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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier
Autoren: Robert Margerit
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Legendre, ses dix mois de détention. Pendant ce temps, Claude avait eu les plus grandes difficultés, au nouveau Comité de Sûreté générale, à faire remettre en liberté Pierre Dumas, enfin relâché, reparti pour Limoges. En revanche, les proscrits du 31 mai, et parmi eux les députés limousins girondistes, étaient délivrés, réintégrés dans la Convention. On voyait reparaître Lanjuinais retour de Bretagne, et le petit Louvet qui avait trouvé moyen, au printemps, de fuir Paris avec sa Lodoïska pour se réfugier dans les montagnes du Jura.
    La réaction s’étendait à la province. Elle se faisait très violente dans le Midi. À Limoges, on se contentait de désarmer comme terroristes et d’arrêter les tyranneaux limousins, d’abord les Frègebois, les Janni, les Préat. M. Mounier, lui-même quelque peu compromis par son jacobinisme, ne put empêcher l’arrestation, d’ailleurs temporaire, de l’homme aux lunettes qui alla occuper pendant quelques semaines, à la Visitation, la place de Montaudon libéré comme M. de Reilhac, comme M. Delmay et Marcellin, comme Thérèse Naurissane. Les comités locaux demeurant toujours dans l’hôtel du boulevard de la Pyramide, Thérèse et sa sœur la religieuse, se retirèrent chez leurs parents à Thias, en attendant le retour de Naurissane, sain et sauf en Gironde. Dans tout ce milieu, les seules victimes de la Terreur avaient été les moins désignées apparemment : l’infortunée Léonarde et, par contrecoup, Jean-Baptiste Montégut qui se mourait irrémédiablement de chagrin.
    Claude assistait avec une sorte de stupeur à la démolition, jour après jour, de tout l’édifice jacobin. Sorti, au renouvellement de fructidor, du Comité où ne restaient plus, avec les nouveaux venus, que Carnot, Prieur, Robert Lindet, il siégeait, impuissant, dans la Convention dominée par la droite reconstituée, la Plaine et quelques Montagnards, dont Fréron devenu anti-jacobin fanatique. Avec Billaud-Varenne et Collot, Claude s’efforçait, au club, de résister à cette frénésie. Ni lui ni eux ne parvenaient à rendre son énergie à la vieille Société. Elle s’était détruite elle-même à coups de guillotine. La jeunesse dorée de Fréron, où se distinguait entre autres le ci-devant marquis de Saint-Hurugue, sorti de prison aussi muscadin qu’il avait été enragé, avait beau jeu de persécuter les « carmagnoles », de les poursuivre dans les rues, de monter contre eux des chienlits tournant parfois à l’émeute. Ils ramenaient dans Paris une atmosphère de guerre civile. C’était au tour de Claude de ne plus sortir sans pistolets. Enfin, Fréron, prétendant que ces troubles trouvaient leur source aux Jacobins, obtint de la Convention la fermeture de leur local. Comble d’ironie, ce fut Claude, président en exercice, qui dut remettre la clef de l’antique édifice aux commissaires du Comité de Sûreté générale. Et l’un d’eux était qui ? Legendre.
    Ce soir-là, dans la nuit d’hiver tôt venue, rencontrant Sieyès à l’entrée du café Payen, Claude lui confia son désarroi et son amertume. « Patience, mon ami ! répondit l’ex-aumônier de Mesdames. Fais comme moi, attends. Tu vois, je me tais encore. La réaction était inévitable, il faut la laisser s’user. C’est la dernière écume de la Révolution. Bientôt viendra le temps des sages, le temps d’établir cet État idéal dont nous rêvions, avec Larevellière-Lépeaux et Lanjuinais, au premier comité de constitution. Nous avons tous les quatre réussi à vivre jusqu’ici. Crois-moi, c’est une grande victoire. »
    Claude rentra rue Nicaise un peu réconforté. La naissance de son fils ou de sa fille était imminente. Sitôt après les relevailles, on marierait Claudine et Bernard qu’elle et son père ramenaient, en ce moment, à petites étapes, d’un hôpital de Liège. En franchissant l’Ourthe, avec Jourdan et l’armée de Sambre-et-Meuse, sous un tir à mitraille qui n’avait pas duré moins de cinq heures, Bernard avait eu la jambe gauche cassée par une balle. Une des plus terribles affaires de toute la campagne. Les eaux étaient rouges de sang français. Mais une fois de plus les Autrichiens avaient dû battre en retraite. À présent, Jourdan occupait toute la rive gauche du Rhin. La Belgique, la Hollande tombaient par grands morceaux devant Kléber, Marceau, Pichegru. Une chose au moins était sûre : quel que fût au-dedans
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