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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls
Autoren: Robert Merle
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tête tournée vers nous, et les hommes aussi
immobiles que leur permettaient les encensements et les piaffements de leurs
montures. Au moment où Hörner salua Madame de Brézolles de son épée, ses
hommes, dans un ensemble parfait, la saluèrent de leurs chapeaux, ceux-ci étant
remis sur leurs têtes dans le même temps où Hörner rengainait sa lame.
    Cette cérémonie était coutumière quand au matin Hörner me
présentait ses hommes équipés et montés, mais je lui sus gré de l’avoir
improvisée pour notre hôtesse, car elle visait à faire impression sur elle et elle
atteignit son but.
    Madame de Brézolles répondit par un signe de tête gracieux à
ce salut et je vis bien que son regard s’attardait quelque peu avec plaisir sur
les membratures carrées de mes bons Suisses. Elle n’en garda pas moins la tête
froide et, de retour dans son petit salon, elle me posa sur mon escorte des
questions fort pertinentes.
    — Comte, dit-elle, j’ai observé que vos Suisses ne
portent qu’une épée à la ceinture. Est-ce suffisant ?
    — Nenni, Madame, ils ont aussi deux pistolets chacun,
mais vous ne les avez pu voir, car ils sont placés dans les fontes de l’arçon.
Ils ont aussi deux mousquets chacun.
    — Pourquoi deux ?
    — Si l’un se détériore, Madame, l’autre le remplace.
Mais il se peut faire aussi que dans une position retranchée, on ait intérêt à
charger les deux pour augmenter de prime la puissance de feu.
    — Pourquoi de prime ?
    — Parce que si le combat se poursuit, chacun aura déjà
fort à faire à recharger un seul des deux. Mais on peut concevoir aussi qu’une
partie de la troupe recharge leurs armes tandis qu’une autre partie décharge
les siennes afin d’entretenir une mousquetade à peu près continue.
    — Je n’ai pas vu ces mousquets.
    — Ils sont dans la charrette que vous avez vue avec
toutes sortes de choses utiles à la guerre, y compris des pétards de guerre.
    — Pourquoi des pétards de guerre ? À quoi
servent-ils ?
    — À pétarder l’huis d’un château. On peut aussi les
employer contre un escadron de cavaliers pour épouvanter les chevaux et les
mettre à la fuite.
    — Et pensez-vous, Monsieur, que cette douzaine
d’hommes, vous compris, puissent repousser une centaine de pillards qui s’en
voudraient prendre à ma maison ?
    — Une centaine de pillards, Madame ! Comme vous y
allez ! Une centaine de pillards se trantolant quasiment sous le nez de
l’armée du roi qui est forte de douze mille [3] hommes ! Soyez bien assurée que tout ce que vous avez à craindre céans, ce
ne sera jamais qu’une petite bande de cinq ou six déserteurs. Et ceux-là, s’ils
viennent à apparaître, mes Suisses les hacheront menu. Mais de reste, Madame,
il n’y aura pas de combat. Le seul bruit à Saint-Jean-des-Sables que vous avez
céans une garnison de Suisses écartera les maraudeurs.
    Là-dessus, elle m’envisagea songeusement, la face
imperscrutable, comme si elle était occupée à mettre en place dedans ses
mérangeoises tout ce qu’elle avait appris sur moi, sur mes Suisses et sur le
bon usage qu’elle en pourrait faire.
    — Comte, dit-elle enfin, il est onze heures et demie.
Et je suis accoutumée à prendre à cette heure mon dîner. Voulez-vous le
partager avec moi ?
    — Rien, Madame, ne pourrait me faire plus plaisir.
Peux-je vous demander cependant si Monsieur de Clérac est inclus dans cette
invitation ?
    — Monsieur de Clérac dînera sans déchoir avec mon
Intendant qui est noble et de bon lieu. Et quant à moi, je souhaiterais
m’entretenir avec vous au bec à bec.
    Il me vint alors à l’esprit quelque galanterie dont à la
Cour, de dame à gentilhomme, on se paye, sans que cette fausse monnaie tire
vraiment à conséquence, personne, d’une part et d’autre, n’y attachant vraiment
de valeur et tous les prodiguant.
    Mais je vis bien que Madame de Brézolles était trop songeuse
et reclose sur soi pour entrer dans ce futile jeu et je me bornai à de courtois
mercis.
    Lecteur, la chère fut bonne, le vin excellent et varié, mais
l’entretien ne fut fait d’abord que de riens, tant j’étais perdu d’étonnement
qu’une location demandât tant de réflexion et me faisais, en outre, un souci à
mes ongles ronger à la pensée que je ne savais pas encore où diantre je
trouverais, la nuit venant, un gîte pour mes hommes et pour moi.
    Le dîner quasi fini, les riens eux-mêmes s’épuisant, nous
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