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La fée Morgane

La fée Morgane

Titel: La fée Morgane
Autoren: Jean Markale
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nom de Rhiannon, et dans la
statuaire gallo-romaine sous le nom d’Épona, la « déesse-cavalière »,
ou la « déesse-jument ».
    Bodbh est le nom gaélique de la corneille. Dans la plus ancienne
épopée d’Irlande, la célèbre Razzia des bœufs de Cualngé ,
elle apparaît sur le champ de bataille sous la forme d’une corneille qui vient
harceler les combattants. On la retrouve dans de nombreux épisodes des récits
arthuriens où elle accomplit les mêmes actions. Et Geoffroy de Monmouth, dans
sa Vie de Merlin , prétend qu’elle et ses sœurs,
qui vivent dans l’île des Pommiers, sont capables de se métamorphoser en oiseaux :
car, dans le texte de Geoffroy, il s’agit bel et bien de Morgane, reine de l’île
d’Avallon, maîtresse des vents, des tempêtes et des animaux sauvages.
    Le nom de Morrigane a donné lieu à bien des interprétations.
Il semblait sans doute trop facile d’identifier formellement la Morrigane
gaélique comme étant la Morgane des romans arthuriens. Aussi, la suite de d’Arbois
de Jubainville a-t-il proposé à ce nom la signification de « reine des
cauchemars ». C’était avouer qu’elle faisait peur et qu’elle était au
centre de tous les fantasmes de la nuit. Mais, en fait, le nom de Morrigane s’explique
très simplement : elle est la Grande Reine ,
ou plus exactement « la grande royale ». Or, le nom de l’héroïne
galloise Rhiannon (Rivanone en breton-armoricain), venu d’un ancien brittonique Rigantona , a exactement la même signification.
Il ne peut plus y avoir d’hésitation sur ce point : Morgane n’est pas la « née
de la mer », elle est « la grande reine », elle s’identifie
pleinement avec la Morrigane irlandaise, et elle est l’image héroïsée – et
quelque peu « diabolisée » – de la Vierge universelle. D’où son
importance dans le déroulement des multiples épisodes de ce cycle du Graal :
elle est partout présente, comme Merlin , mais
le plus souvent masquée, déguisée ou occultée, parce
qu’elle fait peur.
    Car n’oublions pas que Merlin, le prophète et l’enchanteur, est
le fils d’un diable, et qu’il n’a que deux disciples, deux femmes, Viviane, la
Dame du Lac, et Morgane, la reine de l’île des Pommiers. Merlin ayant disparu
de la surface de la terre, selon sa propre volonté, il appartient à ses deux
disciples de surveiller le fonctionnement des rouages subtils qu’il a mis en
place. La première, Viviane, a pris en charge l’éducation de Lancelot, celui
qui est nécessaire à cette étrange société égalitaire qu’est la Table Ronde. Viviane
est devenue ainsi la Dame du Lac, la mère nourricière et l’initiatrice de celui
qui sera le meilleur chevalier du monde. Mais comment peut-on devenir le
meilleur chevalier du monde si l’on n’a pas d’obstacles à surmonter ? Ces
obstacles, ce sera à Morgane de les dresser sur le passage du héros, car elle
est l’excitatrice, la provocatrice, celle sans laquelle aucune progression ne
peut être réalisée dans cette difficile errance vers le Graal. C’est dire l’importance
de ces deux personnages féminins dans l’épopée arthurienne : ils sont
essentiels, bien que contradictoires si l’on s’en tient aux apparences ; on
est alors tenté de dire que Viviane construit et que Morgane détruit. Cette
vision élémentaire n’est ni vraie ni fausse, et il faut se garder de tout parti
pris manichéen de bas étage. Dans le Cycle du Graal, en dépit de la lutte que
semblent engager les chevaliers d’Arthur contre les forces des ténèbres, il n’y
a aucune référence à un Bien absolu, ni condamnation d’un Mal non moins absolu.
L’amour de Lancelot pour Guenièvre est adultère, et il devrait être condamné. Mais
il est facteur de prouesses et, dans cette mesure, il ne peut qu’être exalté. Merlin
a permis à Uther Pendragon de réaliser son désir adultère et meurtrier, mais ce
n’était que pour donner naissance à Arthur. Par contre, Arthur, en toute
innocence, en toute naïveté, a commis l’inceste suprême, celui du frère et de
la sœur et, ce faisant, il a donné naissance à un monstre, ce Mordret qui sera
le destructeur de la Table Ronde. Où est le Bien ? Où est le Mal ? Lancelot,
abusé par les charmes de Brisane, a cru commettre une fois de plus son coupable
adultère avec la reine Guenièvre, mais ce n’était en réalité que la pure et
tendre porteuse du Graal. Il le fallait, et Dieu l’avait
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