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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre
Autoren: Anne Perry
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« monsieur » était de pure politesse, et qu’il n’engageait en
rien l’opinion personnelle du domestique.
    — Bonjour, répondit Pitt, très à l’aise. Je m’appelle
Thomas Pitt. J’aimerais m’entretenir avec le général Balantyne d’une affaire
urgente. Sinon je ne me serais pas permis de me présenter à sa porte sans m’assurer
que je ne le dérangeais pas.
    Le valet tiqua : le visiteur avait devancé sa repartie.
    — Le général Balantyne ne reçoit pas nécessairement
tous les gens qui se présentent à sa porte, Mr. Pitt, dit-il encore plus
sèchement, tout en jaugeant d’un œil critique sa tenue débraillée.
    Ce visiteur n’était pas une personne de qualité, en dépit de
son langage châtié. Ses vêtements ne venaient pas de chez un tailleur, cela
sautait aux yeux, et il ne devait point avoir de domestique, car un valet digne
de ce nom se serait tranché la gorge plutôt que de laisser son maître sortir
avec un gilet qui ne serait pas assorti à la chemise. Quant à la veste, un vrai
désastre ! Et la cravate… Ah, la cravate ! Elle avait dû être nouée
par un aveugle possédant deux mains gauches.
    — Je suis désolé, répéta-t-il, plus sûr de son fait, mais
le général Balantyne ne reçoit pas sans rendez-vous, à moins évidemment qu’il
ne s’agisse d’un intime. Vous pourriez peut-être lui écrire une lettre, ou la
faire rédiger par quelqu’un…
    Suggérer qu’il était illettré ! Il ne manquait plus que
cela !
    — Je connais bien le général Balantyne, répliqua Pitt. Il
s’agit d’une affaire de police. Si vous préférez bavarder sur le pas de la
porte, libre à vous. Mais j’imagine que votre maître aimerait mieux que cela se
passe à l’intérieur. Ce serait tout de même plus discret, non ?
    Le valet ne put dissimuler un tressaillement de surprise. Avoir
affaire à la police et, qui plus est, sur le seuil de la maison était ce qui
pouvait lui arriver de pire. Maudit soit cet impertinent individu ! Très
vite, il recouvra ses esprits, mais hélas, même debout sur la marche plus
élevée du perron, il ne pouvait regarder Pitt de haut, car celui-ci était
beaucoup plus grand que lui.
    — Si c’est à propos d’un vol, vous devriez passer par l’entrée
de service, maugréa-t-il. Le majordome vous recevra, au cas où cela serait
vraiment nécessaire.
    — Il ne s’agit pas d’un vol, riposta Pitt, glacial, mais
d’une affaire criminelle. Et c’est avec le général en personne que je désire m’entretenir,
pas avec le majordome. Imaginez sa réaction si vous m’obligiez à revenir avec
un mandat…
    Le valet sut reconnaître sa défaite. Il battit en retraite.
    — Si vous voulez bien me suivre et patienter dans le
salon, dit-il, omettant le « monsieur » à dessein, le général vous
recevra quand il sera prêt.
    Il traversa le hall d’un air digne et ouvrit la porte d’un
vaste salon. Dans la cheminée rougeoyaient quelques braises répandant une
tiédeur hélas insuffisante à réchauffer les doigts engourdis de Pitt et à
traverser l’épaisseur de ses vêtements pour lui apporter un peu de chaleur.
    Le valet regarda les cendres chaudes avec un petit sourire
satisfait, puis tourna les talons et quitta la pièce en refermant derrière lui
la porte de bois cirée, sans même inviter Pitt à lui laisser son chapeau et son
manteau. Cinq minutes plus tard, il était de retour. Il prit le manteau, le
cache-col et le couvre-chef du policier d’un air pincé et le pria de suivre la
femme de chambre jusqu’à la bibliothèque.
    Là, un grand feu illuminait d’écarlate les reliures de cuir
des livres alignés sur les rayonnages et faisait briller les trophées de guerre
accrochés au mur. Le général se tenait debout derrière sa table de travail
jonchée d’encriers, de porte-plume, de presse-papiers, de livres ouverts ;
on y voyait aussi un canon miniature en cuivre, réplique exacte de ceux de la
guerre de Crimée. Il n’avait pas vraiment changé depuis leur dernière rencontre :
épaules larges, port de tête fier et altier ; ses cheveux châtain clair
commençaient peut-être à grisonner. Mais ce que l’on remarquait avant tout chez
lui, c’était la forte ossature de son visage.
    — Eh bien, Mr. Pitt ? lança-t-il, très carré.
    Le général était incapable de mettre des formes devant un
interlocuteur. Toute sa vie, il avait respecté la rigueur militaire, même face
à la peur et à la grande
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