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C'était de Gaulle, tome 3

C'était de Gaulle, tome 3

Titel: C'était de Gaulle, tome 3
Autoren: Alain Peyrefitte
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gardé de me servir pareil argument. Il savait bien que je lui aurais répondu que ma carrière, à supposer qu'elle dépende d'un changement de poste, m'importait moins que la poursuite de ma tâche actuelle. Je ne suis pas sûr qu'il soit si soucieux du déroulement de ma carrière 9 .

    « Soyez discret. Si vos collègues en faisaient autant ? »
    AP : « Ce que je regrette le plus, mon général, en quittant mes fonctions de porte-parole, c'est de ne plus avoir avec vous ces entretiens si précieux. Et puis, j'avais pris l'habitude de prendre des notes au Conseil des ministres. Me permettrez-vous de continuer à en prendre quelques-unes ?
    GdG. — Que voulez-vous en faire ?
    AP. — Plus tard, beaucoup plus tard, pas avant trente ans, pour l'Histoire.
    GdG. — Soyez discret. Si vos collègues en faisaient autant ? »
    A-t-il voulu dire : « Vous seriez indiscret en insistant pour me demander une pareille dérogation » ? Ou bien : « J'accepte, à condition que vous soyez discret » ? J' ai voulu croire à la seconde version et l'en ai remercié chaleureusement. Il ne m'a pas contredit.
    J'en éprouve comme une joie d'enfant. Ainsi, je vais pouvoir continuer de consigner fidèlement ses interventions, de le suivre pas à pas dans la démarche de sa pensée. Quand il parle, assis à la table en Conseil, c'est pour interroger, alerter, morigéner ou entraîner ses ministres ; c'est pour expliquer l'action de la France dans le tourbillon du monde. Mais, sous le propos divers qu'appelle la circonstance, j'entends toujours les harmoniques de son histoire et de la nôtre. Oreilles et yeux grands ouverts, j'essaie humblement d'en capter le message, dans mon coin, tel le scribe accroupi.
    1 C'est le nom du bureau du Général.
    2 Jusqu'à la fin du septennat, le 8 janvier 1966, je conserve les fonctions de ministre de l'Information, porte-parole.
    3 J'y suis comme ministre chargé du contrôle du cinéma. Y assistent Jean Donnedieu de Vabres, secrétaire général du gouvernement, et Simone Servais, qui suit au cabinet de Pompidou les problèmes de presse et d'information.
    4 Cf. C'était de Gaulle, t. II, VI e partie, ch. 7.
    5 Comme Étienne Burin des Roziers, Georges Galichon, Pierre Maillard, Gilbert Pérol, René de Saint-Légier, Bernard Tricot, Jean-Jacques de Bresson.
    6 Georges Pompidou, Michel Debré, Olivier Guichard, Jacques Foccart, Jacques Chaban-Delmas, Roger Frey.
    7 Rédacteur en chef de Paris-Match.
    8 Un de ces mots de De Gaulle qu'on cite, mais qu'il ne cite jamais lui-même. Les oublie-t-il ? Sûrement pas. Mais il sait qu'on ne les a pas oubliés et qu'ils ont fait leur chemin. Il ne veut pas courir le risque de se répéter.
    Gaston Palewski a été mon prédécesseur à la Recherche.
    9 Roger Belin, secrétaire général du gouvernement, raconte : « 28 novembre 1962: Alain Peyrefitte redevient le porte-parole du gouvernement. Pompidou l'apprécie et est heureux d'avoir un ministre sorti, comme lui, de la grande école de la rue d'Ulm. Cependant, il me dira quelques mois plus tard : "Alain Peyrefitte en fait trop ; il agace le Général." C'est possible, mais je pense que ce sont les longs entretiens que le ministre de l'Information avait, en tête à tête, avec de Gaulle après chaque Conseil des ministres qui agaçaient Pompidou » ( Lorsqu'une République chasse l'autre, 1999, p. 236).

Chapitre 2
    UN MUR D'ÉTUDIANTS
    Avant d'entamer la chronique de ces années qui nous conduisent au terme, et pour les mettre en perspective, je voudrais revenir sur la visite ratée du Général à l'École normale supérieure, en 1959 1 .
    C'est qu'entre-temps j'ai découvert des circonstances qui l'éclairent d'un jour nouveau. Cette lumière n'est pas indifférente à la façon dont de Gaulle, et pas lui seulement, a buté en mai 1968 sur l'« insaisissable ».

    Paris, 21 janvier 1994.
    Mon enquête commence, presque par hasard, sur un plateau de télévision. Quelques anciens élèves de Normale y sont réunis, à l'occasion du bicentenaire de cette vénérable institution. Avec le directeur de l'École, Étienne Guyon, et Pierre-Gilles de Gennes, prix Nobel, j'ai été convié à la fête.

    Jaurès, Péguy, Herriot, Blum, Brossolette, Brasillach, Déat, Sartre, Raymond Aron, Césaire, Pompidou... Comment ne pas évoquer les rapports entre la « rue d' Ulm » et la politique ? De tout temps, au-delà des parcours individuels, si divers, l'Ecole est « à gauche ». Jamais elle ne l'a été plus que
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