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Un caprice de Bonaparte

Un caprice de Bonaparte

Titel: Un caprice de Bonaparte
Autoren: Stefan Zweig
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puissent voir le général de si bonne humeur !
     
    PREMIER SOLDAT.
     
    Et lui, ce n’est pas souvent qu’il peut se mettre sous la dent une crêpe aussi excellente.
     
    FOURÈS, à Bellilotte, qui s’assied, tout émue.
    On dirait que tu trembles, ma parole ! Qu’est-ce qui t’arrive ?
     
    BELLILOTTE.
     
    On est mal à l’aise sous le regard de cet homme... On dirait qu’il veut vous traverser !
     
    PREMIER SOLDAT, tout en mangeant.
     
    Je connais ça ! On est tout chose, la première fois ! Ça vous va jusqu’aux orteils ce coup d’œil qu’il vous lance. On dirait qu’il veut savoir ce qui se passe dans vos entrailles. Mais aujourd’hui il était de bon poil... la première fois depuis Aboukir !
     
    DESCHAMPS.
     
    C’est à notre brave Bellilotte que nous le devons : elle sait répandre la joie autour d’elle. Buvons à sasanté ! ( Ils trinquent bruyamment. ) Et maintenant hourra pour tous les François... et pour celui-ci spécialement !
     
    (Ils trinquent encore une fois.)
     
    PREMIER SOLDAT.
     
    Aïe ! Il n’y a plus de vin...
     
    DEUXIEME SOLDAT.
     
    Et plus de crêpes ! Mais c’était épatant quand même !
     
    DESCHAMPS.
     
    Maintenant il faut desservir ! Fini de bavarder et de s’amuser, les gars ! Et réveil à quatre heures demain matin. Que personne ne manque à l’appel !
     
    PREMIER SOLDAT.
     
    Vous tracassez pas, citoyen lieutenant. Et, avec tous nos respects, merci.
     
    (Les soldats finissent de desservir et se retirent.)
     
    DUPUY descend l’escalier et s’approche comme par hasard du groupe formé par Bellilote, Fourès et Deschamps.
     
    Alors, ce festin s’est bien terminé ? Ils ont eu de la veine aujourd’hui, nos gaillards... ( Avec un rire forcé. ) Plus de veine que moi, citoyenne Fourès, car vos crêpes, il faut que je les paie maintenant... Figurez-vousque le général a vanté votre talent à ma femme... et vous savez que lorsqu’on fait devant une femme l’éloge d’une autre, on pique son amour-propre... A présent elle n’en démord pas et veut à tout prix vous montrer qu’elle n’est pas inférieure dans ce domaine-là. C’est pourquoi, citoyenne Fourès, ma femme vous invite à déjeuner avec nous demain. ( Bellilotte lance un regard étonné à Fourès. ) Vous ne refuserez pas cette invitation, citoyenne !
     
    BELLILOTTE, embarrassée.
     
    Mais comment... comment me permettrais-je de déjeuner avec vous, citoyen commandant ? Non, excusez-moi, ce n’est pas possible...
     
    FOURÈS.
     
    Mon petit, si le citoyen commandant te fait l’honneur de t’inviter...
     
    BELLILOTTE, se défendant énergiquement.
     
    Oh ! non, citoyen commandant, je ne peux pas accepter... Veuillez remercier la citoyenne Dupuy, mais cela n’est pas possible... Comment oserais-je... Non, ma place serait plutôt à la cuisine qu’à votre table ! Je décevrais sûrement Mme Dupuy. Non, commandant. Je vous remercie de tout cœur et excusez-moi...
     
    DUPUY, coupant court et sur un ton autoritaire.
     
    Pas de remerciements ni d’excuses, citoyenne Fourès ! Nous comptons absolument sur vous demain à déjeuner. Ma femme vous attend sans faute à une heure.

    (Il salue tout le monde et s’en va.)
     
    BELLILOTTE, effrayée.
     
    C’est idiot tout ça ! Va vite le rattraper, François, et explique-lui : je ne peux pas et ne veux pas aller chez eux !
     
    FOURÈS, étonné.
     
    Mais pourquoi donc ? Je ne te comprends pas, mon petit !
     
    BELLILOTTE.
     
    Et moi non plus, je ne te comprends pas, François ! Tu me crois capable de pareille vilenie ? Aller manger chez des gens qui m’invitent moi et pas toi ? Pourquoi ne t’ont-ils pas invité toi aussi ?
     
    FOURÈS.
     
    Mais, mon enfant, tu n’y penses pas... Moi, lieutenant, à la table de l’état-major ? Qu’est-ce que tu t’imagines ? Je ne m’y vois pas...
     
    BELLILOTTE,.
     
    Alors je ne m’y vois pas non plus... Toi et moi, nous ne faisons qu’un ! S’ils me trouvent assez bien pour manger avec eux, tu l’es au moins autant, bon Dieu !... Et puis après, qu’est-ce qu’il me veut ? Il ment comme un arracheur de dents quand il dit que sa femme veut me connaître... Il y a longtemps que je la connais de vue, cette péronnelle, qui est pressée de se détourner lorsqu’elle me rencontre. Dieu sait ce qui lui passe parle ciboulot, peut-être le général lui a-t-il dit quelque chose... Mais qu’est-ce que ça peut bien me faire ? Ainsi, de but
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