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L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance

Titel: L'Espion - Un épisode de la guerre d'indépendance
Autoren: James Fenimore Cooper
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souffrance. Tout ce que Dieu m’a accordé ou m’accordera, je le partagerai toujours bien volontiers avec un homme qui a des sentiments si nobles, et qui s’est conduit avec tant de loyauté. Si la vieillesse ou la pauvreté viennent à vous assaillir, présentez-vous à la porte de celui que vous avez vu si souvent sous le nom supposé d’Harper, et quelque situation qu’il occupe, il ne rougira jamais de vous reconnaître.
    – Il me faut bien peu de chose pour vivre, répondit Birch, le front rayonnant de satisfaction. Aussi longtemps que Dieu m’accordera la santé et une honnête industrie, je ne manquerai jamais de rien dans cet heureux pays. Mais savoir que Votre Excellence m’accorde son amitié, c’est un bonheur que j’estime plus que tout l’or de la trésorerie d’Angleterre.
    Le général resta quelques instants dans l’attitude d’un homme plongé dans de profondes réflexions. S’asseyant ensuite devant la table, il prit une feuille de papier, y traça quelques lignes. Remettant alors cet écrit au colporteur : – Je dois croire, dit-il, que la Providence destine ce pays à de grandes et glorieuses destinées, quand je vois un semblable patriotisme embraser le cœur de ses plus humbles enfants. Il doit être affreux pour une âme comme la vôtre d’emporter au tombeau la réputation d’avoir été un ennemi de la liberté. Vous savez qu’il m’est impossible de vous rendre justice à présent, sans compromettre la vie de personnes estimables ; mais je vous confie sans crainte ce certificat. Si nous ne nous revoyons plus, il pourra du moins servir à vos enfants.
    – Mes enfants ! s’écria le colporteur. Pouvais-je léguer à une famille l’infamie de porter mon nom ?
    Le général vit avec un étonnement pénible la forte émotion du colporteur. Il fit un léger mouvement, comme pour ramasser le sac d’or ; mais il fut arrêté par l’expression de fierté qu’il vit sur la physionomie de cet homme étrange. Harvey devina son intention, et ajouta d’un ton plus calme et avec un air de profond respect :
    – C’est véritablement un trésor que Votre Excellence me confie ; mais il est en sûreté entre mes mains. Il existe encore des gens qui pourraient vous dire que la vie n’était rien pour moi, comparée à vos secrets. Le papier que je vous ai dit que j’avais perdu, je l’avais avalé la dernière fois que j’ai été arrêté par les dragons de Virginie. C’est la seule fois que j’aie trompé Votre Excellence, et ce sera la dernière. Oui, c’est un trésor pour moi. Peut-être, ajouta-t-il avec un sourire mélancolique, peut-être saura-t-on après ma mort de qui j’ai mérité la confiance ; et si on ne le sait pas, il n’y aura personne pour me regretter.
    – Souvenez-vous, lui dit le général avec émotion, que vous aurez toujours en moi un ami secret, mais que je ne puis vous reconnaître en public.
    – Je le sais, je le sais, répondit Birch ; je connaissais les conditions du service dont je me suis chargé. C’est vraisemblablement la dernière fois que je verrai Votre Excellence ; puisse le ciel verser toutes ses bénédictions sur sa tête ! Il se tut et s’avança vers la porte. Le général le suivit des yeux avec l’air du plus vif intérêt. Le colporteur se retourna encore une fois, et sembla contempler avec un regret respectueux la physionomie douce mais imposante du général. Enfin il le salua, et se retira.
    Les armées de la France et de l’Amérique furent conduites par leur chef commun contre les Anglais commandés par Cornwallis, et un triomphe glorieux termina une campagne qui avait commencé par des difficultés. La Grande-Bretagne, bientôt après, se lassa de la guerre, et l’indépendance des États-Unis fut reconnue.
    Des années s’écoulèrent. Avoir contribué à l’établissement de la liberté en Amérique, de cette liberté qui avait répandu tant de bonheur dans ce pays, devint un titre de gloire pour ceux qui y avaient ouvertement pris part et pour leurs descendants ; mais le nom d’Harvey Birch mourut dans l’obscurité, avec celui d’autres gens qu’on regardait comme ayant été les ennemis secrets des droits de leurs concitoyens. Son image était pourtant souvent présente à l’esprit du chef puissant qui, seul, connaissait son véritable caractère ; et qui plusieurs fois chercha à obtenir des renseignements sur ce qu’il était devenu. Il y réussit une seule fois, et tout ce
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