Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre
Autoren: Ken Follett
Vom Netzwerk:
temps, les gens levaient la tête, comme
des moineaux inquiets, et jetaient un coup d’œil au château sur la colline qui
dominait la ville. Ils voyaient la fumée monter régulièrement de la cuisine et
la lueur parfois d’une torche derrière les fenêtres en meurtrière du donjon de
pierre. Et puis, au moment où le soleil devait commencer à se lever derrière
l’épais nuage gris, les lourdes portes en bois du poste de garde s’ouvrirent et
un petit groupe apparut. Le prévôt allait en tête, montant un beau cheval noir,
suivi d’un char à bœufs transportant le prisonnier ligoté. Derrière le chariot
chevauchaient trois hommes. Bien que d’aussi loin on ne pût distinguer leurs
visages, leurs vêtements révélaient qu’il s’agissait d’un chevalier, d’un
prêtre et d’un moine. Deux hommes d’armes fermaient la marche.
    Ils
s’étaient tous rendus la veille à la cour de justice du comté, qui se tenait
dans la nef de l’église. Le prêtre avait surpris le voleur la main dans le
sac ; le moine avait identifié le calice d’argent comme appartenant au
monastère ; le chevalier était le suzerain du voleur, il l’avait reconnu
comme un fugitif ; et le prévôt l’avait condamné à mort.
    Tandis
qu’ils descendaient lentement la colline, le reste de la ville se groupa autour
de l’échafaud. Parmi les derniers à arriver, les notables : le boucher, le
boulanger, deux tanneurs, deux forgerons, le coutelier et l’armurier, tous avec
leurs épouses.
    La foule
était d’humeur bizarre. En général on aimait bien une pendaison. Le prisonnier
était d’ordinaire un voleur et ils détestaient les voleurs avec la passion de
gens qui ont durement gagné ce qu’ils possèdent. Mais ce voleur-là n’était pas
comme les autres. Personne ne savait qui il était ni d’où il venait. Ce n’était
pas eux qu’il avait volé, mais un monastère à huit lieues d’ici.
    Il avait
volé un calice orné de joyaux, un objet d’une si grande valeur qu’il était
pratiquement impossible à revendre : ce n’était pas comme voler un jambon,
un couteau neuf ou une belle ceinture, dont la perte nuirait à quelqu’un. On ne
pouvait pas haïr un homme pour un crime si absurde. Il y eut quelques lazzis et
quelques railleries quand le prisonnier pénétra sur la place du marché, mais
les injures manquaient de conviction et seuls les jeunes garçons se moquaient
de lui avec un certain enthousiasme.
    La plupart
des gens de la ville n’étaient pas au tribunal, car les jours de cession
n’étaient pas fériés et ils devaient tous gagner leur vie, aussi était-ce la
première fois qu’ils voyaient le voleur. Celui-ci paraissait très jeune, entre
vingt et trente ans. De taille et de stature normales, il avait pourtant un
aspect étrange, dû à sa peau aussi blanche que la neige sur les toits, à ses
yeux protubérants d’un vert clair extraordinaire et à ses cheveux couleur
carotte. Les filles le trouvèrent laid ; les vieilles le
plaignirent ; et les petits garçons rirent en se roulant par terre.
    Le prévôt
était un personnage familier, mais les trois autres hommes qui avaient scellé
le destin du voleur étaient des étrangers. Le chevalier, un gros homme aux
cheveux jaunes, était de toute évidence quelqu’un d’une certaine importance,
car il montait un destrier, une énorme bête qui coûtait autant d’argent qu’un
charpentier n’en gagne en dix ans. Le moine était beaucoup plus âgé, au moins
cinquante ans, un grand homme maigre affalé sur sa selle, comme si la vie était
pour lui un fardeau accablant. Le plus remarquable était le prêtre, un jeune
homme au nez pointu et aux cheveux noirs et plats, vêtu d’une robe noire et
chevauchant un étalon bai. Il avait l’air vif et dangereux d’un chat noir
flairant un nid de souriceaux.
    Un gamin
visa avec soin et cracha sur le prisonnier. Il avait bien ajusté son tir et
toucha l’homme entre les yeux. Le condamné grommela un juron et voulut se jeter
sur le cracheur, mais il était retenu par les cordes qui l’attachaient aux
ridelles de la charrette. Incident banal, sinon que le prisonnier parlait en
français normand, la langue des seigneurs. Ce jeune homme était-il de haute
naissance ? Ou simplement loin de chez lui ? Nul n’aurait su le dire.
Le char à bœufs s’arrêta au pied de l’échafaud. Le bailli du prévôt monta sur
le plateau, le nœud coulant à la main. Le prisonnier commença à se débattre.
Les
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher