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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste
Autoren: Hervé Gagnon
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dire, bonne dame ?
    —    Autant que de la couleur du ciel, répliqua-t-elle. Ce que je viens de dire, Joseph d’Arimathie le savait déjà et il s’est assuré que la Vérité ne soit pas oubliée.
    —    Il n’y a aucune erreur possible ? insista Pierrepont.
    —    Errare humanum est 6 , évidemment, mais si je n’étais point cathare, j’en ferais le serment.
    Songeur, Pierrepont hocha la tête, une moue sur les lèvres.
    —    Bien, alors tout est accompli. Finissons-en.
    Il fit un petit signe de la tête à Thury. Les membres des Neuf de Gisors semblaient n’attendre que son signal. À l’unisson, ils tirèrent leur épée et nous encerclèrent. Avant de pouvoir réagir, Pernelle, Ugolin, Jaume et moi-même nous retrouvâmes avec une lame sur la gorge, stupéfaits. Guiburge, qui retenait fermement Pernelle, en parut particulièrement heureuse.
    —    Désarmez-les, ordonna calmement le Magister.
    Déconcerté, je ne songeai même pas à réagir. On me prit
    Memento et ma dague. Ugolin et Jaume furent pareillement dépouillés.
    —    Que signifie ? m’écriai-je enfin, outré.
    Pierrepont m’adressa le regard le plus froid que j’avais jamais vu. Un regard sans âme.
    —    Que toute cette comédie est enfin terminée, répondit-il.

    3
    Des Ténèbres vient la Lumière.

Chapitre 21 Ultimatum
    J’avais été abusé et je n’avais rien vu venir. Sans comprendre les tenants et aboutissants de la situation, j’eus la seule réaction qui m’était naturelle : tuer. On venait de me dépouiller de Memento et de ma dague, mais ironiquement il me restait encore ma senestre infirme. Avant qu’on me les enlève, je fis émerger les lames sur mes jointures d’un geste sec, saisis le bras du soldat qui me retenait pour éloigner son arme de ma gorge, fit pivoter mon torse de côté et les lui enfonçai dans le ventre. Il grogna de surprise et s’écroula, son sang inondant le carrelage.
    La colère me faisant perdre toute raison, j’allais me lancer à corps perdu dans une bataille sans le moindre espoir de survie, lorsque je remarquai qu’Ugolin et Jaume ne bougeaient pas. Ils regardaient fixement vers le côté sud de la pièce. La voix de Guiburge, froide et tranchante comme du métal, me fournit l’explication de leur attitude.
    — Un pas de plus et je lui taille un deuxième sourire.
    Je la vis qui pressait la pointe acérée de son stylet sur la gorge de Pernelle, assez fort pour qu’une goutte de sang perle sur la peau blanche de mon amie. L’expression déterminée des deux femmes me confirma que la situation était sérieuse : Guiburge n’hésiterait pas à concrétiser sa menace et Pernelle ne craignait pas la mort. Il n’en tenait qu’à moi de poursuivre. J’en fus incapable. À cause de moi, on avait brutalisé et violé ma tendre amie plus d’une fois. Malgré mes promesses solennelles, j’avais été impuissant à le prévenir. Cette fois, j’en avais le pouvoir, au moins provisoirement. On devrait d’abord enjamber mon cadavre avant de la violenter à nouveau. Bertrand m’avait répété mille fois que, pour espérer vaincre, je devais connaître mon adversaire mieux que moi-même et savoir choisir mes combats. Il me fallait tempérer ma nature, garder la tête froide et comprendre ce qui se passait. Peut-être découvrirais-je une porte de sortie.
    Résigné, je baissai les bras sans jamais quitter Pierrepont des yeux.
    —    Lambert, retire-lui ce petit jouet, fit-il, sans le moindre égard pour l’homme que je venais d’occire.
    Thury s’approcha de moi et m’empoigna la senestre. J’aurais pu l’embrocher sur-le-champ et il en était conscient, mais Guiburge tenait toujours Pernelle au bout de son arme. Rigide de colère, je le laissai donc faire. Ne parvenant pas à me retirer le gant étroit que la sueur collait à ma peau meurtrie, il finit par perdre patience et le découper avec sa dague. Puis il l’arracha sèchement. Après avoir tâtonné quelques instants, il réussit à détacher le mécanisme de mon poignet. Lorsque ce fut fait, il le considéra en le retournant dans ses mains.
    —    Ingénieux, fit-il.
    Il le passa à Pierrepont, qui l’admira à son tour avant de le poser sur l’autel.
    —    Attache-les, ordonna-t-il.
    Lambert se rendit derrière son fauteuil et en rapporta des câbles. Méthodiquement, il replia cruellement les bras de Jaume derrière son dos et lui lia les poignets. Il fit ensuite de même
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