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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête
Autoren: Michel David
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maintint en place avec ses pinces et se mit en marche vers la
glacière installée dans la cuisine. Dès qu'il fut entré à l'intérieur, Laurette
s'empressa d'aller recouvrir les autres blocs de glace avec la toile goudronnée
que son père avait déplacée avant de retourner à son travail.
     
    Quelques minutes
plus tard, des pleurs provenant de l'avant de la maison attirèrent l'attention
de la jeune fille qui rangeait son balai sur le balcon. Sans rien dire à sa
mère occupée à laver des vêtements, elle se précipita vers la porte cochère et
l'ouvrit. Le spectacle qu'elle découvrit alors la mit hors d'elle.
     
    Aline Ledere, une
frêle adolescente que le voisinage savait être un peu lente, tentait de
repousser en pleurant Antoine Bessette et Marcel Dupré, deux voyous demeurant
dans la rue Champagne. Les jeunes, âgés d'une quinzaine d'années, l'avaient
assaillie au moment où elle revenait de son travail à l'hospice Gamelin. Ils
s'amusaient à la bousculer. Ils avaient d'autant plus de plaisir à le faire
qu'ils
     
    savaient que la
mère de leur victime était encore à l'hôpital.
     
    Laurette n'avait
rien de la faible jeune fille. Elle avait appris depuis longtemps à tenir tête
à ses frères et n'avait jamais hésité à faire usage de l'étonnante force
physique héritée de son père pour se faire respecter.
     
    — Vous allez la
lâcher, oui ! hurla-t-elle en s'avançant vers les deux voyous.
     
    L'un et l'autre
tournèrent à peine la tête dans sa direction.
     
    — Toi, la Brûlé,
mêle-toi de tes maudites affaires ! lui ordonna Dupré avant de se remettre à
bousculer Aline en ricanant.
     
    Avant même qu'il
s'en rende compte, Laurette avait traversé la rue, l'avait saisi par une
oreille et lui avait envoyé une gifle propre à lui arracher la tête. Le vaurien
se retrouva par terre, les quatre fers en l'air, tout étourdi.
     
    Devant
l'impétuosité de l'attaque, Bessette avait lâché sa victime pour faire face à
la jeune fille, un sourire mauvais aux lèvres. S'il pensait intimider la fille
d'Honoré Brûlé, il en fut pour ses frais. Elle fonça sur lui, l'attrapa par les
cheveux et, avant même qu'il puisse esquisser le moindre geste de défense, lui
écrasa le nez d'un solide coup de poing. Stupéfait, le voyou retrouva son
complice par terre en tenant à deux mains son nez ensanglanté.
     
    Aline s'était
recroquevillée contre la porte de l'appartement de ses parents, incapable de se
décider à la déverrouiller.
     
    — Entre chez
vous, Aline, lui commanda Laurette. Ils t'achaleront plus.
     
    Puis, elle se
campa devant les deux vauriens qui se relevaient. Elle s'avança vers le premier
qui s'était remis sur pied, apparemment prête à poursuivre l'affrontement.
     
    — Vous autres,
mes deux écœurants, si vous en voulez encore, je vous attends, les
apostropha-t-elle, menaçante. Si jamais je vous revois l’achaler, je vous
arrache la tête, vous m'entendez ?
     
    Ni l'un ni
l'autre ne manifesta la moindre envie de riposter, ils s'éloignèrent prudemment
de quelques pas avant de lui crier :
     
    — T'es juste une
maudite folle ! Va te faire soigner !
     
    Le pas qu'elle
fit dans leur direction les incita à déguerpir. Laurette, fière d'elle, se
dirigea vers la maison au moment où sa mère ouvrait la porte.
     
    — Veux-tu ben me
dire ce qui se passe ? demanda-t-elle à sa fille. Qui est-ce qui criait comme
ça ?
     
    — Deux bums qui
avaient sauté sur la petite Ledere pour la faire brailler.
     
    — Qu'est-ce qui
est arrivé ?
     
    — Je leur ai
sacré une claque.
     
    — Ben voyons donc
! s'exclama Annette, horrifiée.
     
    — J'étais tout de
même pas pour les laisser la maganer sans rien faire, protesta la jeune fille,
outrée.
     
    — Je veux ben
croire, mais tu vas finir par passer pour un garçon manqué, lui fit remarquer
sa mère sur un ton résigné en refermant la porte derrière sa fille. Qu'est-ce
que t'aurais fait si tous les deux avaient sauté sur toi? Y as-tu pensé ?
     
    — J'aurais bien
voulu voir ça, par exemple ! s'exclama la jeune fille, l'air mauvais. Leur mère
les aurait pas reconnus quand je les aurais lâchés.
     
    Ce soir-là,
lorsque la mère de famille raconta à son mari ce qui était arrivé, Honoré se
contenta de dire en hochant la tête :
     
    — Qu'est-ce que
tu veux que je te dise ? Notre fille est capable de se défendre. On peut tout
de même pas lui reprocher ça, ajouta-t-il en cachant mal sa
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