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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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de Mahé, «Diego» Quetzalcóatl lança son couteau de pierre vers Blacfort et sans doute l’aurait-il atteint en pleine gorge si un homme, sacrifiant sa vie, n’avait interposé sa poitrine.
    Le tirant de son cheval, la foule précipita Quetzalcóatl à terre et le garda ainsi sous la menace des piques mais sans lui faire subir la moindre violence tandis qu’au sol, on ranimait Mahé.
    Blacfort reculait toujours vers le four à chaux. Il incarnait la terreur faite homme:
    – Joachim, je t’en supplie, ne les laisse pas faire, ils me veulent tant de mal et j’ai si peur!
    Valencey d’Adana, une main brisée et l’autre sanglante du coup de pique, dit d’une voix lasse au forgeron:
    – Citoyen, livre-moi cet homme. Il appartient au Comité de salut public dont les représailles sont toujours terribles.
    – Nous subirons sans révolte le châtiment que nous infligera la République.
    Valencey d’Adana dit alors d’une voix qui se brisait:
    – C'est bien, je l’achète. J’achète cet homme. Je donne tout: mon château, mes terres, le trésor des croisades, ma corvette, prenez tout mais donnez-moi cet homme. Il est fou, on ne le peut tuer ainsi.
    – Nous l’avons déjà jugé.
    Se ressaisissant, Valencey d’Adana lança d’une voix glacée:
    – Ah ça, forgeron, qui es-tu, toi, pour juger ainsi?… Qu’as-tu donc compris à la République?… Chaque homme est égal devant la loi, même lui qui a droit à un véritable procès.
    – Non, pas lui.
    – Écoute, j’userai de tout mon crédit qui est grand et te donne la parole des princes d’Adana qui en sept siècles ne furent jamais parjures: il sera jugé ici même!… Je ferai déplacer le Tribunal révolutionnaire de Paris en utilisant toutes mes relations, tout ce prestige dont tu me créditais. S'il est condamné, il sera exécuté ici, à La Lanterne des Morts. Tu as ma parole.
    Le forgeron hésita longuement puis:
    – Il est déjà jugé!
    Blacfort, terrorisé, grimpait sous la poussée de la foule un petit escalier menant à une étroite ouverture dans le four à chaux.
    – Joachim, nous fûmes amis. Je t’en supplie, Joachim!
    Valencey d’Adana était épuisé, souffrait horriblement de ses blessures aux deux mains mais son obstination ne fléchit pas:
    – Citoyen forgeron, une dernière fois, obéis, ne te comporte pas hors les lois et selon ton bon vouloir comme le firent jadis les ci-devant rois et tous les despotes de la terre.
    Le forgeron parut ému:
    – Général, je suis tellement désolé que nous t’ayons blessé, car cela gâche à jamais ma vie, mais tu aurais connu cette fillette qu’il viola et tua, tu ne pardonnerais pas toi non plus.
    – Qui parle de pardon quand il n’est question dans ma bouche que de justice?
    – La chose t’est facile, citoyen général, tu ne connaissais pas la petite.
    – Cet homme a tué mon père, je suis bien plus concerné que toi mais j’exige un jugement, pas une exécution.
    – Il a tué ton père?
    – Oui!… hurla Blacfort. Et sa fiancée aussi!…
    Le forgeron observa attentivement Valencey d’Adana:
    – Alors je t’admire et te respecte plus encore pour la force de tes principes que pour tes victoires mais c’est la fin, regarde, il entre dans le four à chaux…
    Des piques poussaient Blacfort vers le fond et, malgré ses bottes, il sautilla sur le sol brûlant. Valencey d’Adana imagina son ami d’enfance dans le noir du four, blessé par cette vingtaine de piques qui le poussaient par autant de piqûres. Puis on referma la porte d’acier. Le noir absolu, les piques… tout ce qui terrorisait Nicolas. Valencey d’Adana ne pouvait s’empêcher d’imaginer Blacfort tel l’enfant qu’il fut. C'est l’enfant que la peur restituait qu’on jetait vivant dans un four, ce garçon pour lequel vivre était déjà une douloureuse agonie, un calvaire jour après jour…
    Le général Valencey d’Adana, hors de lui, hurla:
    – Vous êtes des barbares sanguinaires!… Vous nous volez notre Révolution, vous la prostituez dans l’arbitraire!… Laissez-moi mourir avec lui plutôt que vivre avec vous!
    Il sauta de cheval pour entrer dans le four et l’aurait fait si dix mains ne l’avaient retenu.
    Le Maya, jusqu’ici silencieux, sauta au secours de son général qu’on ceinturait. Le temps d’un soupir, il avait égorgé trois hommes avec son couteau de pierre lorsqu’un coup de hache lui coupa net le bras tenant l’arme.
    Le feu allumé sous le four, et
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