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Borgia

Titel: Borgia
Autoren: Michel Zévaco
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lancés au galop.
    Sur l’un d’eux flottait une robe noire : un prêtre ! Sur l’autre, une robe blanche : une femme !
    Presque aussitôt, ils furent sur lui.
    Le jeune Français s’apprêtait à saluer la dame blanche avec toute la grâce que la nature lui avait départie, lorsque à sa grande stupéfaction, elle arrêta net sa monture lancée à fond de train et vint se ranger près de lui.
    – Monsieur, s’écria-t-elle d’une voix tremblante, qui que vous soyez, secourez-moi !…
    – Madame, répondit-il avec chaleur, je suis tout à vous, et si vous voulez me faire l’honneur de me dire en quoi je puis vous servir…
    – Délivrez-moi de cet homme !…
    Du doigt, elle désignait le moine qui s’était arrêté et qui haussait dédaigneusement les épaules.
    – Un homme d’église ! s’exclama le Français.
    – Un démon… Je vous en supplie, faites que je puisse continuer seule mon chemin…
    – Holà, sire moine, vous avez entendu ?…
    L’homme noir ne jeta même pas un coup d’œil sur celui qui lui parlait ainsi et, s’adressant à la jeune femme :
    – Vous vous repentirez amèrement… mais il sera trop tard.
    – Silence, moine ! éclata le jeune cavalier. Silence ou, par le ciel, tu vas faire connaissance avec cette épée !
    – Vous osez menacer un prêtre ? fit le moine d’une voix fielleuse.
    – Vous osez bien, vous, menacer une femme ! Arrière ! Tournez bride à l’instant, ou vous n’aurez plus jamais occasion de menacer qui que ce soit.
    En même temps, le Français tirait son épée et marchait sur le moine. Celui-ci lança au jeune homme un regard de rage affreuse, puis, tournant bride, il s’enfuit au galop dans la direction de Rome. Une minute on put voir son manteau noir qui voltigeait au vent comme les ailes d’un oiseau de malheur. Puis il disparut.
    Le jeune cavalier se retourna alors vers la dame blanche. Il demeura saisi d’admiration.
    C’était une jeune fille d’environ dix-huit ans, d’une merveilleuse beauté. D’admirables cheveux d’un blond cendré encadraient harmonieusement un visage qu’éclairaient deux grands yeux noirs. Une sorte de grâce hautaine se dégageait de toute sa personne.
    À ce moment, la rougeur de l’indignation empourprait son visage et la rendait mille fois plus belle encore. Elle aussi avait suivi des yeux l’affreux moine qui s’envolait comme un hibou.
    – Je vous dois, dit-elle d’une voix pure et chantante, je vous dois toute ma reconnaissance, monsieur… ?
    – Le chevalier de Ragastens, répondit le cavalier en s’inclinant profondément.
    – Un Français !
    – Parisien, madame…
    – Eh bien… monsieur le chevalier de Ragastens, soyez mille fois remercié pour l’immense service…
    – Bien faible service, madame, et j’eusse été heureux de tirer l’épée contre un ennemi sérieux, en l’honneur d’une dame aussi accomplie… Mais pourrais-je savoir pourquoi ce moine…
    – Oh ! c’est bien simple, monsieur, fit la jeune fille qui ne put s’empêcher de frissonner. J’ai commis l’imprudence de m’écarter seule, plus que je ne devais… Cet homme s’est tout à coup approché de moi… Il m’a outragée par ses paroles… j’ai voulu fuir… il m’a poursuivie…
    Il était visible qu’elle ne disait pas toute la vérité.
    – Et vous ne le connaissez pas ? reprit le jeune homme. Elle hésita un instant. Puis, se décidant :
    – Je le connais… pour mon malheur !… C’est le vil instrument d’un homme néfaste et puissant… Oh ! monsieur, vous disiez que c’est là un ennemi peu sérieux… Ce moine est au contraire, pour vous, et dès ce moment, un redoutable ennemi… Si vous le rencontrez, fuyez-le… Si votre destinée est de vous trouver avec lui, n’acceptez rien de lui… Redoutez le verre d’eau qu’il vous offrira, le fruit dont il mangera une moitié devant vous, l’arme qu’il vous priera d’accepter… Redoutez surtout qu’il ne vous fasse saisir et jeter dans quelque oubliette du château Saint-Ange… Le moine que vous venez de voir s’appelle dom Garconio…
    – Madame, reprit le chevalier de Ragastens, je vous rends grâce pour les inquiétudes que vous voulez concevoir à mon sujet… Mais je ne crains rien, ajouta-t-il en se redressant…
    – Il faut que je vous demande un autre service…
    – Parlez, madame !
    – C’est de ne pas chercher à voir de quel côté je me dirige… de ne pas chercher à
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