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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19
Autoren: Jules Michelet
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bonté.—L'élan pour l'Amérique est simplement sublime.—L'attachement bizarre, obstiné, acharné, qu'elle eut pour Louis XVI, fermant les yeux à l'évidence, le croyant toujours un bonhomme, est ridicule, si l'on veut, mais touchant. Aucune faute n'y put rien, non pas même les fusillades de Paris, en 88.
    Nul fiel en cette âme de France. Tellement haïe par l'Angleterre, elle ne la hait pas du tout. Et, c'est juste au moment où l'Angleterre la ruine, que la France l'admire, s'en engoue, la copie. Et notez que, pour le progrès des idées, la France fait tout, l' Angleterre rien, pendant soixante-dix ans . De la mort de Newtonà Watt, elle est exactement stérile (loyal aveu de M. Buckle).
    Ce cœur exubérant, si facile et si bon, si charmant de la France, il faudrait bien le dire tout au long, ce que je n'ai pu. Ces justices dues à nos pères pour une foule d'héroïsmes obscurs, il faudrait, tôt ou tard, qu'on les rendît enfin. On dit que Camoëns eut aux Indes un emploi, fut l' administrateur du bien des décédés . Ce titre, cette charge, sont ceux de l'historien. Je n'en resterai pas indigne, j'acquitterai ces dettes et ne mourrai pas insolvable.
    Il me convient d'être mon juge. J'essayerai, si je vis, dans un travail à part, d'apprécier cette œuvre, en ce qu'elle a de bon, d'incomplet, de mauvais. Je ne sais que trop ses défauts. Alors, je pourrai faire ce qu'on ne peut dans une préface: je dirai les méthodes dont j'ai usé selon les temps, la spécialité de nos arts historiques que l'on connaît fort peu.
    Mais je voudrais surtout y dire le travail personnel, intime, qui se faisait en moi pendant ce long voyage. Mon œuvre était pour moi (plus qu'un livre) la voie de l'âme. Elle m'a fait et a fait ma vie.
    Paris, 1 er octobre 1866. [Retour à la Table des Matières]
HISTOIRE DE FRANCE
CHAPITRE PREMIER.
CHUTE DE BERNIS. — AVÉNEMENT DE CHOISEUL.
1758.
    La paix ou la banqueroute, telle était la situation en 1758. Et une banqueroute sanglante, des combats dans Paris, peut-être. Le roi avait dit lui-même: «Si l'on ne paye pas la rente, il y aura une révolte.»
    Le roi n'allait plus à Paris. Mais si Paris affamé avait été à Versailles? Dans la redoutable émeute de mai 1750, quelqu'un l'avait proposé.
    L'attente d'une révolution était telle en ce moment, que plusieurs voulaient partir, émigrer, se mettre à l'abri. Rousseau y songeait, et bien d'autres, comme cet homme du Parlement, qui le consulta là-dessus ( Confessions ).
    Bernis aurait tout donné pour ne plus être ministre. Seulement qui eût pris cette place? Il semblait qu'un homme perdu pouvait seul accepter l'héritage de la ruine et du désespoir. Bernis supplia Choiseul, notreambassadeur à Vienne, de venir, de s'unir à lui, ou plutôt de le remplacer.
    La situation avait fort empiré depuis Rosbach. Un Condé (prince de Clermont) battu, reculant jusqu'au Rhin. Les Anglais descendant en France et démolissant Cherbourg, brûlant en sécurité cent vaisseaux devant Saint-Malo. Point d'argent pour en refaire. Cinq cents millions de dépense, trois cents millions de recette. Un déficit annuel de deux cents millions. Le roi vivant, de mois en mois, sur les avances usuraires que lui faisaient les banquiers, les priant, souvent en vain ( Rich. , IX, 429). Les choses en étaient au point que l'on n'osait plus compter. Une enquête fit connaître, en 1764, que depuis huit ans on n'écrivait plus dans nos ports. Plus de registres de nos armements maritimes ( Deffand , I, 317).
    Le contrôleur des finances, Séchelles, était devenu fou. Bernis était près de l'être. Il bavardait éperdu, proposait des choses vaines, conseillait à la Pompadour d'appeler ses ennemis, Maurepas et Chauvelin! Chauvelin, ennemi né de la cabale autrichienne! Maurepas, l'ennemi des maîtresses, qui, le lendemain peut-être, eût chassé la Pompadour!
    Nous n'avons pas assez dit ce qu'était ce pauvre Bernis, monté si haut par hasard. Il n'était pas ambitieux. S'il hasarda, dit Duclos, de faire une grande fortune, c'est qu'il ne put réussir à en faire une petite. Son esprit, ses jolis vers, sa jolie figure poupine, longtemps l'avaient laissé pauvre. Ayant fait un mauvais poème de la Religion vengée , il plut au Roi, qui le mit auprès de la Pompadour pour la polir, la former, lamettre au niveau de Versailles (1745). Elle le fit ministre à Venise (1752), son agent près de l'Infante dans leur complot autrichien. Il fut l'homme de
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