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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19
Autoren: Jules Michelet
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cœur très-espagnol, devient très-autrichien, l'Autriche étant la seule maison où celle de Bourbon puisse se marier sans déroger. Joseph II naît à peine qu'il est le mari projeté, désiré, de Versailles et Madrid. Prise énorme pour Vienne. La catholique Autriche, par un ministre philosophe, Choiseul, met la France en chemise, amuse l'opinion, mystifie Versailles et Ferney.
    Voilà, je le répète, le grand courant qui domine l'histoire; l'intérêt de famille. Y eut-il un contre-courant ? une politique française qui balançât un peu cet ascendant de l'étranger? On voudrait bien le croire, et quelques-uns l'ont soutenu. On eût trouvé piquant de découvrir que Louis XV, ce roi sournois, haïssant ses ministres et trahissant la trahison, fut en dessous un patriote. L'excellente et curieuse publication de M. Boutaric (1866) a montré ce qu'on en doit croire. On y voit que Conti et Broglie firent tout pour l'éclairer, lui trouvèrent des observateurs habiles et de premier mérite, des Vergennes et des Dumouriez, et qu'ils ne réussirent à rien. Dans ses petits billets furtifs, il ne veut et ne cherche qu'un certain plaisir de police.
    C'est la jouissance peureuse du mauvais écolier qui croit faire un tour à ses maîtres. Nulle part il n'est plus misérable. Il s'égare en ses propres fils, veut tromper ses agents, ment à ceux qui mentent pour lui, il perd la tête et convient qu'il «s'embrouille.» Là son tyran Choiseul le pince et l'humilie. Il se renfonce dans l'obscur, dans la vie souterraine d'un rat sous le parquet. Mais on le tient: Versailles tout entier est sa souricière.
    L'affaire d'Éon—(et la confirmation que M. Boutaric donne au récit de M. Gaillardet, tiré des papiers d'Éon même),—cette affaire illumine le rat dans ses plus misérables trous. Choiseul y est cruel, impitoyable pour son maître. On ne s'étonne pas de la haine fidèle que lui garda un homme qui haïssait peu (Louis XVI).
    Sur Choiseul j'ai été très-ferme, contre Voltaire et autres dupes. Croira-t-on que Flassan ose imprudemment dire que Choiseul n'est pas Autrichien? (T. VI, 151.)
    Que nous en coûta-t-il? rien que le monde. Enfermée désormais, perdant à la fois ses deux Indes, bannie d'Amérique et d'Asie, la France vit l'Anglais occuper à son aise les cinq parties du globe.
    Cela apparemment nous brouille avec l'Autriche? Nullement. Remarquable progrès de cette invasion intérieure. Vienne nous a menés quatorze ans par le fil peu sûr d'une maîtresse usée, la Pompadour, ou d'un petit roué, Choiseul. Elle prend à Versailles un solide établissement par une jeune reine charmante, toute-puissante par la passion, immuablement Autrichienne, et qui, dans le trône de France, mettra de petits Autrichiens. De même que, par sa Caroline, Marie-Thérèse a repris Naples et l'ascendant sur l'Italie,—par Marie-Antoinette elle pèse sur la France, l'exploite aux moments décisifs.
    Il est curieux de voir combien notre diplomatie a été et est autrichienne. M. de Bacourt (Intr. à Lamark) n'a pas craint d'avancer que Marie-Antoinette ne se mêla pas des affaires, n'agit pas pour sa mère, son frère, etc.!! Voilà jusqu'où, aux derniers temps, on osait nier l'histoire, démentir la tradition, tous les témoignages contemporains, la concordance des mémoires, l'aveu des royalistes eux-mêmes.
    Ce n'était plus un parti, c'était la grande masse des honnêtes gens et des gens bien pensants qui laissait là l'histoire, préférait le roman. Sur cette pente, la fantaisie s'enhardissait et avançait, mêlait ses jeux à des ombres si sérieuses. La légende allait son chemin. Desesprits inventifs, des plumes adroites, habiles, avaient des bonheurs singuliers, des trouvailles imprévues, charmantes. Ces nouveautés étonnaient quelques-uns; mais, dans peu, devenant anciennes, elles auraient fini par être respectées, prendre l'autorité du temps.
    Un matin, qui l'eût cru! des archives de Vienne, d'un dépôt si discret, si peu intéressé à éclaircir l'histoire, arrive à la légende le plus accablant démenti!
    Et de qui, s'il vous plaît? de la Reine elle-même, de sa mère de ses frères.
    Par qui? par la voie la plus sûre, l'honorable archiviste de la maison d'Autriche, M. Arneth, qui donne ces lettres textuelles, et sans changement que l'orthographe (qu'il a eu le tort de rectifier).
    Le fameux complot autrichien, tant nié, n'est que trop réel. Qui le dit? C'est Marie-Thérèse. Rien de plus violent
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