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Un vent d'acier

Un vent d'acier

Titel: Un vent d'acier
Autoren: Robert Margerit
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Robespierre, morts tous les trois ainsi que Couthon.
    « Et Saint-Just ? demanda-t-on.
    — Il n’a pas résisté. »
    Claude s’en alla sur ces funèbres informations. Mais la Convention tenait toujours sa séance. Léonard Bourdon vint lui rendre compte, accompagné de Méda. Il sollicita la permission de le faire monter avec lui à la tribune, et le présenta ainsi : « Ce brave gendarme ne m’a pas quitté. Il a tué de sa main deux des conspirateurs. » On applaudit longuement. Le Léopard complétait ses informations fantaisistes : « À notre approche, les citoyens égarés ont ouvert les yeux, et les lâches ont fui. Nous avons trouvé Robespierre aîné armé d’un couteau, que le brave gendarme lui a arraché. Il a aussi frappé Couthon qui était aussi armé d’un couteau. Saint-Just et Le Bas sont pris. Dumas et quinze ou vingt autres conspirateurs sont enfermés dans une chambre de la Maison commune qui est bien gardée. »
    Bourdon et Méda, comme Merlin de Thionville, croyaient Robespierre et Couthon morts – et pour cause ! En revanche ils ignoraient le suicide de Le Bas : ils n’avaient pénétré ni l’un ni l’autre dans l’arrière-salle. Ils ne savaient pas que Couthon, enlevé à des grenadiers qui le traînaient par les pieds pour le jeter à la Seine, attendait, évanoui sur une civière. Augustin, gravement blessé dans sa chute, avait été porté sur une chaise, par quelques citoyens, à la section de la Commune, avec deux hommes sur lesquels il était tombé. Des chirurgiens lui découvrirent des blessures à la tête, une fracture du bassin, et l’estimèrent tout près de rendre l’âme. Barras ne l’en fit pas moins diriger sur le Comité de Sûreté générale. Couthon fut envoyé à l’Hôtel-Dieu, Robespierre à la Convention, Le Bas au proche cimetière Saint-Paul pour y être inhumé.
    Lorsque, peu avant trois heures du matin, Charlier, occupant le fauteuil, fut informé que l’on apportait Robespierre, blessé mais vivant encore : « Le lâche Robespierre est là, dit-il aux représentants. Voulez-vous qu’il entre ?
    — Non, non ! se récria l’Assemblée.
    — La présence d’un tyran ne peut porter que la peste, déclara Thuriot. La place marquée pour lui et ses complices est la place de la Révolution. Les deux Comités doivent prendre les mesures nécessaires pour que le glaive de la loi frappe sans délai ces conspirateurs. »
    Presque tous les membres des deux Comités, sûrs à présent de n’avoir plus rien à craindre, étaient, comme Claude, rentrés chez eux pour se reposer après ces quarante-huit heures épuisantes. On décida de faire déposer le tyran au Comité de Salut public, en attendant que celui-ci reprît séance. Et l’Assemblée leva enfin la sienne, la renvoyant à neuf heures du matin.
    Il n’y avait rien au pavillon de Flore pour recevoir un blessé. Dans l’antisalle, les banquettes étaient trop étroites pour qu’on l’y couchât. On retira en hâte papiers et encriers du bureau des secrétaires, une grande table en acajou, et l’on étendit Maximilien sur le dessus de cuir vert. Au-dessus du « tyran », dans cette antichambre où il avait si souvent passé, où il s’était emporté à l’annonce du rapport sur la Mère de Dieu, Apollon, peint par Mignard, recevait en souriant Minerve et ses suivantes représentant les quatre parties du monde. Comme dans le salon voisin, des filets d’or encadraient les boiseries blanc mat, mais salies ici, éraflées par les baïonnettes. Les deux hautes fenêtres sans rideaux laissaient voir le Jardin national dont les frondaisons commençaient de se détacher de la nuit.
    Maximilien n’apercevait rien de tout cela. Les yeux clos, la tête soutenue par une caissette ayant contenu des échantillons de pain soumis à Claude et Prieur par les fournisseurs militaires, il demeurait immobile et comme mort, livide, la chevelure dépoudrée, la cravate enlevée, la chemise ouverte, tachée de pourpre comme l’habit bleu barbeau où le sang faisait des plaques violettes. La poitrine se soulevait faiblement. Une des mains retenait un étui de peau blanche, un étui de pistolet, portant imprimé en or le nom de son possesseur : un certain Archier. Maximilien avait ramassé sans doute ce petit sac à l’Hôtel de ville, pour tamponner sa blessure. La peau blanche était maculée de sang.
    Au bout d’une heure, Robespierre ouvrit les yeux. Les soldats le gardaient.
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