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Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1977-1986
Autoren: Michèle Cotta
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été volontaire en 1942 pour aller travailler en Allemagne 4 . Comme le document avait été exhibé par ce torchon d'extrême droite, il n'avait guère fait de bruit dans les autres journaux. On m'a fait l'incroyable récit de la déposition de Georges Marchais à cette occasion : il paraît qu'il s'est interrompu à de nombreuses reprises, la voix brisée de sanglots. Dans la salle d'audience, c'était la stupeur. Eh quoi, ce grand fauve, ce carnassier de la politique, voilà qu'il pleure sur un événement vieux de trente-cinq ans ? Ce débatteur jamais à court d'arguments, voilà qu'il s'embarrasse, qu'il se reprend ? Est-ce parce qu'il apprend que rien n'est plus difficile à défendre que sa propre vérité ? Ne sont-ce pas plutôt les péripéties de ces derniers jours, la rupture avec les socialistes, qui marquent son propre échec, qui l'anéantissent ? La foule des grands jours, venue au Palais de Justice en quête de sensations fortes, s'émeut, les avocats s'interrogent du regard.
    C'est l'épilogue inattendu de la plus dure semaine que la gauche ait vécue depuis 1965.

    4 octobre
    L'Humanité de ce matin donne un écho particulier aux dernières phrases échangées il y a quelques jours avec Michel Debré. Il évoquait avec moi l'attitude des partis socialistes européens, tous sur une autre ligne, plus sociale-démocrate que le parti français. Voici qu'une page entière de L'Huma est consacrée, sous le titre « La main de Bonn », aux pressions internationales qui, à en croire les communistes, ont amené les socialistes à reculer, à se « droitiser », comme disait Elleinstein.
    Il s'agit d'une démonstration consciencieuse, signée Gérard Streiff, du changement de cap du PS. Selon lui, le Parti socialiste français, qui s'était progressivement éloigné de l'Internationale socialiste, a renoué des liens étroits avec elle à partir du congrès de Genève en 1976, congrès au cours duquel François Mitterrand a été élu à la vice-présidence de l'IS. Or, toujours selon l'auteur de l'article, les politiques prônées et suivies par les membres européens de cette Internationale, tous dominés par le Parti social-démocrate allemand (SPD), ne sont pas compatibles avec les engagements du Programme commun de la gauche 5 .
    Le chroniqueur de L'Humanité prend tout son temps pour en arriver à l'estocade finale : François Mitterrand lui-même, et pas seulement Rocard, Delors ou Gilles Martinet, au lendemain des élections cantonales de 1976, a rencontré Willy Brandt 6 . Les deux hommes ont décidé la création de trois groupes de travail, « cela, note Gérard Streiff, alors que le SPD maintient la pratique des interdits conditionnels contre les communistes et autres démocrates, et alors que Schmidt a déclaré quelques jours plus tôt au président du Conseil italien : La présence de communistes dans les gouvernements des pays de la CEE est indésirable ».
    Je ne recopie pas tout le texte, mais la cause est entendue : les communistes rejettent sur les socialistes la responsabilité de la rupture. Le problème est de savoir pourquoi ils dénoncent aujourd'hui, en octobre 1977, un rapprochement des socialistes français avec l'Internationale socialiste qui date de l'année précédente. S'ils pensaient que la situation était si grave, que ne l'ont-ils dit plus tôt ?

    5 octobre
    Je suis toujours abasourdie par cette rupture que je ne parviens pas à m'expliquer. J'ai à ce sujet une longue conversation avec un conseiller municipal communiste d'Antony. Pas n'importe lequel conseiller municipal : il s'agit de Guy Bois 7 , historien, que j'ai connu lorsque j'avais dix-huit ans, à la Cité universitaire, au moment où, ambassadeur de Roland Leroy dans les milieux universitaires, il s'efforçait, dans les années 1960, de juguler les incartades des jeunes Étudiants communistes.
    Pour tous les étudiants, communistes ou pas, Guy Bois, porteur de la bonne parole de Leroy, était à ce moment-là un stalinien grand teint. Il n'empêche, j'étais sensible à son talent : doué d'un véritable art de la persuasion, il tenait des discours sur la nécessité de s'appuyer sur les masses laborieuses et pas sur les caprices d'une petite poignée d'intellectuels, bref, de refuser l'aventurisme de quelques-uns (Bernard Kouchner, de ce point de vue, figurait en filigrane derrière ses descriptions de jeunes bourgeois irresponsables). En fait, il condamnait les gauchistes de 1968
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