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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine
Autoren: Alain-Gilles Minella
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Comme le remarque justement Régine Pernoud, Henri II est un despote et le propre des despotes est d’être isolés, de ne s’intéresser qu’à eux-mêmes. Nous ne pouvons rien affirmer des sentiments éprouvés par le roi, si ce n’est, peut-être, une grande incrédulité. Car l’action d’Aliénor, pour ses contemporains, semble difficilement compréhensible, car elle est unique. On trouve assez régulièrement, dans les chroniques et les annales de l’époque, la mention de rébellions de fils contre leur père ; mais jamais d’une femme contre son mari. Et qui plus est d’une reine qui a intimement, délibérément, voulu et œuvré pour la création d’un empire et qui, soudain, met la même détermination à le faire voler en éclats. Car le but recherché est sans conteste celui-là. Chacun de ses fils veut sa part d’héritage et son autonomie ; s’ils obtiennent satisfaction, l’empire, dans ce qu’il a de centralisé, comme l’a voulu Henri, sera de facto anéanti. Restera un royaume anglo-normand et des principautés qui n’auront de lien entre elles que parce que leurs princes sont frères. Qu’est-ce qui a pu pousser Aliénor ? À huit siècles de distance, nous ne pouvons que nous interroger et manifester la même incompréhension que ses contemporains. Est-ce simplement la vengeance amoureuse d’une femme trompée et délaissée, comme beaucoup d’historiens l’ont pensé ? Peut-être, mais l’explication, pour aussi séduisante qu’elle soit, est-elle suffisante ? Il est vrai que ce sont des êtres de pouvoir ; il y a du Shakespeare chez eux. John Gillingham, et après lui Jean Flori, avance la thèse d’une réaction d’Aliénor provoquée par l’hommage rendu par le comte de Toulouse au roi d’Angleterre. La reine considère le comté de Toulouse comme lui revenant de par sa grand-mère. Elle n’a jamais considéré les Saint-Gilles autrement que comme des usurpateurs. L’ordre protocolaire voulu par Henri au moment de la cérémonie d’hommage est très instructif. Le comte de Toulouse a d’abord prêté serment au vieux roi d’Angleterre, puis au jeune, et ensuite seulement à Richard, en tant que duc d’Aquitaine. Cela revient à retirer la suzeraineté sur Toulouse au duc d’Aquitaine. Sans aucun doute, Aliénor a dû en être meurtrie. C’est un affront à ses ancêtres. Mais quelques semaines à peine séparent la cérémonie de la fuite du jeune Henri ; ce n’est pas suffisant pour organiser un complot d’une telle ampleur. On peut aussi évoquer les évolutions diamétralement opposées des personnalités du roi et de la reine, qui font que, peut-être, Aliénor ne reconnaît plus l’homme qu’elle a aimé. Il est malgré tout évident que le pouvoir est au cœur des relations entre Henri et Aliénor. C’est sur ce point qu’elle attaque en cherchant à le lui faire perdre au profit des enfants. Et qui sait, peut-être cherche-t-elle à le récupérer pour elle-même. Bien que née duchesse elle n’a pu exercer ce pouvoir qu’au travers de ses maris. Henri lui refusant cette délégation, pourquoi Aliénor n’aurait-elle pas pensé l’exercer au travers de ses fils ? Mais Aliénor a cinquante ans. Elle ne peut pas savoir qu’elle vivra encore trente ans, elle doit penser au contraire qu’il ne lui reste que quelques années devant elle… cela vaut-il la peine de s’épuiser à gouverner un empire ingouvernable ? Je crois qu’il faut accepter qu’il y a, dans les motivations de la reine, une part d’inconnaissable qui tient aux liens intimes, personnels, qui ont uni Henri et Aliénor. Toutes les raisons que nous venons d’évoquer ne sont que des raisons plus ou moins objectives ; il y a, dans cette action extraordinaire et unique d’Aliénor d’Aquitaine, une part d’irrationnel qui n’appartient qu’à elle. Et à Henri.
    Sitôt connue avec certitude la présence du jeune roi Henri à la cour de France, Henri II envoie des ambassadeurs pour demander à Louis VII de lui renvoyer ce fils félon. C’est l’occasion d’un échange où le roi de France fait une nouvelle fois preuve d’ironie aux dépens de son rival anglais. Aux ambassadeurs ayant fait leur requête, Louis répond : « Qui me fait cette demande ?
    — Le roi d’Angleterre.
    — Le roi d’Angleterre ? Il est ici avec moi et ne m’a rien demandé par vous. Peut-être continuez-vous à appeler » roi » son père, qui a autrefois été roi
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