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La Gloire Et Les Périls

La Gloire Et Les Périls

Titel: La Gloire Et Les Périls
Autoren: Robert Merle
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parvenu à un
pas de la marquise de Brézolles, je me redressai et elle leva avec grâce son
bras, de façon à mettre sa main à portée de mes lèvres, non sans m’adresser un
sourire d’une extrême douceur. Ce qui m’amena à appuyer mes lèvres sur ses
doigts un peu plus longtemps que les manuels de galanterie ne le recommandent,
du moins en une première encontre. Mais cela passa fort bien, et nous ayant
priés de prendre place, la marquise fit à Nicolas un signe de tête des plus
gracieux, mais sans toutefois lui offrir sa main.
    Dès qu’à la prière de Madame de Brézolles nous fumes assis
en face d’elle, le silence céda la place à un petit bruit courtois de paroles
inutiles, tandis que nous nous envisagions de part et d’autre avec la plus
chattemite discrétion. Et comme j’observais à certains signes que ni moi-même
ni Nicolas ne déplaisions à la dame, je passai des propos futiles aux
compliments et louai Madame de Brézolles pour la beauté de son château,
l’agrément de son parc, le bon goût de son petit salon et, très à la prudence,
une patte à l’avant et l’autre déjà sur le recul, je la complimentai enfin sur
les grâces de sa personne.
    Elle rosit à ces enchériments, mais entendant bien à la
parfin qu’elle ne pouvait plus longtemps demeurer coite sans se rebéquer contre
ces amabilités qui glissaient peu à peu à la galanterie, elle dressa
gracieusement contre moi une paume défensive et dit, non sans pointe ni
finesse :
    — Comte, vous vivez à la Cour où les dames exigent qu’à
l’abord et au départir, les gentilshommes les couvrent d’hyperboles, mais je ne
saurais, quant à moi, nourrir ces exigences. Je suis veuve, je n’ai pas d’enfant,
je vis seulette dans le plat pays et je vois peu de monde. Et combien qu’on me
reconnaisse à l’ordinaire quelques bonnes qualités, vous ne sauriez rien en
dire, puisque vous ne les connaissez pas. Aussi, je vous supplie de me parler à
la franche marguerite et de me dire sans détour ce que vous désirez de moi.
    C’était là une sorte de petite rebuffade, mais point tout à
fait cependant, car ce qu’elle avait dit, soit à dessein, soit à dessein
confus, touchant ses bonnes qualités qui m’étaient encore déconnues, laissait
entendre qu’elle aimerait assez que je les connusse davantage, ce qui ne
pouvait se faire sans demeurer en ses alentours et prendre habitude à elle.
    Encouragé par cet « encore », j’exposai alors ma
requête d’un cœur plus léger. Ayant été assiégés, mes hommes et moi, dans la
citadelle de Saint-Martin-de-Ré, nous n’avions rejoint le continent que le
siège levé, c’est-à-dire au moment où l’armée du roi avait déjà établi ses
cantonnements, tant pour ses hommes que pour ses officiers. Nous n’avions donc
trouvé nulle part où nous loger. Et apprenant que la marquise de Brézolles
comptait faire ses bagues pour départir pour Nantes, je m’étais apensé qu’elle
trouverait peut-être opportun que je lui loue sa demeure pour la durée de son
absence. Ce qui aurait pour avantage, d’abord, de nous loger, ensuite de
remparer le château d’une garnison qui empêcherait les picoreurs de le mettre à
sac en son absence.
    À cela, Madame de Brézolles de prime ne répondit rien,
m’envisageant songeusement, comme si elle pesait dans de fines balances mes
mérites évidents et mes possibles démérites.
    — Comte, dit-elle à la parfin, me permettez-vous de
vous poser questions ?
    — Madame, dis-je, je suis à vos ordres entièrement
dévoué.
    — Quels sont les hommes que vous avez avec vous ?
Des soldats ?
    — Nullement, Madame, ce sont des Suisses dont je loue
les services, qui me servent de longue date, et sont bonnes et honnêtes gens,
propres, vaillants, disciplinés. Tant est qu’ils n’hésitent pas, en mon domaine
d’Orbieu, à mettre la main, s’il le faut, aux travaux des champs.
    — Comte, puis-je les voir ?
    — Assurément, Madame. Nicolas, veux-tu bien rassembler
nos Suisses devant le perron ?
    — Cela sera fait dans la minute, Monsieur le Comte, dit
Nicolas qui départit comme carreau d’arbalète après un salut et une révérence à
Madame de Brézolles, tous deux prestement et gracieusement exécutés.
    L’huis fermé sur lui, Madame de Brézolles se tourna vers moi
et dit avec un sourire :
    — Vous avez là, Comte, un bien joli écuyer.
    Remarque qui, de prime, me mordit le cœur de jalousie et
ensuite
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