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Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine

Titel: Aliénor d'Aquitaine : L'Amour, le pouvoir et la haine
Autoren: Alain-Gilles Minella
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l’affaiblir d’autant. La reine n’a plus qu’un seul objectif, que Richard ait une pleine autonomie dans les terres poitevines et d’Aquitaine ; autrement dit, que celui qu’elle a choisi pour son successeur échappe à l’autorité du roi. La reine fait désormais cavalier seul. Qu’est-ce qui la pousse à agir en ce sens ? L’amour de ce fils qu’elle a somme toute découvert depuis peu et sur lequel elle reporte toute son affection ? La volonté de nuire à Henri et de soustraire l’héritage de ses ancêtres à l’autorité du Plantagenêt ? Le souci de préserver cet héritage des inévitables représailles que la mort de Thomas va provoquer ? Car pour tout le monde, le roi d’Angleterre porte la responsabilité de l’assassinat de l’archevêque. Dès le 25 janvier 1171, Guillaume de Sens, en qualité de légat du pape et avant même d’en avoir reçu l’avis de ce dernier, jette l’interdit sur les territoires continentaux d’Henri II.
    Le roi d’Angleterre doit réagir. Sitôt sorti de son abattement, et tandis que des miracles commencent à se produire sur la tombe de Thomas, Henri envoie des évêques en ambassade auprès du pape pour plaider sa cause. Car il ne fait aucun doute qu’Alexandre III, qui avait beaucoup d’affection pour Thomas, va prendre des sanctions canoniques. L’ambassade rejoint le souverain pontife à Tusculum où il réside. Le pape refuse de les recevoir. Le jeudi saint, il excommunie solennellement « les assassins de l’archevêque, tous ceux qui avaient concouru au crime par conseil, aide ou consentement, ou qui sciemment recevaient de tels hommes dans leurs États ». Alexandre III confirme l’interdit lancé par Guillaume de Sens ainsi que les excommunications prononcées contre trois évêques anglais par Thomas Becket. Le roi d’Angleterre est frappé d’interdit personnel jusqu’au règlement définitif du conflit ; il ne peut participer à aucun office liturgique. Apprenant le détail de la sanction papale, il est soulagé : son royaume n’est pas touché et lui-même s’en tire à bon compte. Il lui faut maintenant trouver le moyen de renverser la situation. C’est le moment de se souvenir que le précédent pape, Adrien IV, lui avait en 1156 donné mission de conquérir l’Irlande et concédé la possession de l’île à titre héréditaire. Qu’y a-t-il de mieux qu’une belle conquête au nom de l’Église pour amadouer le souverain pontife ? Le roi d’Angleterre se lance dans la préparation de l’opération, et, le 17 octobre, ses troupes partent à l’assaut de l’île.
    Aliénor, de son côté, consacre l’année 1171 à faire sortir un peu plus Richard de l’ombre de son père. Peut-on dire que la reine profite des difficultés d’Henri et de son éloignement ? Pourquoi pas ! Point fort de l’année, Richard, en présence de sa mère, pose la première pierre du monastère Saint-Augustin à Limoges. Ils parcourent ensuite l’Aquitaine, ensemble, pour une grande tournée de réconciliation où ils annulent toutes les sanctions et les confiscations décrétées par Henri II à la suite de la révolte des barons. Pour Noël, le jeune duc et la duchesse mère convoquent à leur cour de Poitiers tous leurs vassaux méridionaux ; l’intention est évidente.
    Mais la reine prépare soigneusement un autre événement : le couronnement de Richard duc d’Aquitaine. En effet le jeune homme ne sera véritablement le suzerain de tous les Aquitains qu’après avoir été sacré. Aliénor veut frapper un grand coup. Elle a décidé que jamais cette cérémonie n’aurait connu un tel lustre, allant jusqu’à réveiller d’anciennes traditions. Les buts de la reine sont de plusieurs ordres. Vis-à-vis de ses vassaux, d’abord, elle transmet son héritage à Richard, ce fils qu’elle a choisi et à qui ils doivent désormais obéir ; vis-à-vis du roi de France, ensuite, à qui elle rappelle l’ancienneté et l’indépendance du duché d’Aquitaine – et plus la cérémonie du sacre des ducs d’Aquitaine rivalisera avec la solennité de la cérémonie du sacre des rois de France, plus l’ancienneté du duché sera affirmée ; vis-à-vis d’Henri enfin pour lui montrer que l’Aquitaine ne lui appartient plus, et ce d’autant moins que le couronnement de Richard aura revêtu un faste que le sien n’avait pas connu.
    La cérémonie a lieu en juin 1172. Le jeune duc n’a pas encore quinze ans. Elle se
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