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La Guerre Du Feu

La Guerre Du Feu

Titel: La Guerre Du Feu
Autoren: J.H. Rosny aîné
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recherchait leur alliance ; ils se dérobaient, murés dans leur méfiance, incapables de croire ni à la parole ni aux actes des êtres, courroucés par la bienveillance et ne comprenant pas d’autre flatterie que la terreur. Faouhm, aussi défiant et aussi impitoyable, avait pourtant les qualités d’un chef : elles comportaient l’indulgence pour ses partisans, le besoin de la louange, quelque socialité étroite, rare, exclusive, tenace.
    Il répondit avec une déférence brutale :
    – Si le fils de l’Aurochs rend le Feu aux Oulhamr, il prendra Gammla sans rançon, il sera le second homme de la tribu, à qui tous les guerriers obéiront en l’absence du chef.
    Aghoo écoutait d’un air brutal : tournant sa face touffue vers Gammla, il la considérait avec convoitise ; ses yeux ronds se durcirent de menace.
    – La fille du Marécage appartiendra au fils de l’Aurochs ; tout autre homme qui mettra la main sur elle sera détruit.
    Ces paroles irritèrent Naoh. Acceptant violemment la guerre, il clama :
    – Elle appartiendra à celui qui ramènera le Feu !
    – Aghoo le ramènera !
    Ils se regardaient. Jusqu’à ce jour, il n’avait existé entre eux aucun sujet de lutte. Conscients de leur force mutuelle, sans goûts communs ni rivalité immédiate, ils ne se rencontraient point, ils ne chassaient pas ensemble. Le discours de Faouhm avait créé la haine.
    Aghoo, qui, la veille, ne regardait guère Gammla, lorsqu’elle passait, furtive, sur la savane, tressaillit dans sa chair, tandis que Faouhm vantait la fille. Construit pour les impulsions subites, il la voulut aussi âprement que s’il l’avait voulue depuis des saisons. Dès lors, il condamnait tout rival ; il n’eut pas même de résolution à prendre ; sa résolution était dans chacune de ses fibres.
    Naoh le savait. Il assura sa hache dans la main gauche et son épieu dans la droite. Au défi d’Aghoo, ses frères surgirent en silence, sournois et formidables. Ils lui ressemblaient étrangement, plus fauves encore, avec des îlots de poil rouge, des yeux moirés comme les élytres des carabes. Leur souplesse était aussi inquiétante que leur force.
    Tous trois, prêts au meurtre, guettaient Naoh. Mais une rumeur s’éleva parmi les guerriers. Même ceux qui blâmaient en Naoh la faiblesse de ses haines ne voulaient pas le voir périr après la destruction de tant d’Oulhamr et lorsqu’il promettait de ramener le Feu. On le savait riche en stratagèmes, infatigable, habile dans l’art d’entretenir la flamme la plus chétive et de la faire rejaillir des cendres : beaucoup croyaient à sa chance.
    À la vérité, Aghoo aussi avait la patience et la ruse qui font aboutir les entreprises, et les Oulhamr comprenaient l’utilité d’une double tentative. Ils se levèrent en tumulte ; les partisans de Naoh, s’encourageant aux clameurs, se rangèrent en bataille.
    Étranger à la crainte, le fils de l’Aurochs ne méprisait pas la prudence. Il remit à plus tard la querelle. Goûn-aux-os-secs rassembla les idées brumeuses de la foule :
    – Les Oulhamr veulent-ils disparaître du monde ? Oublient-ils que les ennemis et les eaux ont détruit tant de guerriers ? Sur quatre, il en demeure un seul. Tous ceux qui peuvent porter la hache, l’épieu et la massue doivent vivre. Naoh et Aghoo sont forts parmi les hommes qui chassent dans la forêt : si l’un d’eux meurt, les Oulhamr seront plus affaiblis que s’il en périssait quelques autres... La fille du Marécage servira celui qui nous rendra le Feu ; la horde veut qu’il en soit ainsi.
    – Qu’il en soit ainsi ! appuyèrent des voix rugueuses.
    Et les femmes, redoutables par leur nombre, par leur force presque intacte, par l’unanimité de leur sentiment, clamèrent :
    – Gammla appartiendra au ravisseur du Feu !
    Aghoo haussa ses épaules poilues. Il exécra la foule, mais ne jugea pas utile de la braver. Sûr de devancer Naoh, il se réserva, selon les rencontres, de combattre son rival et de le faire disparaître. Et sa poitrine s’enfla de confiance.

2

    Les mammouths et les aurochs

    C’était à l’aube suivante. Le vent du haut soufflait dans la nue, tandis que, au ras de la terre et du marécage, l’air pesait, torpide, odorant et chaud. Le ciel tout entier, vibrant comme un lac, agitait des algues, des nymphéas, des roseaux pâles. L’aurore y roula ses écumes. Elle s’élargit, elle déborda en lagunes de soufre, en golfes de
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