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Elora

Elora

Titel: Elora
Autoren: Mireille Calmel
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des Anciens, dans un nuraghe. Il a guidé nos mains, nos corps enlacés comme s’il voulait, dans le tumulte de lumière bleutée qui nous caressait, nous offrir quelque chose de précieux.
    — Khalil, murmura Algonde comme une évidence, forte de ce que lui avait raconté Elora.
    Enguerrand tiqua. Elle lui sourit.
    — N’est-ce pas le prénom de ton fils ?
    Le sang quitta le visage du chevalier.
    — C’est celui qu’il aurait porté si nous n’avions été rejoints en Égypte par Houchang tout d’abord, puis par Hugues de Luirieux, alors au service des Hospitaliers de Saint-Jean. Nous ressortions de la tombe d’un de ces Géants dont tu parlais tantôt. Droits dans un traquenard…
    Sa voix s’étrangla.
    — … Lorsque je revins à moi quelques jours plus tard, j’appris des fellahs qui m’avaient recueilli et soigné que j’étais le seul survivant.
    Algonde demeura un long moment songeuse, les sourcils froncés, avant de secouer la tête.
    — Cela ne se peut. Tout concorde trop parfaitement. L’enfant. L’Égyptienne. Le souffle des Anciens… Khalil…
    — Je ne comprends pas, osa Enguerrand, tendu.
    Algonde lui prit la main et la serra dans la sienne.
    — J’ai quelques pouvoirs désormais. Dont un qui me permet de communiquer avec ma fille où qu’elle se trouve en ce monde. Elle me parle depuis toujours des compagnons de Constantin, ceux avec lesquels elle devra emprunter un jour la route des Hautes Terres. Ils ne seront pourtant que trois, tel que l’annonce la prophétie, à pouvoir vaincre le mal qui s’y est répandu. Trois, protégés par les Anciens, et l’un de ceux-là est Khalil, qu’elle vient de rencontrer en Italie.
    Le cœur d’Enguerrand s’accéléra dans sa poitrine. Il bégaya :
    — Tu… tu peux le voir ?
    — Et toi aussi si je le désire.
    Elle n’attendit pas la réponse, tout entière contenue dans le regard qu’il lui lança, aussi démuni que chargé d’un espoir insoutenable.
    — Ferme les yeux, dit-elle, et laisse-toi guider, quoi que tu éprouves.
    Il obéit, sans pourtant oser trop y croire. Les fellahs le lui avaient assuré, ils avaient enterré quatre corps. Deux hommes, deux femmes. Houchang et Aziz, Mounia et sa mère. Ce Khalil-là ne pouvait être son fils. Quoi qu’imagine Algonde. Quoi que ressente Elora. Il n’avait pas eu le temps de naître, à peine celui de pousser de quelques mois en le ventre de Mounia.
    Bousculé dans ses pensées, il se sentit aspiré, comme arraché de son corps par une main invisible. Il vit s’ouvrir devant lui un long tunnel sombre, illuminé de traits d’argent qui fondaient sur lui telle la pluie au plus fort d’une chevauchée. Puis soudain, lui succédant, les tracés d’une presqu’île en forme de botte que des nuages bas ombrageaient. Il s’imagina oiseau de proie, fondant vers cette terre qui peu à peu grandissait sous lui, jusqu’à faire oublier ses côtes, s’affirmer ses monts et ses vais, ses cours d’eau et ses villes. D’un œil fasciné, il devina Rome, et là, vers Naples, l’host français qui cheminait. Mais c’est vers le nord qu’il se dirigea. Il vit s’approcher une voie pavée. Des roulottes. Puis une seule. Et soudain, il les distingua. Deux enfants qui riaient, assis l’un près de l’autre et menant le bœuf de tractée. Il reconnut les traits d’Algonde sous ceux de la jouvencelle, mais sublimés par une énergie plus grande qui illuminait tout autour d’elle. Elle était grande pour son âge, lui sourit. Le jouvenceau gronda à ses côtés, rageur de la sentir s’échapper en pensée. Enguerrand fut envahi par une tendresse immense. Quelque chose d’absolu qui ne tolérait aucun doute, malgré la vérité des fellahs. Il reconnaissait cette fossette au coin des lèvres, la forme du regard, l’épaisseur de la chevelure, le grain de beauté sur la pommette gauche. Tout en cet enfant lui évoqua Mounia. Il voulut tendre la main pour le toucher, le caresser. Il emprisonna du vide. Ouvrit les yeux.
    La grotte était de nouveau là. Le lac à ses pieds, immobile. Il se trouva désemparé, comme au sortir d’un songe, comme au sortir de ces nuits où il avait rêvé de lui. De sa naissance à ce jour. Comme si les Anciens avaient voulu conserver un lien entre eux, l’empêcher de se perdre totalement, le garder en vie.
    Des larmes inondèrent ses yeux. Il dodelina de la tête, effondré.
    — Ce n’est pas réel. Il ne peut pas être
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