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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon
Autoren: Gérald Messadié
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ruisselle…
    Elles étaient trop loin de la forêt pour se mettre à couvert. Tandis que le roi et les autres chasseurs fonçaient derrière les chiens, en dépit des torrents d’eau qui tombaient sur eux, elles s’arrêtèrent, prises de court.
    — Je vais prendre une fluxion…, haleta encore la vicomtesse de Béthizy.
    Deux autres cavalières arrivèrent à leur hauteur, également éplorées, et toutes regardant Rose, stupéfaites : bonne à essorer, le grand chapeau dégouttant d’eau, elle ne se plaignait pas et semblait même trouver du piquant à la situation.
    Miséricordieusement, deux chasseurs s’avisèrent de leur détresse et galopèrent vers elles. Ils se défirent de leurs capes et proposèrent d’en jeter une sur les épaules de Rose.
    — Non, couvrez-en la vicomtesse, dit-elle. Il ne faudrait pas qu’elle prenne froid.
    Ils escortèrent les chasseresses jusqu’à un relais voisin. Rose s’occupa de ses compagnes autant qu’elle le put, puis, s’avisant d’une accalmie, elle déclara à l’assemblée admirative qu’elle rentrait chez elle.
    — Seule, madame ? s’alarma l’un des chasseurs.
    — Ne craignez pas pour moi, les sangliers sont sans doute enrhumés, répondit-elle avec un sourire.
    De retour à Fontainebleau, les vêtements collés au corps, sous les regards ébahis de la compagnie, elle se changea, demanda à souper et se coucha sans autre cérémonie. Dans les jours qui suivirent, la réputation de l’intrépide amazone fut faite à Versailles et les échos en revinrent à Fontainebleau, suscitant les sourires de Rose. Elle fut invitée par la reine à Trianon et les compliments de certains courtisans se firent plus insistants. Mais la principale satisfaction de Rose fut que le vicomte de Beauharnais n’avait pas été invité à la chasse royale et qu’elle avait été présentée à la cour sans son entremise.
    Il y eut des fêtes et des marivaudages. Mais la déception infligée par Alexandre de Beauharnais avait tendu comme un voile entre Rose Tascher de La Pagerie et le désir des hommes. Elle les voyait au travers, et leurs baisers ne faisaient qu’effleurer ses lèvres.
    Elle avait des enfants, ils absorbèrent son énergie vitale.

 
    5
 
« Marcheras-tu, Robespierre ? »
    En juin 1788, Rose décida de reprendre pied sur la terre natale. Ses parents y séjournaient toujours, elle y avait des intérêts et elle avait besoin de douceur. Elle emmena Hortense, alors âgée de cinq ans.
    La fillette fut fêtée par ses grands-parents, sa tante Manette, Marion, qui avait été la nourrice de sa mère, la domesticité…
    « Un jour, raconterait-elle plus tard dans ses Mémoires, je jouais auprès d’une table sur laquelle ma grand-mère était occupée à compter de l’argent. Je la regardais, et quelquefois, quand une pièce tombait de ses mains, je courais pour la ramasser et la lui rapporter. Je lui vis faire une douzaine de petites piles de gros sous qu’elle laissa ensuite sur une chaise, et elle quitta la chambre en emportant le reste de l’argent. J’ignore encore comment l’idée me vint qu’elle me donnait cet argent pour en disposer ; mais je m’en convainquis tellement que je pris tous ces tas de sous dans ma robe que je relevai pour en faire une poche et je partis avec ce trésor… J’allai trouver un mulâtre domestique de la maison et je lui dis : “Jean, voici beaucoup d’argent que ma grand-mère m’a donné pour les pauvres Noirs. Menez-moi à leurs cabanes pour le leur porter.” Il faisait une chaleur brûlante, et le soleil était dans toute sa force ; mais j’étais si contente que je n’aurais pas voulu retarder d’un instant. Nous discutâmes avec Jean le meilleur moyen de satisfaire le plus de malheureux. J’allai dans toutes les cases des Noirs, mon argent toujours dans ma robe retroussée que je tenais d’une main ferme et que j’ouvrais seulement pour en tirer ce que Jean décidait que je devais donner. La nourrice de ma mère, Marion, eut double portion. Mon trésor étant épuisé, me voyant environnée de tous ces Noirs qui me baisaient les pieds et les mains, je revenais triomphante, fière et joyeuse de tant de bénédictions, lorsqu’en rentrant dans la maison, je la vis en émoi. Ma grand-mère cherchait son argent. »
    Les adultes traitèrent l’affaire avec plus de philosophie que la trop généreuse Hortense, convaincue d’avoir commis un abominable forfait. Aussi avait-elle trop bien
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