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Néron

Néron

Titel: Néron
Autoren: Max Gallo
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lit de Lucius Domitius un serpent qui ressemblait à un dragon, et ils s’étaient enfuis.
    L’on avait bien trouvé, au matin, la dépouille d’un serpent enroulée autour de l’oreiller de l’enfant.
    Agrippine avait fait enchâsser cette peau tachetée dans un bracelet d’or qu’elle avait glissé au poignet de son fils.
    Un jour, il l’avait brandi devant moi en soulevant le bras comme pour se protéger.
     
    Mais je n’étais d’aucune conspiration. Je ne me mêlais à aucune intrigue. J’étais seulement le disciple de mon maître Sénèque, et cela suffisait, il est vrai, pour faire de moi, comme lui, un suspect.
     
    Quand l’empereur Claude décida d’exiler Sénèque en Corse pour satisfaire à l’aversion de Messaline, qui voyait en lui le conseiller d’Agrippine, je fus condamné à le suivre.
    L’enfant, Lucius Domitius, celui qu’on allait nommer Néron, avait alors à peine plus de quatre ans.
    Mais il arborait souvent l’expression de celui qui sait qu’il faut se méfier de tous ceux qui l’approchent, les séduire d’un sourire pour les désarmer, puis les frapper sans pitié. Je l’avais vu s’acharner à battre de ses petits poings un esclave qui avait trébuché devant lui et l’avait heurté.
    Ce n’était plus l’enfant craintif, anxieux, dissimulé, que j’avais connu, mais un petit fauve enragé. En lui coulait bien le sang de César.
    J’avais quitté Rome peu après pour gagner la Corse en compagnie de Sénèque.

 
     
     
     
     
DEUXIÈME PARTIE

 
     
5
    Je n’ai pas vécu longtemps dans cette île austère et sauvage.
    Je n’avais pas été condamné à l’exil, comme Sénèque, et celui-ci, après quelques semaines, m’invita à regagner Rome.
    Je fus plutôt surpris et déçu par son attitude et ses propos. Nous marchions sur un sentier qui, au milieu des épineux, surplombait les rochers déchiquetés par la mer. Sénèque m’avait empoigné le haut du bras et le serrait avec une impatience proche de la fébrilité.
    Il voulait, disait-il, qu’à Rome je plaide sa cause auprès de l’empereur et obtienne sa grâce.
    Il s’était arrêté tout en continuant de me serrer le bras. De la main gauche il me montrait les pentes couvertes de taillis épais, impénétrables, les huttes de pierre où vivaient des bergers plus frustes que le dernier des esclaves de Rome, des hommes aussi rudes et cruels que s’ils eussent appartenu aux tribus les plus barbares.
    — Que valent ici mon éloquence, ma sagesse, ma rhétorique ? À qui puis-je m’adresser ? Aux vagues, aux moutons ? À ces hommes bestiaux ?
    Il s’était remis à marcher en m’entraînant.
    Je devais expliquer à l’empereur Claude que lui, Sénèque, était prêt à mettre son prestige et son autorité, sa réputation de philosophe et de plaideur, de rhétoricien rigoureux, au service de la politique impériale.
    — Vois Claude ou l’un de ses affranchis, avait-il continué, Narcisse, son secrétaire, ou Pallas, son surintendant. Rencontre Messaline.
    J’avais baissé la tête pour dissimuler ma déception.
    Ainsi, c’était aussi cela, un philosophe, un sage, un stoïcien ? Seulement un homme désireux de retrouver la gloire et les commodités de la ville, et ce pouvoir dont je l’avais tant de fois entendu dénoncer les corruptions ?
     
    J’étais d’autant plus surpris que nous savions, par les quelques voyageurs et courriers qui arrivaient de Rome, que Claude était tout aussi cruel et débauché que Caligula. Son épouse Messaline, ses affranchis, ses eunuques se jouaient de lui, le flattaient, l’effrayaient pour obtenir tout ce qu’ils désiraient.
    Narcisse et Pallas avaient accumulé une immense fortune. Pallas avait été élevé aux fonctions de questeur et de préteur. Lui, l’affranchi, qui pillait le trésor impérial à son profit, traitait ses esclaves comme le plus brutal, le plus inique des maîtres, faisant couper les mains, crever les yeux, trancher la langue de ceux qu’il soupçonnait de l’espionner ou de le voler.
    Quant à Claude, il vivait dans la peur, ne se déplaçant qu’entouré d’une garde prétorienne, faisant fouiller tous ceux qui l’approchaient ou les villas dans lesquelles il pénétrait, craignant autant le poignard que le poison.
    Puis, tout à coup, il paraissait perdre conscience, oublier sa dignité impériale, les décisions qu’il avait prises. Il s’emplissait la panse au cours de festins qui duraient des jours et
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