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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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la capture de la marquise Victoire de La Chesnaie de Flers, ils étaient partis à vingt et un, tous du même pas, en direction de la Charente, région de Ruffec.
    Quittant leur village proche d’Ancenis, entre Nantes et Angers, ils avaient traversé le bocage vendéen pour gagner l’Aunis et le Poitou.
    Les routes leur furent incertaines et parfois fatales, les «Bleus», de plus en plus rompus à ce genre de guerre, déjouant souventes fois leurs ruses. Onze de leurs camarades avaient été tués lors d’accrochages, un avait disparu tout de bon dans une région de marais, deux avaient été abattus au pistolet par la marquise au moment de sa capture très mouvementée et deux autres, faits prisonniers à proximité de Jarnac, furent menés à Cognac, jugés, condamnés et décapités.
    Plus grave, celui qui lisait si bien la route d’après les étoiles et savait si bien s’orienter était au nombre des morts, un dragon lui ayant passé son sabre à travers le ventre.
    Depuis, de jour comme de nuit, les cinq hommes et leur captive tournaient en rond entre Surgères et Saint-Jean d’Angely: la ville de Niort, farouchement républicaine, leur fermant le passage tel un verrou.
    Peu causants, les Vendéens n’en observaient pas moins la jolie marquise et les sentiments qu’ils lui portaient évoluaient. Certes, elle avait dès le premier instant rallié les Bleus mais demeurait une aristocrate, ce qui les impressionnait. En outre, à leur grande surprise, la frêle Victoire – qui avait tout de même abattu deux des leurs – faisait montre d’une résistance physique qu’on ne pouvait comparer qu’à celle d’un homme. Jamais ils n’entendirent une plainte, pas même un soupir, malgré le trajet harassant, souvent à travers les forêts et dans un froid intense.
    Autre preuve de son courage, qui plongeait les cinq hommes dans la plus grande perplexité: il n’était de jour où la marquise ne se lavait des pieds à la tête, parfois dans l’eau gelée des lavoirs dont il fallait rompre la glace pour elle. Pudiques, les hommes regardaient ailleurs et c’est justice à leur rendre que d’affirmer qu’ils n’eurent jamais un geste, et pas même une parole, qui insultât la vertu.
    La marquise lavait son linge et, les voyant maladroits, fit bientôt pareillement avec les chemises de ses geôliers confus. Elle préparait avec beaucoup d’imagination, et peu de moyens, des repas plus succulents que tout ce qu’ils avaient mangé jusqu’ici. Un jour, elle soigna un blessé, et le guérit.
    Il n’est qu’un point sur lequel elle refusait d’apporter son aide: la route à suivre. Pourtant, aucun ne doutait que pareille femme, très instruite, les aurait pu guider mais elle s’en était expliquée une fois pour toutes:
    – Ce n’est pas à moi de vous indiquer le chemin qui mène à mon supplice.
    Et tous d’admettre le bien-fondé de cette affirmation.
    On lui avait délié les mains dans la journée mais pas la nuit car elle avait prévenu:
    – À la première occasion, je m’échappe. J’espère que vous feriez pareille chose à ma place.
    Et là encore, on n’y pouvait rien redire.
    Le chef du petit groupe, appelé Bienvenu, ne savait trop s’il désirait encore livrer cette jeune femme qu’il admirait au très cruel et redouté général de Blacfort. Aristocrate, authentique marquise, elle possédait les qualités de son milieu mais aussi, chose rarissime, celles des femmes de la terre.
    Ayant préparé à part une sauce délicieuse qui devait accompagner le lièvre capturé par Jean-Baptiste, le benjamin de la bande, Victoire s’assit près du feu, dans le cercle des hommes qui se poussèrent avec respect.
    Ils commencèrent à manger en silence puis, à la surprise générale, la jeune femme regarda le chef en demandant:
    – Aimez-vous l’or à ce point, Bienvenu?… Cela vous ressemble si peu!
    – Madame la marquise…
    – Et vous autres?… insista-t-elle.
    Les quatre compagnons de Bienvenu baissèrent la tête.
    Elle sourit.
    – Ce silence ne vous honore pas. Vous êtes beaucoup plus courageux face aux soldats de la République.
    Bienvenu posa sa gamelle.
    – C'est que justement, madame la marquise, il n’y a pas que l’or. Vous avez gravement offensé Dieu!…
    – En quoi l’ai-je offensé?
    – C'est que… ces idées des philosophes qui sont vôtres sont de grandes sataneries inspirées par le diable.
    – Quelles idées, Bienvenu?
    – Toutes. Il n’est aucune
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