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Les proies de l'officier

Les proies de l'officier

Titel: Les proies de l'officier
Autoren: Armand Cabasson
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brave fille de rien.
    Margont fut pris de court. L’explication politique du prince l’aurait convaincu si ce dernier ne s’était pas montré si hésitant durant quelques instants.
    — Ce sont les ordres, répliqua-t-il.
    La réponse fétiche des militaires qui ne voulaient pas répondre. Maroveski ayant longtemps côtoyé des soldats, il n’insista pas et abandonna son ton soupçonneux pour retrouver sa détresse.
    — Savez-vous qui pourrait avoir agi ainsi ? enchaîna Margont.
    — C’est... le prince charmant.
    Margont demeura immobile, comme si le plus petit geste risquait de faire s’envoler ce début d’indice.
    — Elle l’avait appelé comme ça, mon capitaine.
    — Vous avez vu cet homme ?
    — Jamais. Tout ça est si étrange... Il faut que je vous parle de Maria, d’abord. Elle était d’une bonne famille, mais ses parents sont morts depuis longtemps. Maria avait trente-six ans. Son mari, sergent, on l’a tué à Wagram. Depuis, Maria menait une vie honnête !
    Cette dernière phrase avait été prononcée avec conviction. Maroveski cherchait ses mots et parlait lentement.
    — Maria avait pas beaucoup d’argent. Et plus de famille, alors elle est venue me voir il y a deux ans. On a fait un marché. Elle habitait dans mon auberge sans me payer et elle faisait du ménage, de la cuisine, rendait des services... Elle travaillait bien et elle était polie. En trois ans, il y avait jamais eu quelqu’un, vous voyez ? Pourtant, avec tous ces soldats qui vont par ici, ce sont pas les hommes qui manquent et elle était jolie, Maria. Elle aurait pu se remarier ou... recevoir. Mais non. Moi, je lui disais : Maria, prends un époux avant que ce soit plus le temps. Mais Maria, elle voulait l’homme parfait : gentil, avec des manières, savant... Et puis juste le jour d’avant sa mort, elle revient tout heureuse, elle chante ! Je la plaisante, je lui dis : « Alors, Maria, on a le coeur bien gai aujourd’hui. » Moi, je me moquais, mais elle rougit et elle me dit qu’elle a peut-être rencontré son « prince charmant ». Moi, j’ai rien dit. Mais qui c’était, lui, qui, en un jour, avait séduit Maria ? Pourtant, des jolis parleurs, y en a qui passent par chez moi, des riches marchands, des propriétaires bien éduqués...
    — Vous a-t-elle reparlé de lui ? A-t-elle dit où elle l’avait rencontré ?
    — Non.
    — Qu’était-elle allée faire ?
    — Des courses pour moi, voir des gens...
    — Pouvez-vous me donner quelques noms ?
    Maroveski haussa les épaules.
    — Maria était l’amie de tout le monde ici.
    Margont soupira intérieurement. Avec le début de la campagne, il n’aurait jamais le temps de reconstituer l’emploi du temps de Maria ce jour-là et d’interroger ceux qu’elle avait pu rencontrer.
    — Pourquoi pensez-vous que c’est ce « prince charmant » qui l’a tuée ?
    — Le soir de sa mort, il y avait du monde : beaucoup de soldats et d’officiers, partout, partout. Mes serveuses et moi, on courait jamais assez vite pour apporter tous les plats et le vin. Maria n’était pas là. Je suis monté dans sa chambre pour lui dire de venir aider. Quand elle a ouvert sa porte, elle portait sa jolie robe, celle pour aller à l’église. Elle était si belle, vous pouvez pas savoir. Elle a rougi et elle m’a dit que son ami allait lui rendre visite. Elle m’a supplié de pas travailler avant minuit. J’ai dit oui.
    Maroveski était plus pitoyable que jamais. Il était doublement captif, de cette cave et d’un amour à sens unique figé à jamais par la mort. Margont se rapprocha machinalement de la porte. Cela faisait déjà trop longtemps pour lui qu’il se trouvait dans une pièce fermée à clé.
    — Vous avez sûrement essayé d’apercevoir son invité ?
    — Oui, mais il y avait trop de monde ! Plein de gens voulaient s’amuser avant de peut-être mourir.
    — Vous ne l’avez pas vu monter l’escalier ?
    — Des gens s’asseyaient sur les marches, car pas de place ailleurs. Et plein de gens aussi allaient boire avec des amis dans les chambres.
    — Un prince charmant, cela pourrait désigner un officier, tenta Margont.
    L’aubergiste ne réagit pas.
    — Il y en avait partout : des lieutenants, des capitaines...
    — Et des plus gradés encore ?
    — Je sais pas. Des clients étaient en civil. Et puis, il pleuvait, alors beaucoup avaient une capote ou un manteau.
    Margont se demanda si le meurtrier avait
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