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Retour à Soledad

Retour à Soledad

Titel: Retour à Soledad
Autoren: Maurice Denuzière
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à Mme de Saint-Forin. Il se demanda si sa mère, qu'il avait déjà informée de son mariage avec la descendante d'une Indienne des îles et d'un aristocrate anglais, aurait jamais l'occasion de voir ce petit-fils, né d'une métis qu'elle devait tenir pour une demi-sauvage !
     

    Deux semaines après avoir mis son enfant au monde, Ounca Lou put regagner le toit conjugal dans le Cornfieldshire. En bonne chrétienne, membre de l'Église anglicane, elle tint à ce que l'enfant fût baptisé dans les meilleursdélais.
     
    Lamia, installée à Cornfield Manor pour être plus proche de sa filleule à qui elle rendait visite chaque jour, observa qu'Ounca Lou ayant du sang arawak dans les veines, il convenait d'informer au plus vite le cacique des Taino de cette naissance, afin qu'il vînt voir l'enfant pour lui assurer, suivant la coutume, la protection des esprits.
     
    – Nos indigènes voient en Ounca une heureuse alliance du sang anglais et du sang arawak. Ils apprécieront ce geste. Ne pas inviter Maoti-Mata à être parmi les premiers à voir votre fils serait offensant pour toute la communauté indienne, dit Lamia.
     
    Cela fit sourire Charles. Il savait combien Old Gentleman restait attaché à ses prérogatives de cacique de la communauté des Taino et des Arawak, dernier rempart spirituel et coutumier des Indiens dans une colonie britannique où beaucoup de colons et de fonctionnaires, qui tenaient encore les indigènes pour des sauvages, auraient dû s'inspirer de la considération sincère que lord Simon portait à Maoti-Mata et à son innombrable progéniture.
     
    – Le pasteur Russell sera, suivant le souhait de ma femme, le premier à officier, mais l'enfant étant de père catholique, Paul Taval, qui entend ne pas être en reste, va descendre de son ermitage pour oindre le nouveau-né. Cela fait déjà beaucoup, fit observer l'ingénieur.
     
    – Abondance de bénédictions ne peut nuire, dit Lamia.
     
    – Ainsi, tous les dieux veilleront sur notre fils, ajouta Ounca Lou, conciliante.
     
    Charles dépêcha aussitôt Timbo, porteur d'un message protocolaire au village des Taino.
     
    Maoti-Mata se présenta le soir même, précédé de son batteur de tambour, comme chaque fois qu'il se déplaçait dans l'île à l'occasion d'une cérémonie. Il était accompagné d'une de ses nombreuses filles, de son plus jeune fils et d'une demi-douzaine de petits-enfants. En costume d'apparat, il offrit à l'enfançon, avec la gravité d'un Roi mage, une pierre polie représentant le fruit tricoque du yucca, symbole de la première plante que le dieu Yocahu donna aux Taino pour qu'ils puissent se nourrir, durant leur vie terrestre et après la mort.
     
    – Tant que ton fils conservera ce fruit de pierre, il ne connaîtra pas la faim, assura le cacique.
     
    Ayant parlé, Maoti-Mata mâchonna une graine de peyotl que lui présentait sa fille dans une sébile de bois et se recueillit, les yeux clos, la main frôlant sans la toucher la tête du nouveau-né. La plante hallucinogène ayant sans doute fait son effet, il ouvrit le livre à la couverture de peau d'iguane fatiguée que portait son plus jeune fils.
     
    – Le tonalamatl, le vieux livre des Destinées, hérité des Aztèques, que les Taino emportèrent dans l'exil quand les Carib les chassèrent du bassin de l'Orénoque. Il va permettre à Old Gentleman de nous dire le jour prochain où vous devrez révéler les prénoms de l'enfant. Car il compte bien, étant donné que sa mère a du sang arawak, voir figurer dans la liste un nom taino, souffla Kermor à l'oreille de Charles.
     
    Le dire d'Uncle Dave se vérifia quand Maoti-Mata proposa, en plus des prénoms que l'enfant recevrait à la pleine lune d'août – telle était la date imposée par le livre sacré –, d'ajouter, pour satisfaire les mannes des ancêtres arawak de sa mère, le prénom de Pacal, nom d'un ancien roi maya.
     
    Avant de quitter les Desteyrac, le cacique noua au poignet du bébé un bout de corde noire destiné à le protéger des mauvais esprits. Puis, la fille de Maoti-Mata remit à Ounca Lou une pièce rectangulaire de toile peinte, pourvue aux deux extrémités d'araignées de cordelettes qui permettraient de la suspendre entre deux supports pour coucher et bercer le nouveau-né.
     
    – C'est un hamac, ha-mak en langue des Taino, ou hamaca en espagnol, une très ancienne invention que revendiquent les Arawak, bien qu'Asclépiade, médecin grec mort en 50
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