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l'incendie de Rome

l'incendie de Rome

Titel: l'incendie de Rome
Autoren: Jean-François Nahmias
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côtés, une petite forme était enveloppée dans un linge. La sage-femme lui avait dit que c’était un garçon. Il n’avait pas voulu voir à quoi il ressemblait…
    Lucius Gemellus détourna les yeux de la vision sanglante qui s’offrait à lui un peu plus loin. Ce drame l’avait laissé totalement désemparé. Alors qu’il était jusque-là d'un naturel insouciant, il avait été soudain accablé de questions auxquelles il ne pouvait répondre. Marcia était la douceur et la gaieté mêmes, quelle faute avait-elle commise pour connaître un sort aussi cruel ? Et ce petit être, quel mal avait-il fait pour que les dieux ne lui permettent même pas de voir le jour ? Il était resté seul avec ses interrogations sans réponse. Avec le temps, sa douleur s'était estompée, mais elle revenait avec une terrible intensité aux moments les plus inattendus, comme en cet instant précis. Il savait bien que tout cela ne durerait pas toute la vie. Il était jeune, il fonderait un jour une autre famille. Mais il savait aussi qu'il resterait marqué à jamais par ce drame.
    Tandis qu'on emmenait enfin la bête abattue, qu'une vingtaine de soldats avaient hissée avec peine sur un chariot, Lucius Gemellus, pour échapper à ses pensées noires, se mit à détailler l'estrade où avaient pris place les personnalités. Il connaissait tous ces gens, de vue bien sûr, mais aussi de réputation, car, bien que Tigellin ne le lui ait pas demandé, il avait pris soin d'écouter tous les ragots de la cour. Il estimait indispensable de savoir qui étaient les gens qui entouraient l'empereur ou, du moins, quelle réputation ils avaient.
    Poppée était la seule, à part Tigellin, avec qui il avait eu l'occasion de s'entretenir. Outre qu'elle était présente à son mariage, elle avait tenu, après la mort de Marcia, à lui dire quelques mots de sympathie, qui l'avaient beaucoup touché. Par la suite, il lui était arrivé de la croiser, mais elle ne lui avait plus adressé la parole. La familiarité impériale avait ses limites. Poppée était d'un genre de beauté peu commune pour une Romaine. Elle était plate comme un garçon et blonde comme les blés, avec une chevelure extraordinaire sur laquelle Marcia s'extasiait souvent : lumineuse, ondoyante, qui l'entourait comme un halo. Son teint était tout aussi remarquable : d'une blancheur extraordinaire. Pour l'entretenir, elle se baignait chaque jour dans le lait de cinq cents ânesses. Les bêtes occupaient tout un bâtiment, dans les jardins du palais. Pourtant, malgré sa beauté, le peuple n'aimait pas Poppée. Lucius avait enquêté sur elle à la demande de Tigellin et, à son grand regret, il n'avait recueilli que des critiques. En fait, les Romains se méfiaient d'elle parce qu'elle avait six ans de plus que l'empereur. Ils craignaient qu'étant plus âgée, elle ait un trop grand ascendant sur lui, ce qui, pourtant, n'était pas le cas.
    Un peu en retrait par rapport à elle, se tenait Tigellin. Dès leur première rencontre mouvementée, Lucius avait éprouvé de la sympathie pour lui et leurs relations depuis n'avaient fait que le renforcer dans ce sentiment. Cet ancien marin au physique massif et énergique avait pris sur ses épaules la charge du pouvoir dont Néron ne voulait pas. En peu de temps, il était ainsi devenu tout-puissant. Il aurait pu en profiter pour se comporter en despote, mais il restait simple et ouvert. Il se voulait seulement un serviteur de l'État.
    Lucius n'avait, certes, pas la même estime pour Sénéque, dont il apercevait la frêle silhouette, à côté de celle, imposante, de Néron. C’était sur lui que couraient le plus d’anecdotes déplaisantes à la cour et ces rumeurs n’étaient sans doute pas sans fondement. Il avait été le précepteur de l’empereur et il était toujours son conseiller, même si Néron n’en faisait qu’à sa tête. Il se voulait la conscience de la cour, voire de son temps, et adoptait en public un ton sentencieux, parfois insupportable. Un drôle de personnage, ce Sénèque ! Il se disait stoïcien et il était l’auteur de doctes ouvrages, mais sa vie n’était guère en rapport avec sa philosophie. Il prêchait le mépris des richesses, ce qui ne l’avait pas empêché d’accumuler une fortune depuis qu’il côtoyait le pouvoir ; il condamnait l’esclavage, mais il faisait travailler des milliers d’esclaves dans ses propriétés d’Italie et ses exploitations
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