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L'immature

L'immature

Titel: L'immature
Autoren: Alain Garot
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de rire. La rage au cœur, je cogne sur les murs de toutes mes forces. Des gens arrivent alors, de partout, et m’encerclent. Puis un gars au crâne chauve sort du lot et se jette sur moi.
— Pas de blague, me dit-il, et retourne gentiment dans ta chambre !
J’aurais dû faire attention et, surtout, ne pas m’agiter. A présent, ils ont beau jeu puisque je suis un fou dangereux. Du reste, l’infirmier chauve m’annonce la couleur:
— La prochaine fois, ce sera la camisole!
La camisole de force, je sais ce que c’est, croyez-moi. Un jour, à Busigny, on l’a mise à la mère Legris. Vous parlez d’un peuple dans la rue ! Bien que je n’aie guère envie de discuter avec mon voisin, je lui demande tout de même s’il y a longtemps qu’il est ici.
— Ah là là... Ah là là ! fait-il.
Je me dis que cela commence mal; cependant, je ne me décourage pas.
— Et c’est quel service ici ?
— Les fous ! dit-il.
Sur le coup j’ai froid dans le dos. Je reprends:
— Mais vous n’êtes pas …
— Moi, si je suis fou ? Jamais ils ne voudront comprendre. Tu m’entends, gamin : jamais ! Je me force à rester calme. Je me fais aussi doux qu’un agneau. Même quand j’ai envie de gueuler. Parce que, figure-toi... cela fait des jours et des jours que je suis là.
Mon drôle de voisin frappe alors trois coups sur la barre de son lit ; puis il prête une oreille attentive et recommence. Comme cela cinq ou six fois. Je lui demande:
— Et vous appelez qui ?
— Suzette, voyons. Tu devrais savoir.
Je pense que Suzette doit être une infirmière. Mais pourquoi donc l’appeler ainsi ?
Mon voisin s’est recouché. C’est lui qui m’observe à présent, et j’ai du mal à vivre le lourd silence qui s’installe tout à coup. Alors je lui dis:
— J’ai pris des cachets... Mais je me suis raté !
— Oh moi, me coupe-t-il, c’est ma femme qui a voulu m’empoisonner.
— Votre femme ?
— Parfaitement ! Et je suis même à peu près certain, avec tout ce que je sais sur elle, que ça la dérange de me savoir en vie. C’est pour ça qu’elle fait la sourde oreille.
Je ne comprends vraiment pas grand-chose à son histoire.
— Déjà, reprend-il, quand je bricolais le transistor et que j’entendais les cloches de l’église, elle ne voulait pas me croire. Et puis, la nuit, je la voyais se relever : je la guettais. J’ai bien repéré son petit manège.
— Quel manège ?
— La drogue, pardi ! Les petits bouts verts.
— Comme j’ouvrais de grands yeux, il poursuivit:
— Toutes mes cigarettes ont été droguées. Et même que j’ai fait analyser plusieurs filtres. Pas étonnant que je dormais toujours. Et le café ? La meilleure, celle-là ! Un jour, j’ai bien ri. Pendant que ma bourgeoise avait le dos tourné, j’ai inversé les tasses. Il faut voir comme elle a dormi.
Cela me laissait perplexe.
— Dommage qu’ils n’aient pas voulu me croire, dit-il. Même le curé, il était là aussi. J’ai tout expliqué aux gendarmes. Je leur ai montré le transistor, les filtres de mes gauloises. Mais l’ambulance est arrivée, je n’aurais pas dû me laisser embarquer.
— Ne vous en faites pas, lui dis-je encore, on va bientôt sortir.
— Si tu crois celle-là !
— Ma mère va venir. Je lui dirai toute votre histoire. On la croira, elle !
— Aucune visite ici, garçon : c’est la neuro !
— Pas de visite ?
Mon sang ne fit qu’un tour.
— Strictement interdit, poursuit-il. Du reste, les portes sont toujours fermées. Trois bons tours.
Je baisse la tête, désespéré. Et l’angoisse me reprend. J’ouvre la porte de ma chambre, je crie dans le couloir:
— Je veux sortir ! Je veux sortir !
Arrivent encore deux infirmiers que je supplie à genoux. Auront-ils pitié d’un pauvre gosse comme moi ? Me laisseront-ils sortir ?
— Alors fiston, on s’agite ?
— Messieurs, dis-je, laissez-moi retourner chez moi.
— Tu en parleras au docteur. Nous, on ne peut rien faire pour toi.
— Alors je veux voir le docteur... tout de suite !
— Du calme petit, du calme ! Aujourd’hui le médecin ne passe pas.
Je comprends que je n’aurai jamais assez de courage pour vivre jusqu’à demain. Tête basse, je me mets à sangloter. Mais ici, pas de sentiment. Une paire de gifles et va te recoucher ! Habitué qu’il doit être à ce genre de scénario, mon voisin n’a pas bronché. De longues minutes passent et il se remet à cogner sur les barres du lit. Doucement je ferme les
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