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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis
Autoren: Albert le Roy
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tendances, et de les publier sous la forme qu'il sera forcé d'avaler au coin de son feu.» Dans une lettre à Jules Janin, du 1er octobre 1855, elle épanche sa colère, en lui reprochant de trouver mauvaises toutes ses productions dramatiques, et elle plaide avec quelque amertume pour chacune des pièces qu'elle a fait représenter. Plus sagace et plus concluante est la préface qui se trouve en tête des quatre volumes du Théâtre complet. George Sand y développe la thèse idéaliste. Elle se flatte d'avoir contribué à délivrer les planches du matérialisme qui les envahissait.
    De même dans la dédicace de Maître Favilla, adressée à M. Rouvière : «Une seule critique, dit-elle, m'a affligée dans ma vie d'artiste : c'est celle qui me reprochait de rêver des personnages trop aimants, trop dévoués, trop vertueux, c'était le mot qui frappait mes oreilles consternées. Et, quand je l'avais entendu, je revenais, me demandant si j'étais le bon et l'absurde don Quichotte, incapable de voir la vie réelle, et condamné à caresser tout seul des illusions trop douces pour être vraies.» C'est encore la doctrine qu'elle expose, dans la profession de foi qu'elle a mise en préambule de sa traduction d'une comédie de Shakespeare, Comme il vous plaira, sous la forme d'une lettre à M. Régnier. «Le temps, dit-elle, n'est guère à la poésie, et le lyrisme ne nous transporte plus par lui-même au-dessus de ces régions de la réalité dont nous voulons que les arts soient désormais la peinture. Si, à cette heure (1856), la Ristori réveille notre enthousiasme, c'est qu'elle est miraculeusement belle, puissante et inspirée. Il ne fallait pas moins que l'apparition d'une muse descendue de l'Hymette pour nous arracher à nos goûts matérialistes. Elle nous fascine et nous emporte avec elle dans son rêve sacré ; mais, quant à l'hymne qu'elle nous chante, nous l'écoutons fort mal, et nous nous soucions aussi peu d'Alfieri que de Corneille ; c'est-à-dire que nous ne nous en soucions pas du tout, puisque, notre muse Rachel absente, la tragédie française est morte jusqu'à nouvel ordre.»
    Le programme de George Sand était noble et vaste ; mais elle n'a pu en réaliser toute l'ampleur. De là une nuance de mélancolie, quand elle parle de ceux qui cherchent et découvrent la fibre du succès d'argent.
    Elle n'est pas envieuse-un tel sentiment lui fut toujours étranger-mais elle estime que le public manque de justice distributive. «L'auteur, dit-elle, qui n'obtient pas le succès d'argent, ne trouve plus que des portes fermées dans les directions de théâtre.» A elle, on lui fait grief de présenter de trop grands caractères, des personnages trop honnêtes, partant invraisemblables, de ne pas chercher les effets. En dépit des aristarques, elle persiste à affirmer, sinon à atteindre, la supériorité d'une forme dramatique, uniquement soucieuse de «flatter le beau côté de la nature humaine, les instincts élevés qui, tôt ou tard, reprennent le dessus.» Si la critique lui a été parfois sévère, amère et même irréfléchie, elle garde l'espoir d'un retour favorable. «Nous l'attendons, écrit-elle, à des jours plus rassis et à des jugements moins précipités. Ce qu'elle nous accordera un jour, ce sera de n'avoir pas manqué de conscience et de dignité dans nos études de la vie humaine ; ce sera d'avoir fait de patients efforts pour introduire la pensée du spectateur dans un monde plus pur et mieux inspiré que le triste et dur courant de la vie terre à terre. Nous avons cru que c'était là le but du théâtre, et que ce délassement, qui tient tant de place dans la vie civilisée, devait être une aspiration aux choses élevées, un mirage poétique dans le désert de la réalité.» En effet, l'oeuvre dramatique de George Sand est aux antipodes du réalisme. Elle n'offre pas, comme on disait alors, un daguerréotype des misères et des plaies humaines, mais un tableau riant, embelli, un peu idyllique. Son souci était de réagir contre le laid, le bas et le faux, et de poétiser la vie. Il en est parfois besoin. Et faut-il nous étonner si un romancier produisit un théâtre romanesque ?
    La première pièce de George Sand fut Cosima ou la Haine dans l'amour, drame en cinq actes et un prologue, représenté à la Comédie-Française le 29 avril 1840. La préface constate que Cosima fut fort mal accueillie, et elle ajoute : «L'auteur ne s'est fait illusion ni la veille ni
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