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Retour à l'Ouest

Retour à l'Ouest

Titel: Retour à l'Ouest
Autoren: Victor Serge
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l’Occident
    Victor Serge arrive à Bruxelles le 17 avril 1936, accompagné
de sa femme Liouba (rendue folle par les persécutions en URSS), de son fils
Vlady (seize ans) et de sa fille Jeannine (un an). Ils sont accueillis à la
gare par un vieux camarade anarchiste russe, Nicolas Lazarévitch [6] . Ils prennent leur
premier repas à la soupe populaire de la municipalité et les Soviétiques en
sont éblouis après des années de privations : « Chez nous c’est un
repas de haut fonctionnaire du parti ! [7]  »
Le lendemain arrive de Paris Magdeleine Paz, cheville ouvrière de la campagne
internationale pour sa libération, une campagne qui a duré trois ans avant de
se terminer par ce « miracle de solidarité ». En effet, la libération
de Serge est un événement exceptionnel car « jamais le régime ne lâche un
opposant » ! Au point que Walter Krivitski, ancien chef de l’espionnage
soviétique passé à l’Ouest, soupçonnera Serge d’être un agent soviétique ;
mais en fait Staline a laissé partir deux autres communistes étrangers d’opposition :
le Yougoslave d’origine croate Anton Ciliga et l’Espagnol Andrés Nin (le futur
fondateur du POUM, assassiné par les staliniens en mai 1937) [8] .
    On sait qu’à Moscou, en juillet 1935, Romain Rolland, sous
la pression d’amis comme Jean-Richard Bloch, parla du cas Victor Serge à
Staline lui-même lors de leur entretien au Kremlin. Le « Chef génial »,
bien informé, avait vraisemblablement déjà décidé la libération (ou plutôt l’expulsion)
de cet écrivain étranger gênant afin de calmer l’opinion de gauche à peu de
frais [9] . Mais où l’envoyer ?
Apatride de naissance car né à Bruxelles de parents russes exilés, expulsé de
France à la fin de sa peine de prison suite à l’affaire des bandits tragiques, connu
comme agitateur en Allemagne et en Espagne, pour Serge, comme pour Trotski
avant lui, la planète est « sans visa » [10] . Après huit mois
de vaines tentatives faites par ses amis, un permis de séjour belge (avec des
restrictions politiques) est accordé à Serge grâce aux interventions de Charles
Plisnier, Georges Duhamel et Émile Vandervelde. « J’étais voué […] à la
prison et à la déportation à perpétuité. Ce que l’amitié et la solidarité ont
fait pour moi est très grand et constitue, par le temps qui court, une belle
réussite », écrit-il à
La Révolution
prolétarienne
lors de sa libération, et il ajoute : « J’ai
laissé derrière moi en Russie une foule de militants durement, indéfiniment, implacablement
persécutés pour le seul "crime de pensée", parce qu’ils ne vivent que
pour la révolution…
Il faut penser à eux
sans cesse
[11]
. »
    Dès son arrivée en Occident, Serge est l’objet de pressions
de la part du Guépéou. On arrête en URSS des membres de sa belle-famille, désormais
otages. On refuse de lui rendre ses manuscrits (dont deux romans achevés, un
recueil de poèmes, les notes pour la suite de son
An I de la Révolution russe)
pourtant visés par la
censure (le Glavlit) et saisis à la frontière polonaise. La Sûreté belge l’accuse,
d’après les journaux, de « faire de l’agitation parmi les mineurs »
du Borinage, violant ainsi les restrictions de son visa. Sa maison est
ouvertement surveillée, tandis que pleuvent les dénonciations. Tout est fait
pour rendre impuissant ce témoin trop bien informé. De plus, devant la menace
de l’Allemagne nazie et suite à la récente alliance franco-russe (pacte
Laval-Staline de mai 1935), on ne veut pas entendre critiquer l’URSS de Staline
à gauche. « Les amis qui venaient me voir de Paris me disaient : "N’écrivez
rien sur la Russie, vous seriez peut-être trop amer… Nous sommes alliés au
parti communiste, il entraîne des masses magnifiques. La Russie reste pour eux
une pure étoile… D’ailleurs on ne vous croirait pas. " » En revanche
un autre ami, Boris Souvarine, lui conseille : « La vérité toute nue,
le plus fortement possible, le plus brutalement possible ! Nous assistons
à un débordement d’imbécillité dangereuse ! » [12] C’est précisément
ce qu’il fit.
    En octobre 1936 on retire à Serge et à sa famille la
nationalité soviétique (la seule qu’il ait jamais eue) suite à la publication
aux éditions Spartacus de son analyse du premier procès-spectacle de Moscou,
Seize fusillés à Moscou : où va la révolution
russe ?
Puis une campagne
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