-seconde perdue, catastrophes ! Moins de deux minutes plus tard les sifflets retentissaient dans les corridors, les pieds des sous-offs faisaient claquer les portes...
    — Compagnie 3, raaassembleMENT ! Qu'est-ce que vous foutez, là-dedans ? Pas encore en bas, sacré nom de Dieu ! Et les plumards pas faits ! Où est-ce que vous vous croyez, bandes de tire-au-cul ? Dans un hospice pour vieillards ?
    Avalanches, dans les escaliers blafards, d'hommes abrutis resserrant en route une dernière courroie. Alignement incertain dans la cour de la caserne. Puis :
    — Compagnie 3... Retour dans vos quartiers... TENUE D'EXERCICE !
    Que des hommes puissent gueuler comme ça sans se faire péter un vaisseau dans le crâne m'a toujours paru un défi au bon sens. Mais peut-être est-ce précisément leur bon sens, à eux, qui est en cause ? Avez-vous remarqué leur façon de s'exprimer ? Ils sont incapables de parler comme tout le monde. Leurs mots sont soudés entre eux jusqu'à donner une sorte de bêlement, à l'exception du dernier qui cherche à claquer comme la mèche d'un fouet. Jamais vous ne les entendrez terminer une phrase sur une syllabe non accentuée. Ils hachent tout ce qu'ils disent en salves d'interjections militaires, incompréhensibles. Ces beuglements, ces éternels beuglements ! Il faut bien admettre que ces gens-là doivent avoir une case vide...
    Comme un raz de marée qui balaie tout sur son passage, les cent trente-cinq recrues que nous étions se ruaient dans l'escalier pour regagner la chambrée et passer la tenue d'exercice avant que ne retentît un nouveau « RaaassembleMENT »...
    Ayant accompli ce manège une douzaine de fois, cette nuit-là, au sein de l'habituel concert de malédictions et d'injures, la compagnie se retrouva finalement au milieu de la cour, hagarde et suante, mais en bon ordre de marche, prête à partir pour l'exercice nocturne prévu au programme.
    Notre commandant de compagnie, un capitaine manchot du nom de Lopei, nous observait avec un léger sourire aux lèvres. Il exigeait de ses hommes une discipline de fer, une discipline inhumaine ; et cependant, seul parmi tous nos tortionnaires, il avait, à nos yeux, quelque chose d'humain. Tout ce qu'il nous faisait faire, il avait au moins la décence de le faire lui-même et ne nous demandait jamais ce qui était au-dessus de ses propres forces. Quand nous rentrions d'exercice, il était aussi dégueulasse que nous pouvions l'être. 
    C'était sa façon, à lui, d être loyal, et la loyauté était une chose que nous avions
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