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Remède pour un charlatan

Remède pour un charlatan

Titel: Remède pour un charlatan
Autoren: Caroline Roe
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Yusuf eut le temps de faire un écart. La statuette évita son crâne et rencontra son épaule gauche. La douleur parcourut toute la longueur de son bras et remonta au cerveau avec une intensité fulgurante. Avant même qu’il pût crier, les ténèbres l’engloutirent.
    — Cela le calmera pendant que je m’occupe de son maître, dit Lup. Maintenant va me chercher la fille.
    Le bruit de la chute de Yusuf et les froides paroles de Lup permirent à Isaac de situer assez précisément ce dernier. Il se retourna et saisit le petit banc par une extrémité. Il fit un pas en avant et frappa dans la direction de la voix. Le banc heurta son ennemi. Isaac entendit Lup jurer et trébucher, et il se prépara à frapper à nouveau.
    — Qu’essayes-tu de faire, pitoyable aveugle ? dit Lup en se baissant pour éviter le coup et en brandissant la statuette.
    Yusuf émergea des ténèbres, la bouche pâteuse d’avoir sombré dans l’inconscience. Il ouvrit un œil. Son épaule vibrait d’une douleur cuisante, et son bras gauche ne répondait plus. Les deux hommes s’étaient éloignés de l’escalier, et Lup avait reculé sur un petit tapis au dessin élaboré.
    Ce tapis avait été offert l’année précédente à Marieta par un commerçant itinérant qui disposait de plus de marchandises que d’argent. Même s’il ne paraissait pas à sa place dans cette salle et menaçait en permanence de faire trébucher, Marieta l’appréciait beaucoup. Il donnait à sa maison une touche d’élégance, bien nécessaire vu la nature sordide de son métier.
    Yusuf se rapprocha en rampant. Il tendit la main et saisit par un coin le tapis de Marieta. Au moment où Isaac balançait à nouveau le banc et que Lup brandissait le cheval de bois pour frapper le médecin, le garçon tira d’un coup sec le tapis sur le sol carrelé.
    Lup tituba, fit un pas pour recouvrer son équilibre et, comme bien d’autres avant lui, glissa. Dans sa chute, il se rattrapa à une torchère, l’arracha au mur et tomba lourdement. La bougie s’éteignit, les plongeant une fois de plus dans l’obscurité. Au même moment, Guillem criait depuis la porte d’entrée de la maison :
    — Elle est partie ! Je ne la trouve nulle part ! Qu’est-ce que je vais faire ?
     
    Le portier de l’évêque considéra les deux femmes et le jeune homme qui attendaient sur les marches du palais et secoua la tête.
    — C’est la fête de la Sant Narcis, protesta-t-il avec ressentiment. Son Excellence est à table et ne peut voir personne ce soir.
    — Écoutez-moi, mon brave homme, dit Daniel de son ton le plus assuré. Nous…
    — Balivernes ! l’interrompit Judith. Il nous recevra. Allez dire à Son Excellence que vous avez refusé le passage à la femme de son médecin, à sa fille et à leur escorte. Vous verrez alors ce qu’il advient. Et vous le regretterez.
    — Qu’y a-t-il, Matteu ? demanda une voix derrière lui.
    — C’est une femme qui prétend être l’épouse du médecin, accompagnée de sa fille et de quelqu’un d’autre, répondit Matteu.
    — Eh bien, fais-les entrer, dit Francesc Monterranes. Son Excellence voudra les voir. Vite !
    Le portier s’écarta, vaincu, et les conduisit à l’intérieur du palais.
    — Votre mère pourrait abattre les murailles de Jéricho, fit remarquer Daniel alors qu’ils suivaient Judith dans la grande salle.
    — Et elle n’a pas besoin de trompette, murmura Raquel, amusée malgré la boule de terreur qui lui nouait l’estomac.
     
    Le capitaine de la garde de l’évêque portait un regard très dur sur son subalterne.
    — Redites-moi, s’écria-t-il d’une voix vibrante de fureur, mais plus vite cette fois, ce que vous avez fait !
    — Oui, mon capitaine. Certainement. J’ai reçu votre message disant que maître Pons Manet resterait chez lui ce soir et nous ordonnant d’annuler notre surveillance de l’établissement de Marieta à Sant Feliu. Selon les instructions, nous sommes allés chez lui et y avons posté des hommes de garde. Quand ce fut fait, je suis revenu au rapport.
    — Mais quel message, Pere ? Il n’y a eu aucun message, répliqua froidement le capitaine. Seul un imbécile de votre trempe peut tomber dans un panneau aussi grossier. Arnau ! rugit-il. Rassemblez une escouade et partez immédiatement pour la maison de Marieta, à Sant Feliu ! Je m’occuperai de votre cas demain matin, Pere.
    Un messager passa la tête dans la pièce.
    — Un message de la
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