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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine
Autoren: Alain-Gilles Minella
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lui accorde. Le jeune roi a maintenant dix-huit ans, il veut son indépendance et assumer les fonctions que son père, en le faisant couronner, lui a confiées. Évidemment, Henri II n’a en aucune manière l’intention de céder une partie de son pouvoir et de ses revenus. Et d’ailleurs donner Mirebeau, Loudun et Chinon à un enfant de cinq ans était un moyen de conserver longtemps encore la mainmise sur ces places stratégiques. Henri le Jeune refuse son consentement à la dotation de Jean, prise sur sa propre part, et exige la jouissance de son héritage : Angleterre, Normandie et Anjou ; ou du moins une partie. Le « vieux » roi refuse. Aliénor se tait.
    Henri II pense que l’incident va en rester là. Il connaît son fils, c’est un velléitaire ; un être charmant, beau, intelligent, mais qui n’est pas de taille à s’opposer à son père. Il se promet néanmoins de « reprendre en main » ce jeune homme fougueux qui lui a un peu échappé. Dans les jours qui suivent, le comte de Toulouse demande à rencontrer en secret le roi d’Angleterre. Il s’étonne de l’aveuglement du roi : Henri le Jeune n’est pas le seul à défier son autorité, ses deux autres fils, Richard et Geoffroy, complotent contre lui, et également la reine Aliénor. Le roi accorde un crédit limité aux révélations de Raimond V ; l’homme est lui-même un orfèvre en matière de trahison. Néanmoins cela mérite vigilance. Henri donne des instructions pour que les défenses de ses châteaux soient renforcées. Il décide aussi de sonder l’esprit du jeune roi. Il quitte Limoges sous prétexte d’une partie de chasse en emmenant son fils aîné avec lui et laisse Geoffroy et Richard auprès d’Aliénor. Pendant quelques jours, le père et le fils chevauchent côte à côte, dorment dans la même chambre… Rien ne transparaît dans l’attitude du jeune homme, si ce n’est une certaine rancœur à l’égard de son père ; il est évident que ces deux-là ne s’entendent pas. Mais de là à trahir !
    Ils arrivent à Chinon où ils passent la nuit, toujours dans la même chambre. Au matin, le jeune roi a disparu. On le cherche, il n’est pas dans le château. Henri apprend vite que le pont-levis a été abaissé pendant la nuit et que son fils s’est enfui. Cette fois-ci plus de doute. Il devient vite évident qu’Henri le Jeune est en route pour se réfugier sur les terres de son beau-père, le roi de France. Une course poursuite s’engage mais le vieux roi ne parvient pas à rattraper son fils qui gagne Mortagne, sur le domaine du comte de Dreux, frère de Louis VII. La fuite a été trop bien organisée, Henri se doute immédiatement que son fils n’est pas seul dans l’affaire.
    Il en a la confirmation dans les jours suivants. Richard et Geoffroy se sont eux aussi réfugiés auprès du roi de France, cependant que la révolte gagne. Tous les seigneurs poitevins se soulèvent, expulsant partout les « Anglais », et se déclarent du parti du jeune roi. Si les terres les plus au sud de l’Aquitaine, la Gascogne, restent relativement calmes, le mouvement gagne l’Angleterre ; évêques, barons rejoignent Henri le Jeune… jusqu’au roi Guillaume d’Écosse. Seule la Normandie reste indéfectiblement fidèle au vieux roi. Celui-ci écrit une lettre au pape dans laquelle il se plaint de « la malice de ses fils, que l’esprit d’iniquité a armés contre leur père au point qu’ils considèrent comme une gloire et un triomphe de le poursuivre », et il ajoute : « Mes amis se sont éloignés de moi, mes familiers en veulent à ma vie {63} … » Le roi semble sincèrement abattu. Il a compris que ses fils n’ont pas organisé seuls tout cela, ils sont trop jeunes, trop inexpérimentés. L’affaire a été préparée depuis longtemps, minutieusement montée, tramée de main de maître. Il n’y a qu’une personne capable d’y parvenir : Aliénor. J’aimerais pouvoir penser qu’au moment où il comprend que c’est sa femme qui est derrière cette guerre, Henri mesure combien il a eu tort de la négliger. Il a cru qu’elle se contenterait d’être la duchesse mère d’Aquitaine. Mais Aliénor ne se « contente » pas. Elle est née pour le pouvoir, elle peut le partager mais on ne peut l’en priver. Peut-être Henri a-t-il éprouvé une certaine admiration pour sa femme ? Ou simplement de la haine ? S’en est-il voulu de ne rien avoir vu venir ? Mais le pouvait-il ?
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