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Une veuve romaine

Une veuve romaine

Titel: Une veuve romaine
Autoren: Lindsey Davis
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m’arrêter pour l’insulter. J’aurais bien d’autres possibilités d’exercer ma rhétorique. Faisant semblant de ne pas le voir, je resserrai mon manteau autour de moi et abaissai mon chapeau sur mes yeux, avant de me faufiler devant lui comme un spectre enveloppé de noir. Tout en sachant pertinemment qu’il s’agissait de moi, il fit un pas en arrière.
    Je fis appel à mes dernières forces et, envahi par une espèce de nostalgie malsaine, je posai le pied sur la première de ces six volées de marches particulièrement déprimantes.

49
    Le désordre régnait partout. Une amphore, barbotée dans la demeure du sénateur, était appuyée à ce qui servait de table. La bonde était retirée. Voilà donc ce qui se passait quand je m’échinais quelque part à mener une enquête… Deux gâteaux en forme de tourterelles, dégoulinants de jus de raisin, étaient posés sur un vieux plat ébréché, bec à bec, comme des amoureux fatigués. L’un d’eux présentait encore assez bien, mais l’autre avait la queue basse – tout comme moi.
    La belle plante qui prétendait prendre mes messages se trouvait sur le balcon, un gobelet de vin à la main, occupée à lire certaines de mes tablettes de cire personnelles. Les seules que je ne voulais pas qu’elle lise. Mes poèmes.
    Elle avait laissé une coupe sur la table, au cas où un visiteur imprévu aurait eu envie d’avaler un vin convenable. J’en profitai pour me servir à boire. Je m’appuyai ensuite contre la porte pliante, et frappai avec la bague ornée de mon sceau. Elle parut ne rien entendre, mais à un léger frémissement de ses cils, je compris que ma présence n’était pas passée inaperçue.
    — Est-ce que Falco habite ici ?
    — Quand il en a envie.
    — J’ai un message.
    — Alors, donne-le-moi.
    — Tu es très belle.
    — Bonsoir, Marcus, dit-elle en levant enfin les yeux.
    Je lui adressai mon plus séduisant sourire.
    — Bonsoir, mignonne. C’est terminé. J’ai fait tout ce qui était possible.
    — Va-t-elle être condamnée ?
    — Non.
    Helena mit ma poésie de côté. Elle avait entassé près d’elle, sur le banc, une petite pyramide d’ouvrages publiés. Elle avait revêtu la plus miteuse de mes tuniques, et glissé ses pieds dans mes chaussons les plus éculés.
    — Ça m’aurait étonné, dis-je, que je ne tombe pas sur une fille qui me pique mes vêtements, et pille ma bibliothèque !
    — Je les tiens de l’oncle Publius. (Elle indiqua d’un geste les parchemins. Je savais que le sénateur avait un frère qui était mort au début de l’année. Disparu en mer  : il avait fait une grosse faute en politique.) On a trouvé tout un bric-à-brac chez lui, en provenance de la province où il avait servi jeune homme.
    — Tu as lu tout ça ce soir ? demandai-je.
    Je commençais à me dire qu’il allait être très coûteux de l’entretenir en lectures.
    — Je les ai seulement parcourus.
    — Tu as trouvé des choses intéressantes ?
    — J’ai lu un passage sur le roi Juba. Il a épousé Cléopâtre Silène, la fille de Marc Antoine. J’ai l’impression que c’était un personnage intéressant – pour un roi. L’un de ces lettrés qui font des études poussées sur des sujets bizarres. Il a écrit un traité sur l’euphorbe, par exemple.
    — Oh ! ce bon vieux Juba !
    — Et l’euphorbe ? Tu es familier avec l’euphorbe ?
    — Naturellement, dis-je. (Mais mon ton signifiait : Je n’ en ai pas la moindre idée. Après un instant, j’ajoutai, avec un sourire caustique :) Euphorbe est le nom d’une plante verte – d’un affreux vert –, avec des feuilles en forme de fer de lance et des fleurs irrégulières.
    Le bec cloué, Helena Justina rapprocha ses sourcils bien dessinés, et son expression était facile à traduire. Elle pensait clairement : Comment cet idiot peut-il avoir entendu parler de l’euphorbe ? Puis j’entendis cette espèce de roucoulement chaleureux, ce rire joyeux qu’elle me réservait, en général pour se moquer de moi.
    — Évidemment ! Tu es le petit-fils d’un jardinier.
    — Je peux être plein de surprises ! déclarai-je, sur la défensive.
    — Tu es astucieux, déclara Helena, en m’enveloppant d’un regard attendri.
    — Je m’intéresse à des tas de choses. Et je sais lire. Je lis tout ce qui me tombe sous la main. Si tu laisses traîner ces manuscrits ici, je serai devenu un expert sur le roi Juba avant la fin des calendes.
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