Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Lettres - Tome II

Lettres - Tome II

Titel: Lettres - Tome II
Autoren: Pline le Jeune
Vom Netzwerk:
« Quittons la route, dis-je, pendant qu’on y voit encore, de peur que, renversés au passage de la foule qui nous suit, nous ne soyons écrasés dans les ténèbres. » À peine étions-nous assis, que ce fut la nuit, non pas une nuit sans lune ou voilée de nuages, mais la nuit d’une chambre close, toute lumière éteinte. On entendait les gémissements des femmes, les pleurs des petits enfants, les cris des hommes ; les uns appelaient leurs parents, les autres leurs enfants, d’autres leurs époux, et cherchaient à les reconnaître à la voix. Ceux-ci s’apitoyaient sur leur propre sort, ceux-là sur le destin de leurs proches. Certains par crainte de la mort imploraient la mort. Beaucoup tendaient les mains vers les dieux, d’autres plus nombreux pensaient qu’il n’y avait plus de dieux du tout et que cette nuit serait éternelle, serait la dernière pour l’univers. Il s’en trouvait même pour ajouter aux dangers réels des terreurs imaginaires et fausses. Des gens arrivaient disant qu’à Misène telle maison s’était écroulée, telle autre brûlait ; bruits mensongers auxquels on ajoutait foi. Le ciel s’éclaira faiblement ; nous y vîmes l’indice non pas du retour de la lumière, mais de l’approche du feu. Ce feu cependant s’arrêta assez loin, les ténèbres revinrent, et voilà de nouveau la cendre, abondante et lourde ; nous nous levions de temps en temps pour la secouer, sinon nous aurions été ensevelis et écrasés sous son poids. Je pourrais me vanter de n’avoir laissé échapper au milieu de tels périls ni une plainte, ni une parole trahissant de la faiblesse, si la conviction que je périssais avec l’univers, et l’univers avec moi, si faible, ne m’eût apporté une grande consolation de ma condition mortelle. Enfin cette sombre vapeur s’éclaircit et se dissipa comme une fumée ou un brouillard. Puis le jour véritable reparut, le soleil même brilla, mais d’une lumière pâle, comme celle qu’il répand dans une éclipse. À nos yeux encore clignotants tous les objets apparaissaient changés et couverts d’une épaisse couche de cendre, comme d’un manteau de neige. Nous revînmes à Misène et après y avoir réparé nos forces de notre mieux, nous passâmes la nuit dans l’attente, partagés entre la crainte et l’espérance. La crainte cependant l’emportait ; car les tremblements de terre persistaient, et la plupart, égarés, se plaisaient à exagérer par de terrifiantes prédictions et leurs maux et ceux d’autrui. Cependant, même alors, malgré les périls déjà courus, malgré les périls attendus encore, il ne nous vint pas la pensée de nous éloigner, avant d’avoir des nouvelles de mon oncle.
    Ces détails ne méritent pas les honneurs de l’histoire et vous ne les ferez pas entrer dans vos ouvrages ; lisez-les cependant et ne vous en prenez qu’à vous, qui les avez réclamés, s’ils ne vous paraissent pas même dignes d’une lettre. Adieu.
     
    XXI. – C. PLINE SALUE SON CHER CANINIUS.
    Succès de Verginius Romanus dans le genre comique.
     
    Je suis de ceux qui admirent les anciens, sans cependant mépriser, comme certains, les talents de notre époque. Car il n’est pas vrai que la nature, comme si elle était lassée et épuisée, n’enfante plus rien d’estimable. En voici une preuve : je viens d’entendre Vergilius Romanus qui lisait à quelques amis une comédie écrite sur le modèle de la comédie ancienne et si bien réussie, qu’elle pourra un jour servir de modèle. Je ne sais si vous connaissez Romanus, cependant vous devez le connaître, car la pureté de ses mœurs, la finesse de son esprit, la variété de ses ouvrages le font remarquer. Il a écrit des mimes en vers iambiques {16} pleins de légèreté, de vivacité, de grâce et même éloquents dans leur genre (car il n’est pas de genre qui, porté à sa perfection, ne puisse être appelé éloquent) ; il a écrit des comédies dans lesquelles il rivalise avec Ménandre et les autres poètes de la même époque. On pourrait les ranger parmi celles de Plaute et de Térence. Il vient pour la première fois de se montrer dans la comédie ancienne, mais non pas comme un débutant. Il ne lui a manqué ni force, ni grandeur, ni délicatesse, ni mordant, ni douceur, ni grâce ; il a donné de l’attrait à la vertu, et flagellé le vice, il a usé de noms d’emprunt avec goût, de noms vrais avec convenance. À mon égard seulement il a péché par
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher