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Ridicule

Ridicule

Titel: Ridicule
Autoren: Remi Waterhouse
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trublion. Dès lors, les catastrophes s’étaient succédé, pour la plus grande joie des autres propriétaires du pays.
    Un projet de mariage de Grégoire avec Mlle de Virieux, la fille de son plus proche voisin, fut oublié, et la jeune fille exilée dans un couvent pour la seule faute d’avoir été promise à un futur banni. Les gens de « bon ton » avaient rayé les Ponceludon de Malavoy de leurs listes dès la prise en main des affaires par Grégoire. La mère et le fils n’étaient plus invités aux soupers assommants que donnaient des marquis épais pour parler de chasse, ou des « bougres » qui, à les entendre, peuplaient Versailles.
    Le domaine, qui n’avait jamais été riche, offrait un spectacle de totale faillite. Le « béton », n’étant plus ni ramolli ni fertilisé par l’eau, était devenu une croûte d’argile impénétrable par la charrue. Avoine, orge, blé, seigle, toutes les tentatives pour semer s’étaient soldées par des moissons calamiteuses. Des épis rares et malformés leur avaient valu les mines goguenardes de tous les « carpiers » du pays.
    — Au moins, nos étangs n’évaporent-ils plus leurs miasmes empoisonnés ! Au moins, ne tuons nous personne ! avait un jour dit à sa mère le jeune ingénieur en contemplant le désastre.
    Maintenant, à l’heure où le dernier-né des Ponceludon allait partir affronter Versailles, elle pensait avec un pincement au coeur à la première mission diplomatique de Gaston. La nostalgie n’y était pas pour peu, bien sûr, mais les récits du diplomate à son retour, son soulagement de retrouver le monde « civilisé », revenaient à sa mémoire. Elle avait lu La Bruyère, Gracian et tous les chroniqueurs de la cour, et n’avait guère le désir d’y envoyer son fils. Elle le mit seulement en garde contre les bandes de « blanc-poudrés » portant l’épée, qui, au spectacle, s’amusaient à bastonner les bourgeois, ou à provoquer en duel les petits nobles de province.
    — Je n’aurai guère de temps à leur consacrer, mère, dit Grégoire.
    Après de brèves effusions, il s’éloigna en direction du nord, en emportant dans ses fontes une veste et une culotte de ratine, l’habit de cérémonie de moire bleue de son père — avec le tricorne de soie bordé de plumes d’autruche —, les plans d’irrigation de la Dombes asséchée, quelques paires de bas de laine et deux paires de bas de soie, ainsi qu’un carton à perruque. À quoi s’ajoutaient une lunette de marine, un pistolet anglais, et, cousus à l’intérieur de son manteau, cinquante louis d’or. Dans sa poche, le De Natura Rerum de Lucrèce annoté par son père, un canif de chasse et une lettre de recommandation de sa mère pour le comte de Blayac, vieil ami du baron, ainsi que ses « papiers » généalogiques.
    Les deux hommes avaient combattu ensemble au désastre de Rossbach et s’étaient revus avec plaisir durant les ambassades de Gaston à la cour de France. Ce fut lors d’une visite des époux à l’ancien compagnon d’armes que naquit Grégoire. Amédée, comte de Blayac, fut arrosé, alors qu’il tenait le nouveau-né, d’un jet puissant qui fit l’admiration de la victime comme des nourrices. Il avait eu la bonté d’en rire.
    Douze ans après — mais Grégoire ne s’en souvenait guère plus — Amédée avait fait le voyage en Dombes pour enterrer son camarade. Fort de ces touchants détails, Ponceludon devait être à même de susciter la sympathie d’un vieil homme, qui n’était peut-être plus aussi proche des cercles du pouvoir que sous le règne du feu roi, mais demeurait, selon Éléonore, une personne d’influence.
    Le jeune hobereau mit pied à terre devant l’église de Joyeux, où il trouva le père Timonier en train de réparer un banc. Le bonhomme sortit prononcer le compliment d’usage sur Butor, et une rapide bénédiction. Ponceludon les accepta tous deux avec un sourire poli.
    — Débarrasse-nous de ces maudits étangs, Grégoire. Nous n’aurons plus ni fièvre ni carpes ! Comment peut-on faire mourir tant de gens pour un poisson qui a tant d’arêtes ?
    Il embrassa Ponceludon avant qu’il ne remonte Butor.
    — C’est l’Horror Sylvaticum des moines et leur voracité qui nous ont empoissonnés  ! lança Ponceludon en riant. Nos ancêtres chassaient dans des forêts fraîches et joyeuses !
    — La quête de lumière et de pureté s’accommode mal de forêts païennes sombres comme
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