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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon
Autoren: Gérald Messadié
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pitié. La phrase de Cambacérès ne cessait de résonner à ses oreilles : « Tout a changé à Wagram. » Lors d’un voyage à Paris, Eugène, qui avait ses antennes en Europe, le lui confirma : depuis novembre dernier, les cours d’Europe bruissaient de la même rumeur ; Napoléon aspirait à un mariage royal. Et les deux noms qui revenaient le plus souvent sur les lèvres étaient ceux de la grande-duchesse de Russie, Anna Pavlovna, fille du tsar Alexandre Ier, et de l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche, la fille de l’empereur François Ier.
    Elle reçut les nouvelles sans émotion. Ces manoeuvres lui apparaissaient comme un de ces ennuyeux opéras auxquels Napoléon, après jadis Alexandre de Beauharnais, l’obligeait à assister : des bellâtres qui donnaient de la voix, des choeurs bêlants et des héroïnes immanquablement malheureuses qui poussaient des cris censés être mélodieux.
    Elle aurait dû être plus méfiante.
    Le lendemain de son arrivée à Paris, après le déjeuner, le marquis de Beauharnais avait fait les éloges de son fils en l’absence de ce dernier. Rose apprit ainsi que le vicomte était l’un des jeunes gens les plus recherchés de France, car en plus d’être beau, bien fait et cultivé, il était prisé à la cour. Il dansait à merveille et la reine Marie-Antoinette l’invitait souvent à ses bals ; elle l’avait même coiffé du surnom « Le beau danseur de Versailles ». Façon de faire entendre à Rose qu’elle avait de la chance. Alexandre eût pu espérer de plus nobles alliances que celle-là. Car Rose Tascher n’était ni très riche, ni titrée.
    Elle l’avait entendu.
    Comme le délai jusqu’au mariage serait long, M. de La Pagerie et sa soeur jugèrent qu’il n’était pas opportun que les deux fiancés séjournassent sous le même toit ; ils envoyèrent donc Rose patienter chez les Bernardines, à l’abbaye de Panthémont, dans le quartier de Grenelle, à Paris. Il chargea une amie de la famille, la marquise de Montesson, d’expliquer les choses du monde à sa fille. La marquise était non seulement favorable au projet de mariage, mais encore elle s’était prise d’affection pour la jeune Rose, qui représentait pour elle l’image de la grâce et de l’innocence. Elle apprit à la jeune fille à patienter.
    La sollicitude de la marquise et la bienveillance de l’abbesse de Virieux adoucirent pour Rose la mélancolie des couvents. Car la supérieure aussi s’était émue de l’innocence de cet oiseau des îles qui ne savait rien des manières du grand monde et moins encore de ses pièges. Elle entreprit de la cultiver, lui fit lire Corneille et La Fontaine, affina son sens musical et perfectionna son goût pour le dessin. Mais l’évidence devenait chaque jour plus aiguë : Rose était seule en pays étranger, loin des siens et condamnée à l’attente d’un fiancé qui ne semblait guère impatient des épousailles. Et ses condisciples n’étaient pas plus chaleureuses, telle cette jeune princesse de Condé qu’on entourait de tous les égards et qui semblait ne pas la voir.
    Mais enfin, les machineries parentales avaient été mises en branle et il n’était pas aisé de les arrêter. Un jour, une visiteuse inconnue, élégante autant que jolie, se rendit à l’abbaye et demanda à voir Mlle Tascher de La Pagerie ; elle se présenta comme une amie de la famille et se fit doucereuse. C’était Mme de Vassogne. Rose ignorait tout d’elle ; elle en fut dupe. Elle n’apprendrait que plus tard que c’était la maîtresse principale d’Alexandre. La visite avait suffi à l’intrigante pour s’aviser que la petite Américaine ne serait jamais une rivale ; quelque svelte qu’elle fût et dotée de la beauté du diable, c’est-à-dire jeune, cette sauvageonne venue de l’autre côté du monde ne captiverait jamais le bel Alexandre au point qu’il se détournât de maîtresses délicieuses et savantes. Tout à coup, l’attente fut écourtée.
    Le mariage fut célébré le 13 décembre 1779, dans la propriété de Mme Renaudin, à Noisy-le-Grand.
    Trente ans et trois jours déjà !
    La couche nuptiale avait heureusement été bassinée, car la chaleur des premières étreintes nuptiales n’y suppléa pas. Alexandre était joli garçon et gaillard, mais n’en ayant pas été d’abord amoureuse, Rose se trouva en peine de l’aimer ;
     il devint mari avant d’avoir été amant. Le désir, absent du couple, se
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