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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre
Autoren: Ken Follett
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ont fini par nous ordonner de le
tuer. »
    C’était si
facile…, se dit Jack. « Pourquoi leur avez-vous obéi ?
    — Nous
étions ambitieux tous les trois. Percy Hamleigh, le prieur James et moi »,
expliqua Waleran ; et, pour la première fois, son visage exprima
l’émotion, tandis que sa bouche se crispait dans une grimace de remords.
« Ta mère a dit la vérité : nous avons tous eu notre récompense. Je
suis devenu archidiacre et ma carrière dans l’Église a pris un magnifique
départ. Percy Hamleigh a reçu d’importants domaines. Le prieur James a vu le
prieuré s’agrandir de quelques bonnes terres.
    — Et
les barons ?
    — Après
le naufrage, Henry, au cours des trois années suivantes, fut attaqué par Fulk
d’Anjou, Guillaume Clito en Normandie et le roi de France. Un moment, il parut
très vulnérable. Mais il vainquit ses ennemis et régna dix ans encore.
Pourtant, l’anarchie que souhaitaient les barons a pris le dessus, au bout du
compte, lorsque Henry est mort sans héritier mâle et que Stephen est monté sur
le trône. Pendant les deux décennies suivantes où la guerre civile faisait
rage, les barons régnèrent en maîtres absolus sur leurs territoires, sans
autorité centrale pour réfréner leurs appétits.
    — Mon
père est mort à cause de ces appétits…
    — La
situation a fini par tourner à l’aigre. La plupart des barons sont morts au
combat et certains de leurs fils aussi. Les mensonges que nous avions inventés
pour faire tuer ton père sont revenus nous hanter. Ta mère nous a maudits après
la pendaison, et sa malédiction a produit son effet : le prieur James fut
anéanti par le remords de ses actes ainsi que Remigius l’a raconté au procès du
prieur Philip. Percy Hamleigh est mort avant que la vérité ne se fasse jour,
mais son fils a été pendu. Regarde-moi : près de cinquante ans plus tard,
on m’a reproché mon parjure, et ma carrière a pris fin. » Épuisé, le teint
gris, Waleran ne se maîtrisait qu’au prix d’un terrible effort. « Nous
avions tous peur de ta mère, car nous n’étions pas sûrs de ce qu’elle savait.
Tout compte fait, ce n’était pas grand-chose, mais cela a suffi. »
    Jack se
sentit aussi dénué de forces que Waleran. Enfin, il savait la vérité sur son
père, cette vérité qu’il avait cherchée toute sa vie. Il n’éprouvait ni colère
ni désir de vengeance. Si Jack n’avait jamais connu son vrai père, en revanche,
Tom l’avait élevé et lui avait donné l’amour des bâtiments, la seconde passion
de sa vie.
    Il se
leva. Tous ces événements étaient trop enfouis dans le passé pour le faire
pleurer. Il était arrivé tant de choses depuis lors, et de bonnes choses pour
la plupart.
    Il
considéra le vieil homme accablé. Par une ironie du sort, c’était Waleran qui
souffrait maintenant l’amertume du regret. Jack le plaignait. Comme c’est
terrible, songea Jack, d’être vieux et de savoir qu’on a gâché sa vie. Waleran
leva la tête et leurs regards pour la première fois se croisèrent. Waleran
tressaillit comme si on l’avait giflé. Un instant, Jack put lire dans les
pensées du vieil homme et il comprit que Waleran avait vu de la pitié dans ses
yeux.
    Or, pour
Waleran, la pitié de ses ennemis était la pire des humiliations.

V
    Philip
attendait à la porte ouest de la vieille cité chrétienne de Canterbury, revêtu
de la somptueuse tenue d’apparat d’un évêque anglais et portant une crosse
ornée de bijoux qui aurait pu payer la rançon d’un roi. Il pleuvait à verse.
    Philip
avait soixante-dix ans. La pluie glaçait ses vieux os. C’était la dernière fois
qu’il s’aventurait si loin de chez lui, mais il n’aurait pas manqué ce jour-là
pour un empire. D’une certaine façon, la cérémonie qui se préparait
couronnerait l’œuvre de sa vie.
    Il s’était
écoulé trois ans et demi depuis le meurtre historique de l’archevêque Thomas.
Dans ce bref laps de temps, le culte mystique de Thomas Becket avait envahi le
monde. Philip ne s’était pas douté de ce qu’il lançait en conduisant cette
petite procession aux cierges dans les rues de Canterbury. Le pape avait fait
de Thomas un saint avec une rapidité presque choquante. Il existait même un
nouvel ordre de moines chevaliers en Terre sainte : les chevaliers de
Saint-Thomas d’Acre. Le roi Henry n’avait pas pu lutter contre un mouvement
populaire d’une telle puissance. Aucun individu n’aurait pu
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