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La lanterne des morts

La lanterne des morts

Titel: La lanterne des morts
Autoren: Frédéric H. Fajardie
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fleuri d’un limonadier lorsque, séduite par un beau sergent-major, elle fut violée par celui-ci et neuf de ses camarades. Battue, humiliée, murée dans le silence, le militaire la vendit peu après à la bande à laquelle elle ne tenta plus d’échapper car ayant essayé, elle fut enfermée quinze jours dans une cave sans eau ni nourriture et manqua en mourir.
    À part cette dernière, aucun ne regrettait la période de leur vie, souvent fort courte, où ils furent honnêtes. Point de mélancolie du passé quand leurs cris se mêlaient à tant d’autres où se reconnaissaient toutes les provinces de France: «Poires cuites au four!»… «Au cureur de puits!»… «L'anguille qui frétille!»… «Groseilles à confire!»… «À la fraîche, qui veut boire?»…
    Certains, qui se tenaient toujours au même endroit, lançaient les noms de leurs pratiques: «Des bouquets pour Manon?»…
    Avant que le général-comte de Blacfort ne les rassemble en une seule et redoutable bande, ils avaient servi en ordre dispersé aussi bien la République que la monarchie, pourvu qu’il y eût de l’argent à la clé. Aujourd’hui défenseurs de l’ordre royal, l’un avait mis à sac des sénéchaussées aux premiers jours de la Révolution. Un autre, Chapeau-ciré, grand protecteur des prêtres réfractaires, avait pillé l’abbaye du Bec-Hellouin puis Fontfroide, de l’ordre des Cîteaux, n’hésitant pas à faire couler le sang. Serviteur zélé des aristocrates, Simon dit «la Douceur» avait dès avant la Révolution prostitué une comtesse à la singulière histoire. Vingt ans plus tôt, un voleur fut surpris au château par la mère de la jeune femme. L'homme, très beau, se déshabilla, gagna la couche de la châtelaine et passa la nuit avec elle. Au matin, il partit en ayant la rare élégance de ne rien emporter de ce qu’il avait volé. Neuf mois plus tard naissait la future victime de «la Douceur», cette comtesse dont le véritable père était mort aux galères.
    Bien des hommes eussent été émus, voire charmés, par si étonnante histoire. «La Douceur», lui, tira profit du désarroi de la comtesse, laquelle, anéantie par sa propre dégradation, surmonta sa coutumière faiblesse pour se donner la mort.
    Ainsi étaient ces gens, obséquieux et serviles avec les puissants, durs et sans pitié aux faibles.
    On murmurait sur leur compte dans l’armée royale, trouvant toujours davantage de dignité chez l’ennemi républicain pourtant haï qu’on collait au mur pour le fusiller que chez ces «Vendéens» de fraîche date. Beaucoup devinaient l’état de leur esprit, et leurs réelles croyances, les qualifiant ainsi: «sans foi ni loi, sans feu ni lieu, sans roi ni dieu».
    Mais nul n’osait dire leur fait à cette bande d’assassins, de scélérats, de gredins et de putains, tant on redoutait les colères de Blacfort.
    Phébus Monteroux, l’âme damnée du général-comte, appréciait leur commerce mais il est vrai que cet abbé aimait les femmes et que «sa soutane ne tenait qu’à un bouton» ainsi qu’on disait chez les officiers de Vendée.
    On amena enfin la baronne républicaine qui toisa Blacfort et sa bande.
    – Bien fière, baronne!… constata Blacfort.
    – Ne parle point de fierté, laquais des despotes, tu ignores le sens de ce mot.
    – J’en connais d’autres!… répondit le comte en la giflant sans parvenir à lui faire baisser les yeux.
    Puis, voyant sa bande piaffer d’impatience, il eut de la main un petit geste désinvolte qu’il fallait comprendre telle une invite.
    On commença à déshabiller la baronne qui se défendit un instant avant d’être frappée avec violence par Germain dit «Gros-blond», un homme aux mains énormes.
    Au bord de l’évanouissement, la malheureuse jeune femme comprit qu’elle ne pourrait rien contre cette meute d’hommes déchaînés aidés de «la Grêlée», demi-furie dans sa hâte à la dénuder pour lui voler aussitôt sa robe de soie, ses bas blancs et ses souliers à boucles d’argent.
    Lorsqu’elle fut nue, Blacfort s’approcha et, d’un geste rapide, défit le petit chignon porté sur l’arrière par sa victime.
    Il sourit, tenant son menton au creux de sa paume d’un air songeur:
    – Joli corps. Qu’allons-nous en faire?
    La baronne lui cracha au visage. Le général vendéen s’essuya lentement.
    – Ce dont je puis vous garantir, c’est que vous ne serez point insépulturée ici. Ni en aucun autre lieu. Votre
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