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Taï-pan

Taï-pan

Titel: Taï-pan
Autoren: James Clavell
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d’Orient. Glessing ne manquait pas un numéro. C’était bien écrit. Il estimait qu’il était important de posséder un bon journal. Important que les campagnes soient bien rapportées, pour la plus grande gloire de l’Angleterre. Mais Skinner était un homme reposant. Lui et tous les autres. Enfin, pas tous. Pas le vieil Aristote Quance.
    Glessing regarda l’affreux petit homme, assis tout seul, à l’écart, sur une petite éminence surplombant la plage, devant un chevalet et manifestement en train de peindre avec acharnement. L’officier rit en se rappelant les bons moments passés à Macao avec le peintre.
    Glessing n’aimait personne, sur cette plage, à part Quance et Horatio Sinclair. Horatio avait le même âge que lui et Glessing avait appris à bien le connaître depuis deux ans qu’il était en Orient. Horatio était aussi l’aide de camp de Longstaff, son interprète et son secrétaire – le seul Anglais d’Orient sachant parler couramment le chinois, et l’écrire – et ils avaient eu à travailler ensemble.
    Le regard de Glessing balaya la plage et il vit, avec déplaisir, qu’Horatio était au bord de l’eau en train de bavarder avec un Autrichien, Wolfgang Mauss, un homme qu’il méprisait. Le révérend Mauss était le seul Européen d’Orient à parler et à écrire le chinois. C’était un colosse à barbe noire, un prêtre défroqué devenu l’interprète de Struan, et trafiquant d’opium. Il avait des pistolets à sa ceinture et les basques de son habit étaient moisies. Son nez était rouge et bulbeux et ses cheveux poivre et sel aussi embroussaillés que sa barbe. Les quelques dents qui lui restaient étaient noircies et cassées, et ses yeux au regard intense surprenaient dans le visage grossier.
    Quel contraste avec Horatio, songeait Glessing. Horatio était blond, frêle et aussi propre que Nelson, en l’honneur de qui il avait été prénommé, à cause de Trafalgar et de son oncle qui y avait trouvé la mort…
    Ils avaient pris dans leur conversation un grand et svelte Eurasien, un jeune homme nommé Gordon Chen, que Glessing ne connaissait que de vue et qui était le bâtard de Struan.
    Bon Dieu, grommela à part soi l’officier de marine, comment un Anglais ose-t-il exhiber si effrontément ses bâtards ? Et celui-là s’habillait comme tous les sacrés païens du diable, en longue robe, avec une fichue queue de cheveux dans le dos. Bon Dieu ! Sans ses yeux bleus et sa peau claire, on ne saurait pas du tout qu’il a du sang anglais. Pourquoi le fichu bougre ne se coupe-t-il pas les cheveux comme un homme ? Écœurant !
    Glessing se détourna d’eux. Probable que le sang-mêlé n’est pas méchant, ce n’est pas sa faute. Mais le damné Mauss est de bien mauvaise compagnie. Mauvais pour Horatio et mauvais pour sa sœur, la chère Mary. Là oui, c’était une jeune demoiselle qui valait la peine d’être connue. Elle ferait une bonne épouse, bon Dieu !
    Il arrêta son va-et-vient. C’était la première fois qu’il considérait Mary comme une épouse éventuelle.
    Pourquoi pas ? se demanda-t-il. Ça fait deux ans que tu la connais. La perle de Macao. Elle dirige à merveille la maison Sinclair, et traite Horatio comme un prince. C’est l’endroit de la ville où l’on mange le mieux et elle mène ses serviteurs de main de maître. Elle joue de la harpe comme un ange et chante de même, par Dieu. Tu lui plais, c’est visible, sinon pourquoi serais-tu invité en permanence à dîner chaque fois que tu es à Macao avec Horatio ? Alors, pourquoi ne pas l’épouser, hein ? Seulement elle n’a jamais vécu chez nous. Elle a passé toute sa vie au milieu des païens. Elle n’a pas de dot. Les parents sont morts. Mais qu’est-ce que ça peut faire ? Le révérend Sinclair était respecté dans l’Asie tout entière, de son vivant, et Mary est belle et n’a que vingt ans. Mes espérances sont parfaites. Je touche cinq cents livres par an et j’hériterai le manoir et les terres, un jour ou l’autre. Bon Dieu, elle pourrait bien être la femme pour moi. Nous pourrions nous marier à Macao, à l’église anglaise, et louer une maison jusqu’à la fin de mon engagement, et ensuite nous rentrerions chez nous. Le moment venu, je m’en vais dire à Horatio : « Horatio, mon vieux, j’ai à te parler… »
    « Dites-moi, capitaine Glessing, qu’est-ce qu’on attend ? À huit heures, qu’on avait dit que ce serait le lever des
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