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Elora

Elora

Titel: Elora
Autoren: Mireille Calmel
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réaction de Petit Pierre fut de s’élancer vers ces garnements pour les battre. Il la contint en songeant à sa mère. Il n’avait pas le droit d’être repris. Il avait détourné la tête, se consolant de se dire que les coups laissaient les morts indifférents et que leur dépouille avait déjà été salie par d’autres. Sa colère n’y changerait rien. Il avait traversé le parvis, était entré dans l’église collégiale, avait compté les statues comme Fanette le lui avait demandé. La sixième, tout au fond, saint Antoine de Padoue sur sa stèle rectangulaire. Petit Pierre l’avait gagnée, discrètement, se glissant dans une rangée dès que le moindre bruit résonnait sous la voûte et adoptant, le temps qu’il cesse, l’attitude de prière des quelques âmes qui s’y trouvaient.
    Une fois la statue atteinte, Petit Pierre l’avait contournée puis, en se haussant sur la pointe des pieds, avait enfoncé de son index le petit ergot sous la sandale du saint. Un claquement léger avait répondu au battement de son cœur. Il s’était accroupi, avait poussé la pierre et, sans tarder, s’était glissé à l’intérieur, sous la statue. Huit marches, avait compté Fanette. À la troisième qu’il avait descendue, le passage s’était verrouillé dans son dos. C’est là que ses anciennes peurs l’avaient repris. Il se trouvait dans un noir d’encre et ignorait la manière de déverrouiller l’accès pour revenir en arrière. Ne risquait-il pas de manquer d’air, de se retrouver emmuré ? Il avait dégluti, le cœur en panique, s’était assis sur la dalle le temps de se calmer. Il avait fouillé dans ses souvenirs les dernières minutes passées avec sa mère, revu son visage grave, mais aussi son regard transformé d’amour et de pardon. Il s’était rassuré. Si elle avait voulu se venger de lui, elle n’aurait eu qu’à le laisser à la merci du prévôt. Il s’était levé, avait descendu calmement jusqu’à trouver le plat sous ses souliers. L’endroit, étroit, puait la moisissure et l’humidité. Reprenant courage, il avait cherché le contact des murs de chaque côté, puis avait avancé, fort de la promesse de sa mère de le rejoindre dès qu’elle le pourrait.
    Sa première halte, il l’avait faite une lieue et demie plus loin. Comme Fanette le lui avait affirmé, il avait localisé une porte dans la paroi. Il avait alors récupéré, d’une chaîne à son cou, la clef qu’elle lui avait remise. À tâtons, il l’avait tournée dans la serrure. L’instant d’après, il s’était retrouvé dans la cave d’un castel qui avait autrefois appartenu à l’ordre du Temple et était toujours possession de l’Église. Il s’était servi. Jambon, pommes, réserve de bougies, briquet d’amadou qu’il avait pêle-mêle enfouis dans une besace. À défaut d’eau, il avait ouvert le robinet d’une barrique de bière, empli plusieurs gourdes de peau dénichées dans un coin et visiblement inutilisées depuis longtemps. Il était paré pour continuer sa route. Il avait regagné le souterrain, rabattu puis bouclé la porte, s’était adossé au mur et avait calmé sa faim à la faveur d’une chandelle. Puis, repu, la flamme soufflée par mesure d’économie, il s’était endormi, certain de trouver sa mère à ses côtés à son réveil.
    Elle n’était pas venue. Il avait décidé de patienter le temps qu’il faudrait, rassuré par la présence de cette porte vers l’extérieur et d’un garde-manger conséquent. Il avait fini par perdre toute notion du temps, rompant la monotonie des jours en accumulant des pitreries. Parfois, il entrebâillait la porte, se hasardait au-delà de la resserre. Le castel était petit, bien mal protégé et habité par une famille qui gérait l’intendance dans l’attente, devenue improbable, qu’une délégation d’hospitaliers s’y installe. Le père manquait. C’était lui que Fanette avait égorgé un matin de mars sur la grand-route, quelques années plus tôt. C’était de lui qu’elle tenait le secret du souterrain. Il l’avait avoué en espérant qu’elle s’en contenterait pour prix de sa vie. C’était mal la connaître. Elle avait récupéré la clef comme un trophée, et Petit Pierre l’avait toujours vue pendue à son cou. L’enfant la caressait souvent, comme une prière muette, comptant chaque phase de long sommeil pour un jour. Au bout de la troisième, il s’était rendu à l’évidence que Fanette
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