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Titus

Titus

Titel: Titus
Autoren: Max Gallo
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son corps.
    Elle a fait quelques pas et l’on s’est écarté devant elle. Elle semblait ne pas marcher, mais frôler le sol.
    Elle a incliné la tête vers Titus, puis s’est détournée, rejoignant le groupe des femmes au milieu desquelles j’ai reconnu Cénis, l’affranchie, l’épouse de Vespasien.
    Plus tard, j’ai su que cette femme dont je n’avais pu oublier la silhouette était la reine Bérénice, « la reine juive », ainsi qu’on l’appelait, la sœur du roi Agrippa, lui aussi présent à Ptolémaïs.
    Ils étaient l’un et l’autre les alliés de Rome et je les ai vus et entendus le soir même, dans la grande salle du palais, saluer Vespasien, appeler de leurs vœux sa victoire, et Agrippa annoncer que de nouvelles troupes – des frondeurs, des archers, des cavaliers – qu’il avait rassemblées dans son royaume, au nord de la Galilée, autour du lac de Tibériade, étaient en marche afin de gagner Ptolémaïs et de se placer sous les ordres de Flavius Vespasien, au service de Rome.
     
    J’ai repensé à Léda, la fille de Yohanna Ben Zacchari.
    Qui défendait le mieux le peuple de Judée ?
    Qui préservait l’avenir des Juifs et de leur religion : ceux qui avaient engagé la guerre contre Rome, puissante et invincible, ou ceux qui, comme Bérénice et Agrippa, et Yohanna Ben Zacchari, avaient choisi de la servir et ainsi de survivre ?
    Mais qui, quand une guerre commençait, pouvait être assuré d’échapper à la mort ?
    Quel Juif – même le roi Agrippa, et même la reine Bérénice – pouvait être assuré de ne pas être humilié, vaincu, réduit en esclavage et même tué, confondu avec son peuple ?
     
    Les jours suivants, en marchant dans la ville, bousculé par les soldats, je sentais leur envie de piller, de tuer. Ils en tremblaient de désir.
    Un matin, Vespasien les a tous réunis le long du rivage. Ils dessinaient une épaisse ligne noire, faite de cuir et de métal. L’éclat des armes, des casques, des cuirasses éblouissait. On eût dit que cette armée de soixante mille hommes venait de surgir des profondeurs de la mer et que, encore ruisselante, elle brillait sous le soleil.
    Je me trouvais non loin de Vespasien et de Titus, sur l’estrade qu’il avait fait dresser face à la mer, devant le front des troupes. À quelques pas de moi j’apercevais la reine Bérénice, et je ne pouvais m’empêcher de l’observer.
    Elle regardait droit devant elle, vers l’horizon, semblant ignorer les troupes qui lui faisaient face, les officiers qui l’entouraient. Elle croisait les bras, d’épais bracelets ceignant ses poignets, des bagues à chacun de ses longs doigts qui s’échappaient du voile blanc qu’elle portait ce matin-là et qui faisait ressortir son teint mat.
    Elle est restée ainsi immobile cependant que les troupes hurlaient leur cri de guerre, saluaient Flavius Vespasien et Titus lorsque, faisant un pas sur l’estrade et se détachant ainsi, ils ont annoncé que l’on allait quitter Ptolémaïs pour entrer en Galilée, en conquérir toutes les cités, et d’abord Jotapata, la plus fortifiée, tous les bourgs et tous les villages, les détruire s’ils résistaient, et ravager les campagnes. Le butin serait immense et équitablement réparti, tout comme les prisonniers. Chaque soldat aurait sa part de grain, d’or, d’hommes et de femmes !
    Les cris avaient redoublé, les auxiliaires hurlant plus fort encore que les légionnaires, comme s’ils voulaient faire oublier qu’ils étaient de ce pays, de ce peuple même qu’on allait livrer à l’armée romaine à laquelle ils servaient de rabatteurs, chiens féroces attendant la curée.
    Les soldats ont levé le bras droit, paume ouverte. C’était comme autant de serments qu’ils prêtaient.
    Ceux de vaincre, de piller, de tuer.
     
    Une nouvelle fois, j’ai pensé à Léda, la fille de Yohanna Ben Zacchari.
    Puis j’ai regardé la reine Bérénice, figée dans son attitude méprisante et souveraine, vers qui se dirigeait Titus.

 
     
5
    Je me suis approché de Titus, immobile en face de Bérénice. Il se tenait les bras le long du corps et j’ai remarqué ses mains larges aux doigts écartés, comme s’il s’apprêtait à saisir Bérénice par la taille ou les épaules.
    J’ai effleuré son poignet.
    L’estrade s’était peu à peu vidée. Tribuns et légats, préfets et centurions avaient rejoint les légions, les centuries, les cohortes qui, le long du rivage, commençaient
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