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George Sand et ses amis

George Sand et ses amis

Titel: George Sand et ses amis
Autoren: Albert le Roy
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CHAPITRE PREMIER - LES ORIGINES
    George Sand a voulu résumer sa personne littéraire et morale dans l'épigraphe qu'elle inscrivit en tête de l'Histoire de ma Vie : «Charité envers les autres, dignité envers soi-même, sincérité devant Dieu.» Fut-elle toujours fidèle, et dans ses livres et dans ses actes, à cette noble devise ? C'est l'étude qu'il sera loisible d'entreprendre, en retraçant les vicissitudes de sa destinée, en analysant son oeuvre, en instituant une enquête sur les hommes de son temps et les événements auxquels elle fut mêlée.
    A l'image de Jean-Jacques Rousseau, son maître, elle nous a légué un ouvrage autobiographique, composé non pas au déclin, mais au milieu même d'une existence diverse et contradictoire. La première partie de l'Histoire de ma Vie a été rédigée en 1847, alors que George Sand était dans tout l'éclat de sa renommée. Elle explique nettement l'objet qu'elle se propose et le plan qu'elle a conçu : «Je ne pense pas qu'il y ait de l'orgueil et de l'impertinence à écrire l'histoire de sa propre vie, encore moins à choisir, dans les souvenirs que cette vie a laissés en nous, ceux qui nous paraissent valoir la peine d'être conservés. Pour ma part, je crois accomplir un devoir, assez pénible même, car je ne connais rien de plus malaisé que de se définir... Une insurmontable paresse (c'est la maladie des esprits trop occupés et celle de la jeunesse par conséquent) m'a fait différer jusqu'à ce jour d'accomplir cette tâche ; et, coupable peut-être envers moi-même, j'ai laissé publier sur mon compte un assez grand nombre de biographies pleines d'erreurs, dans la louange comme dans le blâme.» Ce sont, à dire vrai, ces erreurs de détail que George Sand s'est surtout complu à redresser en racontant les années de sa jeunesse, voire même les origines de sa maison, avec une singulière prolixité.
    Sur les quatre gros volumes de l'Histoire de ma Vie, le premier est consacré presque entièrement à nous décrire «l'Histoire d'une famille de Fontenoy à Marengo.» Elle remonte à Fontenoy pour rappeler que Maurice de Saxe fut son bisaïeul. Quelque démocrate qu'elle soit devenue, elle tire vanité d'être par le sang arrière-petite-fille de l'illustre maréchal, de même qu'elle est par l'esprit de la lignée de Jean-Jacques ; puis elle formule ainsi son état civil : «Je suis née l'année du couronnement de Napoléon, l'an XII de la République française (1804). Mon nom n'est pas Marie-Aurore de Saxe, marquise de Dudevant, comme plusieurs de mes biographes l'ont découvert, mais Amantine-Lucile-Aurore Dupin.»
    Aussi bien, en se défendant de la manie aristocratique, n'est-elle pas indifférente et veut-elle nous intéresser à tous les souvenirs généalogiques de sa famille. Elle s'étend longuement sur le maréchal de Saxe et sur cette noblesse de race qu'elle ramènera théoriquement à sa juste valeur dans le Piccinino. Sa grand'mère, Aurore Dupin de Francueil, avait vu Jean-Jacques une seule fois, mais en des conditions qu'elle n'eut garde d'oublier. Voici comment elle relatait l'anecdote dans les papiers dont George Sand hérita : «Il vivait déjà sauvage et retiré, atteint de cette misanthropie qui fut trop cruellement raillée par ses amis paresseux ou frivoles. Depuis mon mariage, je ne cessais de tourmenter M. de Francueil pour qu'il me le fît voir ; et ce n'était pas bien aisé. Il y alla plusieurs fois sans pouvoir être reçu. Enfin, un jour, il le trouva jetant du pain sur sa fenêtre à des moineaux. Sa tristesse était si grande qu'il lui dit en les voyant s'envoler : «Les voilà repus.
    Savez-vous ce qu'ils vont faire ? Ils s'en vont au plus haut des toits pour dire du mal de moi et que mon pain ne vaut rien.» En digne aïeule de George Sand, madame Dupin de Francueil avait le culte de Jean-Jacques. Lorsqu'il accepta de dîner chez elle, sans doute pour faire honneur à son hôte elle lut tout d'une haleine la Nouvelle Héloïse. Aux dernières pages elle sanglotait, et ce jour-là, du matin jusqu'au soir, elle ne fit que pleurer. «J'en étais malade, dit-elle, j'en étais laide.» Rousseau arrive sur ces entrefaites, et M. de Francueil se garde de la prévenir.
    «Je ne finissais pas de m'accommoder, ne me doutant point qu'il était là, l'ours sublime, dans mon salon. Il y était entré d'un air demi-niais, demi-bourru, et s'était assis dans un coin, sans marquer d'autre impatience que celle de
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